Par Kahina Sidhoum
Le bilan de l’année 2022 du Centre national du registre de commerce (CNRC) révèle une nouvelle fois que la concentration des activités entrepreneuriales et commerciales concerne davantage les régions du nord de l’Algérie que celle du sud. Selon ce document, le nombre le plus importants des commerçants recensés en activité se trouve dans le Grand Alger.
La wilaya abrite, en effet, 293.984 commerçants, l’équivalent de 13,20% de l’ensemble des opérateurs à l’échelle nationale. Elle est suivie de la région d’Oran qui compte une population de 115.217 commerçants, 5,17% du total. Puis de Sétif et de Tizi-Ouzou.
La première région totalise 100.049 opérateurs (4,49%), tandis que la deuxième dénombre, selon le fichier du centre du registre de commerce, 90.335 commerçants (4,05%). Le nombre de commerçants dans le Sud algérien n’est pas communiqué, ce qui aurait été intéressant à publier pour savoir quelles sont aujourd’hui ces régions qui connaissent une dynamique économique et connaitre les raisons de celles qui en sont dépourvues actuellement.
En effet, toutes les régions sahariennes ne sont pas logées à la même enseigne en termes de création d’espaces commerciaux et des foyers économiques qu’elles sont susceptibles d’engendrer par exemple dans le secteur des services. Ghardaïa et le M’zab en général restent fidèles à leur ADN de foyers entrepreneuriaux et commerçants dynamiques. Des études récentes font observer l’essor nouveau du commerce de gros dans des villes comme Bechar, Adrar et Timimoune, en particulier dans l’alimentaire, la quincaillerie, les matériaux de construction et l’habillement.
Mais, force est de constater que d’autres régions sahariennes restent dans l’ensemble encore peu attractives pour ne pas dire enclavées, en dépit de l’intérêt politique et économique massif de l’Etat pour les espaces sahariens et leur développement socio-économique.
Qu’est-ce qui ne fonctionne pas encore pour que ces espaces deviennent économiquement pertinents ? La démographie et la concentration urbaine, plus massive au nord et dans les régions côtières, expliquent en partie cette faiblesse : les commerces naissent là où la population est la plus importante et là où la demande est la plus forte.
Mais ces deux facteurs risquent de cacher d’autres paramètres sur lesquels les concernés par l’aménagement et le développement du territoire doivent se pencher, d’autant que le débat depuis plus de trois décennies au moins est à la création de nouvelles villes et de nouveaux territoires économiquement pertinents, thème abordé il y a plus d’une dizaine années à Tamanrasset par les chercheurs du Centre de Recherche en Économie Appliquée pour le Développement (CREAD) lors d’un colloque international. Une rencontre scientifique qu’on aimerait voir à nouveau organisée.
Parmi ces paramètres, la difficulté manifeste des pouvoirs publics à concrétiser la mobilité qu’ils souhaitent encourager vers des régions sahariennes pourtant soumises aujourd’hui à de nouveaux découpages administratifs (en cours depuis 1985 et qui se sont accélérées récemment) censés bouleverser positivement leur composante socio-économique, les rendre attrayantes et séduisantes pour les créateurs de micro-entreprises, de petites entreprises et pour les commerçants.
Pourquoi ? Les réponses sont nombreuses à la lecture des études et des thèses publiées par les spécialistes de l’Aménagement du territoire et des questions économiques. Ceux-là pointent l’absence de bilans des ambitieux programmes et des fonds de développement dédiés aux régions du Sud algérien, fortement dotés en termes de ressources pour l’amélioration des conditions de vie des populations locales et des nouvelles venues. Ils désignent surtout l’absence de suivi et d’un authentique débat sur la manière de freiner la «littoralisation» du pays et le redéploiement des populations vers les Hauts-Plateaux et le Grand Sud par le développement de centres urbains concurrentiels de ceux du Nord.
En théorie, nous disait hier un observateur, le bilan du CNRC sur la disparité des performances commerciales du Nord et du Sud devrait interpeller au plus vite et inciter à un «débat national sur le sujet». n