Synthèse Selma Allane
En Syrie, le coût politique du séisme ne devrait pas être le même que dans la Turquie voisine. Le président Bachar al-Assad est au pouvoir depuis plus de vingt-deux ans. En raison de la nature du régime qu’il incarne, il ne devrait pas être inquiété ni être en situation de rendre compte aux électeurs dans son pays ravagé par la guerre depuis 2011. Pour de nombreux observateurs, le bilan humain du séisme qui a touché le nord-ouest de la Syrie – des milliers de morts dans un pays quasiment sous embargo et morcelé territorialement – pourrait inverser l’image épouvantable du régime de Damas et le rendre plus audible dans sa demande de levée des sanctions internationales qui pèsent sur lui. Une telle évolution pourrait reconfigurer à nouveau – et de manière spectaculaire – le jeu géopolitique dans la région. Des experts internationaux ne l’excluent pas. Les aides affluent en masse en Turquie, alors qu’elles restent limitées et contraintes pour la Syrie.
Cependant, les appels se limitent actuellement à venir au secours de toutes les victimes de la catastrophe y compris dans les zones rebelles qui échappent au contrôle de Damas qui multiplie les garanties d’acheminement des aides humanitaires à l’ensemble du pays.
Le département du Trésor américain a annoncé la levée temporaire de certaines sanctions imposées à la Syrie, avec l’objectif de voir l’aide être acheminée aussi vite que possible. Paris a annoncé jeudi une aide d’urgence à la population syrienne à hauteur de 12 millions d’euros.
Londres a indiqué débloquer une aide financière supplémentaire d’au moins 3,4 millions d’euros, soit un montant total de près de 4,3 millions d’euros alloués aux «Casques Blancs», organisation opérant dans les zones rebelles. La Banque mondiale a, de son côté, annoncé jeudi qu’elle apportera une aide de 1,78 milliard de dollars à la Turquie et Washington une enveloppe de 85 millions de dollars à la Turquie et à la Syrie.
Vendredi 10 février, le gouvernement syrien a déclaré accepter à l’issue d’un Conseil des ministres «l’acheminement des aides humanitaires à l’ensemble» du pays «dont les zones hors du contrôle de l’Etat» où des centaines de milliers de personnes risquent de se retrouver sans abri, a alerté l’ONU. Damas a précisé que la distribution de l’aide devrait être «supervisée par le Comité international de la Croix-Rouge et le Croissant-Rouge syrien», avec l’appui des Nations unies.
Le même jour Le Haut-Commissaire de l’ONU aux droits de l’Homme a demandé «un cessez-le-feu immédiat» en Syrie pour y faciliter le soutien aux populations sinistrées. A Damas, un représentant du Haut-commissariat des Nations unies pour les réfugiés (UNHCR), Sivanka Dhanapala, a averti que «jusqu’à 5,3 millions de personnes en Syrie pourraient se retrouver sans endroit où vivre à cause des dommages provoqués par le séisme. Les organisations humanitaires s’inquiètent particulièrement de la propagation du choléra, qui est réapparu dans le pays.
La quasi-totalité de l’aide humanitaire destinée aux zones rebelles est acheminée depuis la Turquie par le point de passage de Bab al-Hawa, le seul actuellement garanti par l’ONU. La diplomatie turque dit s’employer à ouvrir deux autres points de passage «avec les régions sous contrôle du gouvernement» de Damas, «pour des raisons humanitaires». De son côté, le directeur général de l’Organisation mondiale de la santé (OMS), Tedros Adhanom Ghebreyesus, qui a annoncé jeudi se rendre en Syrie, est arrivé hier. La présidente du Comité international de la Croix-Rouge (CICR), Mirjana Spoljaric, est arrivée, elle, jeudi à Alep. n