Les pays gros consommateurs de pétrole attendent que la 31e réunion ministérielle de l’Opep+, prévue aujourd’hui, se solde par une décision d’augmenter des quotas livrés par l’Alliance. En ce sens, ils comptent, entre autres, sur l’expiration, en ce mois d’août, de l’accord de réduction conclu, en avril 2020, entre l’Organisation des pays exportateurs de pétrole (Opep) et ses partenaires, regroupés au sein de l’Opep+.
Par Feriel Nourine
Sauf que 13 pays membres de l’Opep et leurs 10 alliés non-membres ne semblent nullement disposés à mettre sur le marché les quantités d’or noir que demandent les consommateurs, notamment les Etats-Unis et les pays de l’Union européenne. L’alliance pourrait, certes, opérer une petite augmentation, mais celle-ci serait très loin du quota qui remettrait son offre au niveau d’avant l’entrée en vigueur de son accord, le 1er mai 2020, soit quelque 4 millions de barils par rapport à ce qui est produit actuellement.
Pour obtenir une hausse nettement supérieure au supplément mensuel de 648 000 barils par jour dégagés pour août courant, les Etats-Unis attendent que l’Arabie saoudite use de son statut de premier exportateur mondial de brut et chef de file du cartel, durant la réunion d’aujourd’hui, et fasse les sollicitations exprimées dans cette optique par le président des Etats-Unis, Joe Biden, lors de sa visite dans le Royaume, en juillet dernier. Une visite qui a vu le dossier de l’or noir et de la sécurité énergétique se classer parmi les priorités du locataire de la Maison-Blanche lors de ses discussions avec le prince héritier, Mohammed ben Salmane.
Le président américain a tenté de nouvelles manœuvres pour impliquer l’Opep dans les plans américano-européens visant à obtenir plus de pétrole et arriver à la baisse des prix souhaitée par les importateurs. Dans le même objectif, le président français, Emmanuel Macron, s’est employé à faire pression sur le président des Emirats arabes unis, Mohamed ben Zayed al-Nahyane, qu’il a reçu à Paris le 18 juillet, c’est-à-dire durant la même période de la tournée de Biden au Moyen-Orient.
Cependant, les deux grosses pointures de l’Opep n’ont, à aucun moment, affiché des prédispositions à répondre favorablement aux demandes américaine et française. Riyad et Abu Dhabi ont, au contraire, réaffirmé leurs incapacités à extraire plus de pétrole.
De plus, les responsables des deux pays ne cessent de répéter que s’il devait y avoir un engagement de leur part, celui-ci aura lieu dans le cadre de l’Opep+. Un rappel en ce sens a été fait jeudi dernier par le ministre émirati de l’Energie et des Infrastructures Suhail Al Mazrouei, qui a réitéré l’engagement de son pays envers l’accord Opep+ et son mécanisme actuel d’ajustement de la production mensuelle. «Les Emirats arabes unis à la valeur qu’apporte l’Opep+ au marché mondial du pétrole, et il n’y a pas d’accord pour augmenter unilatéralement la production en dehors de l’accord Opep+», a déclaré M. Al Mazrouei à l’agence de presse émiratie.
Pression occidentale
Avant le responsable émirati, le ministre saoudien des Affaires étrangères, Adel Al-Jubeir, s’était exprimé en marge de la visite de Joe Biden dans son pays, mettant en avant le rôle de l’Opep+ en tant qu’instance de référence pour les pays qui la composent. «Nous avons des liens avec d’autres pays dans la cadre de l’Opep+», a indiqué Al-Jubeir. «L’Opep+ effectue convenablement sa mission et assure le suivi de l’évolution du marché. C’est à elle de décider s’il y a augmentation de la production», avait-t-il souligné, en réponse aux questions des journalistes qui voulaient savoir si Ryad allait répondre favorablement aux sollicitations du Président américain.
En c’est dans le même ordre d’idées et d’engagement que s’est exprimé le tout nouveau Secrétaire général de l’Opep, Haitham al-Ghais. Dans une interview
parue sur le journal koweïtien Al rai lundi, c’est-à-dire le jour sa prise de fonction, M. Al-Ghais relève que le marché pétrolier est actuellement «très volatil et turbulent», ajoutant, dans l’interview, que «l’Opep ne contrôle pas les prix du pétrole, mais pratique ce qu’on appelle régler les marchés en termes d’offre et de demande». Le même responsable a, par ailleurs, à son tour soutenu que la hausse des prix n’était pas liée seulement à la guerre en Ukraine, mais à un processus dont les conséquences avaient commencé bien avant que cette guerre ne soit déclenchée.
«Toutes les données confirment que les prix ont commencé à augmenter progressivement et de manière cumulative, et avant le déclenchement des développements russo-ukrainiens, en raison de la perception dominante sur les marchés d’une pénurie de capacité de production inutilisée, qui s’est confinée à quelques pays limités», a-t-il déclaré, avant d’ajouter que les prix pourraient poursuivre leur tendance haussière en raison d’investissements insuffisants dans la nouvelle production.
Dans le cas de l’Opep, la production de l’Opep aurait augmenté de 310 000 barils par jour de plus en juillet pour combler les lacunes de la réduction de la production au Nigeria et de la force majeure en Libye, qui a depuis été levée, selon une récente enquête de Reuters.
Au total, ce sont 28,98 millions de bpj qui ont été produits le mois dernier, indique l’agence britannique, précisant que les membres de l’organisation ont atteint 60% de l’accord d’augmentation de la production conclu dans le cadre de l’Opep+.
La même source relève également que près de 240 000 bpj de cette augmentation provenaient des 10 membres de l’Opep (Libye, Nigeria et Venezuela étant exemptés), dont 150 000 bpj sont produits par l’Arabie saoudite. Les Emirats arabes unis, le Koweït et l’Irak ont également augmenté leur production, fait savoir encore l’enquête.
Reste que les 310 000 bpj venus s’ajouter à la production de juillet restent en deçà des 412 000 bpj annoncés dans le cadre de la production globale de l’alliance. n