Dans une déclaration à l’APS, le Professeur Messaoud Zitouni, chargé du suivi et de l’évaluation du plan national de lutte contre le cancer 2015/2019, a appelé à «ne pas baisser la garde dans la prise en charge du cancer, au risque de coûter ‘cher’ à la société durant les années à venir, notamment l’augmentation de la mortalité. Le chargé du suivi et de l’évaluation du plan national anti-cancer, qui s’inquiétait des conséquences de la pandémie du coronavirus sur les services hospitaliers, a insisté sur l’importance de poursuivre les efforts dans le cadre du plan national de lutte contre le cancer, notamment en ce qui concerne «la relance du programme national de dépistage et de diagnostic organisé du cancer du sein».

Le médecin spécialiste a insisté sur la lutte contre le cancer du sein, à l’occasion de la fin du mois d’octobre «rose», consacré par les Nations unies à la sensibilisation et à la lutte contre ce type de cancer «le plus répandu en Algérie qui enregistre 14 000 nouveaux cas, contre 50 000 à 55 000 cas enregistrés en 2019». En écho à son appel, le Directeur général des structures sanitaires au ministère de la Santé, de la Population et de la Réforme hospitalière, le professeur Lyes Rahal, a assuré que les activités des centres anti-cancer (CAC) ne se sont pas arrêtées en raison de la propagation de la pandémie du nouveau coronavirus, affirmant que «depuis l’apparition du virus en Algérie aucun service de ces centres n’a été dédié à la prise en charge de la Covid-19». M. Rahal a affirmé que «le cancer était et demeure parmi les priorités du secteur» qui veille à améliorer la qualité des services en faveur des patients et à les rapprocher des citoyens, à travers l’ouverture de plusieurs centres spécialisés dans le but d’assurer une plus large couverture à l’échelle nationale.
En ce qui concerne la prise en charge du cancer du sein, le professeur Zitouni a souligné que le programme national de dépistage et de diagnostic a montré «son efficacité» mais que l’évaluation de son application a montré plusieurs faiblesses liées essentiellement à la bureaucratie. «Bien que des progrès significatifs aient été enregistrés en matière d’amélioration de la prise en charge du cancer, en général, et du cancer du sein, en particulier, à travers notamment le lancement du Registre national et l’ouverture de plusieurs centres de traitement pour assurer une large couverture pour toutes les régions du pays en sus du renforcement des campagnes de formation et de sensibilisation, certains obstacles subsistent encore sur le terrain», a-t-il indiqué selon l’APS. Il s’agit de l’organisation de rendez-vous de radiothérapie et du retard enregistré dans le lancement de recherches et d’enquêtes scientifiques sur la propagation de cette maladie chez une tranche d’âge jeune allant de 35 à 49 ans, contrairement aux femmes européennes qui y sont exposées à l’âge de 55 ans et plus.

Des obstacles au traitement
Pour leur part, les spécialistes dans le domaine de la prise en charge et de la lutte contre le cancer ont exprimé à plusieurs reprises leur souhait de «trouver une solution au problème lié aux rendez-vous de chimiothérapie à travers le lancement par le ministère de la Santé d’une plateforme numérique pour l’organisation et la répartition des rendez-vous entre les différents centres de soins et ce en vue de désengorger les deux centres de lutte contre le cancer, à savoir Blida et le Centre Pierre-et-Marie-Curie (CPMC) d’Alger. Entre autres obstacles entravant un bon traitement, Il cite également le recours des malades au dépistage et aux analyses médicales à un stade avancé de la maladie, ce qui rend difficile la prise en charge de la maladie et la possibilité de baisser le taux de mortalité, outre le recours de certaines patientes aux thérapies traditionnelles, à l’instar de l’herboristerie, des pratiques contre lesquelles les oncologues mettent en garde.
Le Plan national de lutte contre le cancer a ciblé le cancer du sein en mettant en place un programme national de dépistage et de diagnostic précoces, en coopération avec un groupe d’experts et d’associations. Après deux ans de travail, ils sont parvenus à établir une feuille de route ciblant «5 régions pilotes, à savoir Tipasa, Laghouat, Biskra, Tlemcen et Constantine». Les Centres de Tlemcen et de Constantine ont coopéré avec la Caisse nationale des assurances sociales (Cnas) qui a lancé, depuis 2010, une opération de dépistage précoce au profit des femmes assurées et des ayants droit, dans ces régions à travers le diagnostic de la tumeur qui peut affecter le sein au moyen d’un appareil de mammographie. A cet égard, il a insisté sur «l’impératif pour chaque femme âgée de 40 ans et plus de subir des examens mammographiques tous les deux ans sans interruption jusqu’à 70 ou 75 ans pour prévenir le cancer du sein ou le prendre en charge tôt en cas de détection».
Pour le professeur Zitouni, le diagnostic et le dépistage précoces sans programme préétabli ni feuille de route, «outre, le fait qu’ils ne donnent pas de bons résultats, peuvent être dangereux pour la santé des femmes atteintes», et ce contrairement «au dépistage organisé qui a donné des résultats probants en évitant à la patiente l’ablation du sein». n