Anis Rahmani, directeur du groupe de presse Ennahar, est en détention provisoire à la maison d’arrêt de Koléa. Le juge d’instruction près le tribunal de Bir Mourad Raïs devant lequel il a été présenté, dans la nuit du jeudi à vendredi, a ordonné son incarcération à titre préventif en attendant un complément d’enquête.
Selon des informations recueillies par Reporters, Anis Rahmani est poursuivi pour une affaire liée à « l’acquisition d’indus avantages » et de « transfert illicite d’argent à l’étranger ». Ce journaliste de formation, passé d’El Khabar à la création de son journal en langue arabophone Ennahar, avant de fonder la chaîne de télévision du même nom, passe ainsi du petit écran, dont il en a fait un puissant et troublant instrument d’influence, au grand prétoire puisqu’il sera désormais davantage visible dans les tribunaux. Anis Rahmani, qui est un nom de plume, comme on dit dans le jargon journalistique, a été interpellé dans l’après-midi de mercredi par des « agents en civil » qui l’ont conduit à Bab Jdid, le siège de la section de recherche de la Gendarmerie nationale. Après plusieurs heures d’interrogatoire, selon le récit repris du communiqué du collectif de la chaîne Ennahar, Anis Rahmani a été présenté, jeudi soir, devant le juge d’instruction du tribunal de Bir Mourad Raïs. Pour la petite histoire, et afin de souligner combien ce patron de télévision est sujet à polémique, l’arrivée du fourgon cellulaire qui le transportait menottes aux mains au tribunal a provoqué, outre la présence nombreux de journalistes, l’affluence de dizaines de curieux. Sur place, il a eu droit à des « acclamations » selon le mot ironique d’un anonyme sur place, un accueil dont le spectacle est visible sur les réseaux sociaux. Durant la journée de jeudi, les médias du groupe Ennahar ont démenti quasiment toutes les informations concernant l’affaire Rahmani, faisant bloc derrière leur patron. « Les accusations évoquées par certains médias sont fausses », ont-ils répliqué, sans succès. Parmi les autres charges présumées retenues contre lui, « la diffamation, le chantage et la pression pour d’indus avantages ». D’autres informations ont révélé que le patron du groupe Ennahar a accumulé quelque 700 plaintes pour diffamation depuis la création de la chaîne Ennahar TV en 2012. La justice l’a condamné, tout récemment, dans deux affaires. L’une contre le général à la retraite Hocine Benhadid et l’autre contre Amar Brahmia, chef de délégation des athlètes algériens ayant participé, en 2016, aux jeux olympiques de Rio de Janeiro. Anis Rahmani, considéré comme « le bras médiatique » du régime de Bouteflika, s’est illustré pendant des années par ses attaques virulentes contre les opposants à Abdelaziz Bouteflika dans des registres qui, le moins qu’on puisse dire, devraient faire cas d’école en ce qui concerne le respect des règles journalistiques, l’ouverture du champ audiovisuel ayant partout généré des débordements qui font plus que jamais débat.