Par Hamid Bellagha
La crise du gaz n’en finit pas de donner des cauchemars et des migraines aux économistes européens. S’autoproclamant co-gendarme du monde, en compagnie des Etats-Unis, l’Union européenne s’est empressée d’appliquer tout un arsenal de sanctions contre la Russie, mettant à mal l’économie du Kremlin et, par ricochet, la leur.
Dépendant en grande partie des céréales et des oléagineux russes, l’UE a enregistré ses premières pénuries d’huile, de semoule et de farine depuis la Seconde Guerre mondiale. Poussant les sanctions à l’extrême, malgré des étals de grandes surfaces qui ressemblaient de plus en plus à ceux de la défunte Union soviétique, Paris, Berlin et leurs alliés se sont retrouvés dans le rôle de celui qui a scié la branche sur laquelle il était pourtant confortablement installé.
Avec la pénurie de pièces détachées qui a affecté les rouages de l’industrie de l’énergie russe, pour cause de sanctions occidentales, le fameux Nord Stream a fini par s’enrhumer, selon Moscou. Suffisant pour que toute l’Union européenne tousse violemment. De fait, les livraisons de gaz pour la vieille Europe ne seront pas suffisantes pour couvrir ses besoins énergétiques. L’offre étant très inférieure à la demande, les cours de gaz ont pris une tangente qui a fait grimper ses prix de 50 %, ajoutant quelques chiffres à l’inflation qui sévit en Europe depuis le déclenchement des hostilités en Ukraine.
Malgré le recours à des fournisseurs au sud de la Méditerranée et au Moyen-Orient, Algérie et Qatar essentiellement, la nouvelle offre ne pourra pas suppléer la Russie, du moins pour les deux ou trois années à venir.
C’est donc le branle-bas de combat au sein de l’UE, et plusieurs voix commencent déjà à s’élever contre leurs dirigeants actuels, condamnant leur politique agressive à l’égard de Poutine, sans privilégier la voie diplomatique qui aurait pu atténuer les effets collatéraux de la guerre et sa durée.
Pourtant, l’arrêt momentané du Nord Stream n’est attendu qu’au mois de juillet, et pour une durée de quinze jours seulement. Cela a suffi à développer une effrayante perspective de pénurie et de récession qui a conduit à une course effrénée pour bourrer les sites de stockage de gaz à des niveaux conformes.
Le risque d’un hiver difficile et d’une crise de l’énergie comme celle des années 70 menace à nouveau l’Europe. La Russie que l’on devait « achever » à tout prix, pour reprendre les bravades outre Atlantique, a réussi à inverser les rôles se retrouvant dans celui du Maître des horloges, tenant dans une main l’arme alimentaire et dans l’autre celle de l’énergie. Et pourtant, le Kremlin n’a pas dévoilé toutes ses cartes…