PAR INES DALI
Le temps d’aller vers un nouveau mode de gestion des collectivités locales est venu. C’est même devenu un impératif, la gestion actuelle au niveau central ayant montré ses limites. La décentralisation qui se dessine et qui se trouve être au centre de la révision des Codes communal et de wilaya est une mesure à laquelle aspirent les gestionnaires des collectivités locales et à laquelle n’ont eu de cesse de plaider de nombreux économistes et autres experts en la matière, en raison des nombreux avantages qu’elle présente. La décision sera, ainsi, décentralisée, ne restant plus aux mains de l’administration centrale.
La création prochaine d’une commission pour la révision des Codes communal et de wilaya pour renforcer la décentralisation et créer des ressources de financement pour les collectivités, une mesure annoncée samedi par le président de la République à l’ouverture des travaux de la réunion gouvernement – walis, est saluée du fait qu’elle répond à une requête exprimée depuis plusieurs années.
S’exprimant à ce sujet, Mahfoud Kaoubi, expert en questions géoéconomiques et financières, a appuyé la décision de décentralisation. «Il faut aller vers plus d’autonomie et de décentralisation dans la conception des plans de développement», a-t-il déclaré, hier, sur les ondes de la Radio nationale. C’est ce qui est prévu dans les prochaines réformes des Codes communal et de wilaya annoncées pour donner plus de prérogatives aux walis et autres responsables locaux. En fait, la décentralisation consiste en un transfert de décisions prises au niveau central vers les walis et, à un autre degré, aux présidents des assemblées populaires communales, en les dotant d’une autonomie plus ou moins grande et en leur affectant un budget propre.
«Cette notion de décentralisation a toujours été au cœur du développement local, du moins dans les textes (Code de la commune et de wilaya)», a indiqué l’expert, tout en relevant qu’en revanche, cela n’est pas visible sur le terrain. «Il y a un net décalage entre les textes et la réalité», a-t-il commenté.

«Donner du contenu» et «choisir les compétences»
Affirmant d’abord que «les potentialités existent pour une nouvelle vision», Mahfoud Kaoubi a tenu à noter qu’«il «faudra tout de même donner du contenu à cette décentralisation et changer les méthodes et les instruments de management et de gouvernance locale». Il faudra «surtout, ne pas reproduire les mêmes incohérences qui ont été derrière le gel de beaucoup d’initiatives, ne pas se tromper sur les profils de compétences pour mener à bien les réformes, avec obligation de résultats». Ceci pour que l’administration soit réellement «au service du développement», a-t-il dit.
C’est ainsi que l’expert évoque la «nécessité de valorisation des territoires», affirmant que la notion du territoire est au cœur des théories de développement. «Aujourd’hui, on ne parle plus de régions ou de localités, mais de territoires. Et qui dit territoire dit une autonomie en matière de mise en place de projets de développement économique et social», a-t-il. Il a développé en expliquant que «se réconcilier avec cette notion de territoire est un élément important, dans le cadre d’une unité nationale, mais avec plus de d’autonomie et plus de décentralisation pour la conception et la mise en œuvre des plans de développement» et en insistant qu’il faudra donner «du contenu par rapport aux stratégies de développement local et aux modèles de développement».
Amorcer une nouvelle ère de développement implique de nouvelles méthodes et instruments de gestion, mais aussi des profils de compétences en harmonie avec les programmes de développement, selon cet expert, qui estime que pour que le pays réussisse les réformes tous azimuts, «le choix des compétences et de l’excellence est important». C’est «un facteur indispensable et déterminant pour la réussite des différents projets de réformes qui ont été annoncés pour 2022 et 2023», a-t-il souligné.
La décentralisation tant attendue est à même de permettre une libération les initiatives au niveau local, en encourageant des programmes plus créatifs, plus innovateurs et plus sensibles aux besoins locaux. Elle peut également permettre aux citoyens de mieux contrôler les programmes publics au niveau local. C’est pourquoi la révision des Codes communal et de wilaya en vue de renforcer davantage la décentralisation et de créer des ressources de financement pour les collectivités, par la mise en place d’une commission est une mesure saluée.
Cette commission sera rapidement créée «par décret présidentiel ou exécutif», a déclaré avant-hier le président de la République, Abdelmadjid Tebboune, devant les walis, Evoquant la composante de cette commission, il a précisé qu’elle sera «placée sous l’autorité du ministère de l’Intérieur, des Collectivités locales et de l’Aménagement du territoire, et composée de représentants du Conseil de la nation, de l’Assemblée populaire nationale (APN), du ministère des Finances, ainsi que des représentants d’élus locaux».
La commission en question proposera «de nouveaux textes de loi appuyant davantage la décentralisation et en mesure de créer des richesses pour financer les collectivités locales», a-t-il soutenu, rappelant que sur un total de 1541 communes à l’échelle nationale, «plus de 1000 communes sont pauvres», d’où la nécessité de former les responsables communaux en matière de création de richesse. <