Par Feriel Nourine
Les saisons se suivent et se ressemblent en Algérie. A chaque retour d’hiver, les pluies se font désirer et la menace sur les ressources hydriques du pays se fait de plus en plus sentir.
Le stress hydrique s’est visiblement installé dans la durée à travers un déficit pluviométrique dont l’impact n’a d’égal que les restrictions appliquées aux programmes d’alimentation en eau potable dans plusieurs villes du pays dépendant des retenues d’eau pluviales. Les mêmes inquiétudes pèsent également sur le quotidien des agriculteurs et éleveurs confrontés, ces dernières années, à la sécheresse dans plusieurs wilayas.
Cette situation pousse les pouvoirs publics à se déployer en quête de solutions diversifiées dans la production de l’eau de sorte à affranchir le pays de sa dépendance exagérée des eaux pluviales. En ce sens, le président de la République n’a pas tardé, dès les premiers mois qui ont suivi son élection, à multiplier les instructions pour dégager des solutions d’urgence, notamment en matière d’AEP. Sur ce registre, c’est le dessalement de l’eau de mer qui s’est imposé d’emblée en voie à suivre, sachant que le territoire national dispose d’une bande côtière où se concentrent 95% de la population.
C’est pourquoi, plusieurs projets de stations de dessalement ont déjà été lancés dans certaines wilayas et leur mise en activité a permis d’atténuer l’impact du manque de pluviométrie sur la consommation d’eau par les ménages. L’été dernier, alors qu’il se trouvait à Oran dans le cadre d’une visite de travail et d’inspection, M. Tebboune a de nouveau mis en avant les avantages offerts par ce type d’infrastructures.
«La politique de dessalement de l’eau de mer est la plus sûre pour alimenter les citoyens en eau potable», avait-il fait remarquer lorsqu’il procédait à la pose de la première pierre du projet de réalisation d’une station de dessalement de l’eau de mer à Cap Blanc, dans la commune d’Aïn El Kerma. Il a rappelé que le groupe Sonatrach a acquis les techniques et les technologies permettant la construction de stations de dessalement d’eau de mer. «Aujourd’hui, nous sommes en mesure de réaliser ces stations avec nos propres moyens», a-t-il indiqué, estimant que «la conjugaison des efforts permettra de libérer l’Algérie des problèmes d’approvisionnement en eau potable».
De son côté, le ministre de l’Energie et des Mines, Mohamed Arkab, avait annoncé, l’année dernière, un plan de réalisation d’une station de dessalement de l’eau de mer dans chaque wilaya côtière. En attendant, Algerian Energy Company (AEC) relevant du groupe Sonatrach est chargé, depuis plusieurs mois, du projet de 5 stations dotées chacune d’une capacité de production de 300 000 m3 d’eau/jour.
Le recours à ces infrastructures est d’ailleurs bien accueilli par les spécialistes du secteur. A l’exemple de Brahim Mouhouche, Professeur à l’Ecole nationale supérieure d’agronomie (ENSA). Il appelle à multiplier les solutions afin de mobiliser le plus de ressources en eau, citant à ce propos le dessalement de l’eau de mer qui «produit actuellement plus de 2,5 millions m3 d’eau/jour, soit 30% de notre consommation en alimentation en eau potable», estime-t-il.
Cependant, d’autres ressources hydriques existent qu’il faut savoir exploiter à leur juste valeur de palliatif aux eaux pluviales, souligne-t-il. «Il faut ratisser large et capter toutes les ressources hydriques existantes», a-t-il recommandé il y a quelques semaines, alors que les signes d’une année avare en pluies commençaient à se dessiner.
«Il faut ratisser large», a-t-il recommandé, soulignant que les ressources conventionnelles étaient à la limite de leur utilisation. Parmi les pistes, il citera la récupération des eaux de pluies dans les habitations et autres structures. M. Mouhouche plaide, en outre, pour une exploitation «plus efficiente des eaux usées», d’autant que le pays possède «un potentiel énorme à ce niveau, soit 1,5 milliard de m3 de rejet qui peuvent être réutilisés».
Actuellement, «le recyclage des eaux usées ainsi que les eaux de drainage très importantes n’est exploité qu’à hauteur de 5 à 10% du potentiel existant», ajoutera-t-il. Ce qui est «négligeable», a-t-il regretté. Brahim Mouhouche ne manque pas d’insister sur ce type de ressources hydriques non conventionnelles, ceci d’autant que pour ce mois de décembre, la moyenne du taux de remplissage des barrages en Algérie n’est que de 30 à 33%, a-t-il jugé.
Côté météorologie, la période hivernale, qui a débuté il y a quelques petits jours, sera marquée par des précipitations normales à au-dessus de la normale, sur l’ensemble du territoire national, selon les prévisions de l’Office national de la météorologie (ONM).
«Les prévisions des températures seront normales à au-dessus de la normale sur toute l’Algérie avec 90% de probabilité et l’on s’attend alors à une saison plus chaude que la normale climatique habituellement observée», durant la saison hivernale allant de décembre 2022 à février 2023, a indiqué à l’APS, Salah Sahabi-Abed, Directeur de l’Exploitation météorologique et de la climatologie à l’ONM.
Pour ce qui est des prévisions des précipitations, il a fait savoir qu’elles seront durant la saison hivernale «normales à au-dessus de la normale avec 80% de chance, notamment sur tout le Nord de l’Algérie, du littoral jusqu’à la région des Hauts-Plateaux», alors que pour «les autres zones, les précipitations totales au cours de la même période (décembre, janvier et février) devraient être normales à inférieures à la normale». «On s’attend alors à une saison hivernale humide au nord du pays», a relevé M. Sahabi, en se basant sur les prévisions saisonnières consensuelles pour l’hiver boréal (décembre-janvier-février 2022/2023) au-dessus de la région arabe, produites lors de la 10e session du Forum arabe sur les prévisions climatiques (ArabCOF-10) en coordination avec la 18e session du Forum sur les prévisions climatiques en Afrique du Nord (Presanord-18) et la 7e session du Forum sur les prévisions climatiques du Conseil de coopération du Golfe (GCCCOF-7). <