L’Organisation mondiale de la santé (OMS) dit redouter des bilans très élevés. L’agence onusienne affirme que vingt-trois millions de personnes sont « potentiellement exposées » aux conséquences de la catastrophe majeure, « dont environ cinq millions de personnes vulnérables ».

Par Lyes Sakhi
Le bilan du puissant séisme et sa réplique tout aussi dévastatrice qui ont frappé la Turquie et la Syrie, lundi 6 février, a atteint les 5000 morts. Il ne cesse d’augmenter, selon les observateurs sur place, mettant au défi les secours et l’aide humanitaire à apporter aux victimes et aux rescapés de cette catastrophe naturelle majeure.
Hier, mardi, l’aide internationale commençait à se déployer en Turquie. Les secouristes redoublaient d’efforts pour la recherche des rescapés, une véritable course contre la montre au moment où les intempéries rendent difficiles les interventions. Selon l’Organisation mondiale de la santé (OMS), vingt-trois millions de personnes sont « potentiellement exposées, dont environ cinq millions de personnes vulnérables ». L’OMS avait auparavant dit redouter « des bilans huit fois plus élevés que les nombres initiaux ».
En Turquie, un deuil national de sept jours a été décrété. Le décompte des morts s’établissait hier à 3.549, selon le président turc Recep Tayyip Erdogan, et le nombre de blessés à au moins 20.434, selon le vice-président Fuat Oktay. Le mauvais temps complique la tâche des secours et rend le sort des rescapés plus amer encore, grelottant sous des tentes ou autour de braseros improvisés, rapportent les agences de presse dont l’AFP. Profondément meurtrie, la région turque de Kahramanmaras (Sud-Est), difficile d’accès, est ensevelie sous la neige.
Selon le président turc qui a déclaré l’état d’urgence pour trois mois dans les dix provinces touchées par le séisme, 45 pays ont proposé leur aide. L’Algérie s’est mobilisée pour prêter main forte aux secouristes et aux équipes de recherche et d’aide humanitaire (lire article). L’Union européenne a mobilisé pour la Turquie 1.185 secouristes et 79 chiens de recherches auprès de 19 Etats membres dont la France, l’Allemagne ou la Grèce. Pour la Syrie, l’UE est en contact avec ses partenaires humanitaires sur place et finance des opérations d’aide.
Le président américain Joe Biden a promis à M. Erdogan « toute l’aide nécessaire, quelle qu’elle soit ». Deux détachements américains de 79 secouristes chacun se préparaient à se rendre sur place, selon la Maison Blanche. La Chine a annoncé mardi, selon un média d’Etat, l’envoi d’une aide de 5,9 millions de dollars, incluant des secouristes spécialisés en milieu urbain, des équipes médicales et du matériel d’urgence.

L’appel de Damas surtout entendu par l’Algérie et la Russie
En Syrie, pays ravagé par une guerre civile depuis 2011 et vers lequel l’aide humanitaire est rendue compliquée notamment pour des raisons géopolitiques et de l’isolement dans lequel se trouve aujourd’hui le régime de Damas, au moins 1.622 personnes sont mortes et 3.640 ont été blessées, selon les autorités syriennes et des secouristes dans les zones rebelles.
L’appel à l’aide internationale lancé par les autorités de Damas a été surtout entendu par l’Algérie et la Russie, qui a promis des équipes de secours « dans les prochaines heures », alors que selon l’armée, plus de 300 militaires russes sont déjà sur les lieux pour aider les secours. L’ONU a également réagi, mais souligné que l’aide fournie irait « à tous les Syriens sur tout le territoire ».
Le Croissant-Rouge syrien, qui opère dans les zones gouvernementales, a appelé l’UE à lever les sanctions contre Damas et demandé assistance à l’Agence américaine de développement (USAID), emboîtant le pas au chef de la diplomatie syrienne Fayçal Moqdad qui avait affirmé la veille que Damas est prêt à « faciliter » la fourniture d’aide internationale.
Le séisme a touché le point de passage de Bab al-Hawa, le seul pour la quasi-totalité de l’aide humanitaire aux zones rebelles en Syrie acheminée depuis la Turquie, selon l’ONU. Sur les lieux de la catastrophe, des centaines de Syriens effrayés ont passé la nuit dans les rues ou les parcs. Le bilan devrait « grimper considérablement car des centaines de personnes restent piégées sous les décombres », selon les Casques blancs (volontaires de la protection civile) dans les zones rebelles.
En zone gouvernementale, la province d’Alep concentre plus du quart des décès, selon les médias d’Etat. La ville, déjà dévastée par le conflit, a été durement frappée avec une cinquantaine de bâtiments effondrés et des sites historiques endommagés y compris la célèbre citadelle.

S’activer pour sauver des vies
De part et d’autre de la frontière turco-syrienne, on s’active pour tenter de sauver des vies. A Jandairis, côté syrien, un bébé vivant –une petite fille– a été sorti des décombres d’un immeuble. Le bébé était encore relié par le cordon ombilical à sa mère, morte comme tous les autres membres de la famille à ses côtés. A Hatay, côté turc, une enfant de sept ans a été extirpée des ruines sous les yeux de l’AFP, après plus de 20 heures de terreur. « Où est ma maman? », a-t-elle dit au secouriste qui la tenait dans les bras. Le footballeur ghanéen Christian Atsu, ancien de Chelsea et Newcastle qui avait rejoint en septembre le club turc de Haytayspor, a pu être sauvé à Hatay, selon l’ambassadrice du Ghana en Turquie.
A Sanliurfa, ville turque, les autorités ont ouvert des dortoirs pour les rescapés dans les gymnases, les collèges ou les mosquées. Mais nombre d’habitants ont préféré dormir dehors, par peur d’un autre sinistre. Le séisme, d’une magnitude de 7,8, est survenu lundi à 04H17 locales (01H17 GMT) dans le Sud-Est de la Turquie et a été ressenti jusqu’au Liban, à Chypre et dans le Nord de l’Irak. Il a été suivi de pas moins de 185 répliques dont l’une de 7,5 lundi à la mi-journée et une autre de 5,5 mardi avant l’aube. C’est le pire séisme en Turquie depuis celui du 17 août 1999 qui avait tué 17.000 personnes dont un millier à Istanbul.
Sources AFP et agences