Sa voix s’éclaircit, son visage s’illumine et son sourire devient communicatif. Hamoudi Benhammoud, puisque c’est de lui qu’il s’agit, retombe dans l’enfance dès qu’on lui parle de son bébé. Pas de ses enfants biologiques, non. Ils sont assez grands pour enfanter eux-mêmes, mais de son étoile, de sa bonne étoile, Nedjm Kortba, l’association culturelle et artistique créée en 2001. Plusieurs amis de Benhammoud, un cercle proche de ce chanteur septuagénaire, des mélomanes avertis, ont été de bon conseil, pourquoi ne pas faire des petits Benhammoud puisque Hamoudi peut transmettre ce qu’il a appris en presque un demi-siècle ?
de Constantine, Hamid Bellagha
«Ce n’était pas l’occasion de créer pour créer. Les écoles, il y en a beaucoup, souvent talentueuses, presque toujours inconnues. Avec des amis, nous avons décidé d’engendrer une véritable école de sauvegarde du genre malouf, associée à un apprentissage du patrimoine musical national et local. Une sorte de rappel, d’évocation et de gardiennage du temple du malouf avec ses dérivés que sont le zadjel, le mahdjouz, le haouzi et le madih religieux, el madiheddini», nous dira Benhammoud, toujours avec cet éclat dans les yeux quand il s’agit de ses… pupilles, que sont ses nombreux élèves. Bien sûr, notre ami Hamoudi n’active pas seul, et il ne le voudrait pas. «Yedwahda ma tsaffeq», (une seule main ne peut applaudir, ndlr), soulignera-t-il à maintes reprises à ses élèves, reconvertis, quelques années plus tard, en instructeurs. C’est pourquoi un organigramme aussi raffiné qu’un cahier de musique a été élaboré pour satisfaire, enseigner et… contenir les dizaines d’élèves qui se pressent pour avoir l’honneur de devenir apprenants à Nedjm Kortba. L’association, donc, possède une classe A d’initiation au solfège, aux instruments divers et au chant en chorale, avec des bambins dont l’âge varie entre 9 et 13 ans. Suivra une classe B pour le perfectionnement au chant et aux instruments et enfin, une classe supérieure pour les adolescents et les adultes avertis. Une association musicale ne vivant et n’espérant que par des participations à différents festivals, Nedm Kortba a été très «jeune» confrontée à des joutes artistiques où les meilleurs du domaine se sont produits. C’est ainsi qu’à l’état embryonnaire, Nedm Kortba a concouru aux festivals de la chanson arabe à Constantine en octobre 2001, maghrebin de la chanson mahdjouz Constantine en novembre de la même année. Puis le festival Madih organisé par l’association Inchirah à Alger, en octobre 2003, et les festivités andalouses chez l’association Errachidia à Cherchell en avril 2008. Layali el malouf à Constantine suivront, 3 éditions, de 2008 à 2010, puis la semaine culturelle constantinoise, organisée à Oran en novembre 2011, et la liste est encore longue pour les années qui suivent, avec comme dernière apparition au festival du haouzi organisé par Hadrate Andalous à Tlemcen en décembre 2018. L’association chère à Hamoudi Benhammoud sera lauréate à deux reprises lors du Festival national du haouzi à Tlemcen en juillet 2014 et à celui du malouf à Constantine en septembre 2014. Des CD de qualité musicale et artistique seront gravés en 2012, 2013 et en 2014. L’année 2015 sera celle des CD pour l’événement culturel international «Constantine, capitale de la culture arabe». «Je suis gâté. Nedjm Kortba a enfanté et enfantera encore beaucoup de talents et d’artistes qui volent déjà de leurs propres ailes. Mais, et il y a un mais, malgré tous les résultats et les reconnaissances que l’on a en dehors de Constantine, notre propre ville nous «oublie» très souvent quand il s’agit de financer un voyage, une formation extra muros, ou une participation à un événement culturel ou pour honorer une invitation», conclura Hamoudi Benhammoud avec le regard un peu moins brillant, assombri par le manque de considération affichée par la capitale du malouf à l’égard de son… bébé.n