Après trois jours de bombardement de Gaza, l’armée israélienne a ciblé, hier, la Cisjordanie occupée au prétexte d’opérations «préventives», un euphémisme sous lequel tombent des vies palestiniennes dans un contexte de quasi indifférence internationale.
Par Kahina Terki
Trois Palestiniens, dont un haut commandant du mouvement Fatah, ont été tués et des dizaines blessés lors d’un raid mardi de l’armée israélienne à Naplouse en Cisjordanie occupée. Selon le ministère palestinien de la Santé, trois Palestiniens ont été tués lors de l’opération dans la vieille ville de Naplouse, au cours de laquelle des tirs ont été échangés entre activistes palestiniens et forces israéliennes. L’armée israélienne a fait état de deux morts palestiniens, Ibrahim al-Nabulsi, un haut responsable des Brigades des martyrs d’Al-Aqsa, branche armée du mouvement Fatah du président Mahmoud Abbas, et un autre combattant. Le corps d’Ibrahim al-Nabulsi a été transporté par une dizaine d’hommes armés à l’hôpital Rafidia de Naplouse, dans le nord de la Cisjordanie, territoire palestinien occupé depuis 1967 par Israël, où des centaines de Palestiniens se sont rassemblés. «Notre réponse sera à la hauteur du crime», a affirmé dans un communiqué de la branche armée du Fatah, en confirmant le décès de Nabulsi. Le ministère palestinien de la Santé a identifié les deux autres morts comme étant Islam Sabbouh, 25 ans, et Hussein Taha, 16 ans. «L’armée était dans la vieille ville, mon fils s’est rendu au marché juste avant moi et mes proches (…) il y a eu une fusillade et quatre d’entre nous ont été blessés», a déclaré à l’AFP Jamal Taha, le père de l’adolescent tué. Selon le Croissant-Rouge palestinien, 69 Palestiniens ont été blessés par balle, dont au moins quatre sont dans un état critique, lors de heurts liés à l’opération israélienne. Le raid des forces d’occupation israélienne à Naplouse est survenu deux jours après la fin d’une opération militaire meurtrière israélienne lancée contre le mouvement palestinien armé Jihad islamique, implanté dans la bande de Gaza. Selon un bilan du Hamas au pouvoir à Gaza, 46 Palestiniens ont été tués dont 16 enfants durant les trois jours de bombardement qui ont provoqué d’importantes destructions et laissé sur le carreau une enfance saccagée. Dans un rapport publié en juin, l’organisation britannique Save the children s’alarmait d’ «enfances gâchées par cinq escalades de violence et une décennie et demie de blocus» israélien imposé en 2007. Les enfants gazaouis «ont de façon répétée vécu ou été témoins d’événements traumatiques et de graves violations de leurs droits», soulignait l’ONG. Deux principaux chefs militaires du Jihad islamique à Gaza, Khaled Mansour et Tayssir Al-Jabari, ont été tués dans les frappes israéliennes. La branche militaire du Jihad islamique a confirmé la mort de 12 de ses combattants dans l’opération. En riposte aux bombardements lors de l’opération israélienne présentée comme préventive contre le Jihad islamique, celui-ci a tiré un millier de roquettes en direction d’Israël, la grande majorité ayant été interceptée selon l’armée. Les tirs de roquettes depuis Gaza ont fait trois blessés en Israël, selon les secours locaux. Une trêve entre le Jihad Islamique et Israël, favorisée par l’Egypte, est entrée en vigueur dimanche soir, ce qui a permis lundi la réouverture des passages entre l’Etat hébreu et la bande de Gaza, une enclave sous blocus israélien depuis plus de 15 ans.
Conseil de sécurité de l’ONU, «inquiétude» mais impuissance
Les opérations de l’armée israélienne à Gaza et en Cisjordanie obéissent à un agenda poltico-électoral, accuse l’Autorité palestinienne. «Le gouvernement israélien n’est pas intéressé par le calme et la stabilité, il exploite et tue des Palestiniens pour des considérations de politique interne», à l’approche des élections législatives anticipées du 1er novembre en Israël, a estimé à ce sujet hier mardi Nabil Abou Roudeina, le porte-parole du président de l’Autorité, Mahmoud Abbas. Lundi 8 août 2022, le Conseil de sécurité de l’ONU s’est penché sur la situation à Gaza en réunion d’urgence. La Chine, qui le préside durant ce mois d’août, avait annoncé cette réunion samedi, l’ambassadeur Zhang Jun se disant «très inquiet de la situation». Selon plusieurs sources diplomatiques relayées par les agences de presse, aucune déclaration du Conseil de sécurité n’était prévue à l’issue de la réunion d’urgence. Dans une déclaration à la presse lundi matin aux Nations unies, l’ambassadeur israélien à l’ONU Gilad Erdan a rejeté «toute la responsabilité» sur le Jihad islamique, l’accusant d’utiliser les habitants de Gaza comme «bouclier humain». «Si le Conseil de sécurité veut vraiment améliorer la situation à Gaza, il doit y avoir un seul résultat, condamner le double crime de guerre du Jihad islamique et placer l’entière responsabilité des meurtres de Palestiniens innocents sur les épaules du groupe terroriste», a-t-il déclaré. Les Gazaouis, eux, comptent leurs morts et leurs blessés. Leur tragédie n’a pas de fin. n