Par Halim Midouni
Une porte-parole du ministère chinois des Affaires étrangères a exhorté mercredi les Etats-Unis à lever immédiatement les sanctions unilatérales contre la Syrie, alors que le pays frappé par le séisme est confronté à une importante crise humanitaire.
Cet appel de Pékin à Washington indique que face à un même désastre et à une même crise humanitaire majeure, deux pays peuvent ne pas bénéficier de la même aide ni du même soutien humanitaire. Et c’est ce qui se passe actuellement au vu de la rareté pour l’instant des secours occidentaux acheminés vers la Syrie tandis que Damas bénéficie de l’assistance de pays « amis » comme la Russie, la Chine , l’Algérie et d’autres pays.
En somme, c’est une géopolitique de l’aide humanitaire que dessine devant nous la catastrophe majeure qui vient de balayer une partie de la Turquie et de la Syrie. Un exemple à cela : des pays comme l’Algérie envoient de l’aide à Damas. Les Émirats arabes unis ont promis mardi 100 millions de dollars dont la moitié de la somme ira aux populations affectées en Syrie.
Quelques heures après le séisme lundi, l’aide d’urgence était en route vers la Turquie. Des pays comme la France, l’Allemagne et les Etats-Unis ont également promis de secourir les victimes syriennes sans pour autant dépêcher immédiatement les secours en raison des difficultés logistiques dans un pays en guerre. Cette attente qui peut ne pas durer face à l’ampleur du désastre et la multiplication des appels dont celui de l’ONU, de la communauté catholique de Sant’Egidio ou du Croissant-rouge syrien, à porter secours aux sinistrés. Elle est argumentée par la crainte que les secours n’aillent pas aux zones contrôlées par les rebelles qui combattent ce régime.
« La Syrie reste une zone d’ombre d’un point de vue légal et diplomatique », a résumé il y a trois jours Marc Schakal, le responsable du programme Syrie de Médecins sans Frontières. Il a exhorté à acheminer l’aide à ce pays au « plus visite », redoutant que les ONG locales et internationales ne soient dépassées dans un pays ravagé par 12 années de guerre civile, qui oppose rebelles, dont certains sont instrumentalisés par des puissances étrangères, jihadistes, forces kurdes et armée du gouvernement de Bachar al-Assad.
La quasi-totalité de l’aide humanitaire vers la Syrie est acheminée de Turquie par Bab al-Hawa, l’unique point de passage, garanti par une résolution du Conseil de sécurité des Nations unies. Acheminer de l’aide à partir du territoire syrien contrôlé par Damas est épineux diplomatiquement. Cela suppose aussi que le régime consente à la transmettre aux populations de la zone rebelle et que les belligérants s’accordent sur sa distribution, affirment les pays occidentaux.
Le passage de Bab al-Hawa, contesté par Damas et Moscou qui dénoncent une violation de la souveraineté syrienne, a été maintenu pour six mois supplémentaires jusqu’au 10 juillet. Sous la pression de la Russie et de la Chine, les trois autres points de passage ont été supprimés. Mais Bab al-Hawa a été touché par le séisme ayant frappé les deux pays, a déclaré l’ONU mardi.
Pour l’heure, les experts doutent de la possibilité que les anciens points de passage puissent être rouverts. L’ambassadeur syrien aux Nations unies Bassam Sabbagh a assuré que cette aide irait « à tous les Syriens sur tout le territoire ». A condition néanmoins que celle-ci soit acheminée de l’intérieur de la Syrie sous contrôle du gouvernement.
Fait nouveau hier, Berlin est sorti de sa réserve pour demander l’ouverture de tous les points de passage. De plus, « tous les acteurs internationaux, y compris la Russie, devraient user de leur influence pour que l’aide humanitaire aux victimes puisse arriver », a commenté la ministre allemande des Affaires étrangères Annalena Baerbock.
Mardi 7 février, le porte-parole du Bureau de coordination des Affaires humanitaires de l’ONU, Jens Laerke, à Genève, a lancé cet appel : « Il est impératif que tout le monde considère cette situation (…) pour ce qu’elle est, une crise humanitaire où des vies sont en jeu, s’il vous plaît, ne la politisez pas ». n