Le front de la contestation appelant au retrait des deux projets de loi portant respectivement sur l’exercice du droit syndical et la prévention et au règlement des conflits collectifs du travail continue à s’élargir au sein des organisations syndicales qui ont répondu à l’appel lancé, il y a près d’une quinzaine de jours par les quatorze syndicats réunis dans la Confédération des syndicats algériens (CSA).
Par Sihem Bounabi
En effet dans un communiqué daté du 26 janvier, une trentaine de syndicats autonomes des différents secteurs de la fonction publique, dont les syndicats du CSA, ont exprimé leur rejet de ces deux projets de loi et réitéré leur appel à l’intervention du président de la République Abdelmadjid Tebboune pour le retrait de ces lois qui «portent atteinte aux acquis syndicaux, au droit de grève et sont en contradiction avec la Constitution, les accords internationaux ratifiés par l’Algérie et les orientation du chef de l’Etat». Ainsi, la trentaine de syndicats autonomes ont exprimé d’une seule voix leur position du rejet des deux projets de loi et «exigent leur retrait pour leur violation grave et sans précédent des droits et libertés syndicaux, de la Constitution et des conventions internationales», souligne le communiqué. Ils ont également appelé à associer et à impliquer les syndicats et les partenaires sociaux dans un esprit de dialogue et de concertation pour débattre et enrichir les deux projets de loi d’autant plus que les syndicats sont les premiers concernés par l’impact de l’application de ces lois sur le terrain. Les signataires ont tenu également à mettre en exergue la responsabilité historique des parlementaires face à cette situation en soulignant que «nous tenons les parlementaires pleinement responsables s’ils adoptent les projets de loi de manière qui détruit les libertés syndicales et le travail syndical dans son ensemble».
Appel à mobilisation
De même un appel de mobilisation générale a été lancé à la base pour se préparer à toutes les actions qui seraient mises en place dans le cadre de cette lutte pour la préservation des acquis et des libertés syndicaux. Les membres de la CSA et la quinzaine des syndicats qui les ont rejoints ont conclu le communiqué en appelant «tous les syndicats à assumer pleinement leurs responsabilités face aux défis actuels pour préserver l’avenir des libertés syndicales et du droit de grève», ajoutant que «nous appelons également tous les travailleurs et employés de tous les secteurs à se mobiliser et à se préparer à toutes les actions de lutte pour défendre leurs droits légitimes».
Un appel qui avait déjà eu écho depuis la semaine dernière par les sections locales de l’Union générale des travailleurs algériens (UGTA) poussant la centrale de l’UGTA a exprimé de nouveau, avant-hier, sa position officielle de rejet des deux projets de lois en diapason avec celle de la base qui a marqué par sa forte mobilisation la commémoration de l’assassinat d’Abdelhak Benhamouda.
Il est à noter que parmi les premières sections syndicales de l’UGTA à répondre à l’alerte lancée par le CSA celle de la wilaya d’Annaba avec l’apport d’un important soutien de près de 500 sections syndicales affiliées à l’UGTA, dont celles de Sider El Hadjar, de l’entreprise portuaire d’Annaba, de Fertial et Asmidal, qui ont exigé le retrait d’articles jugés «attentatoires aux acquis syndicaux», «anticonstitutionnels» et «contradictoires avec les conventions internationales ratifiées par l’Algérie». Ils dénoncent également le fait que les organisations syndicales et les partenaires sociaux aient été exclus de la préparation du projet de loi, malgré les engagements des autorités. Il est à noter qu’au-delà de l’atteinte au droit de grève, les organisations syndicales autonomes dénoncent également d’autres articles de loi qui entravent et «étranglent l’activité syndicale», notamment ceux relatifs la représentativité, à la création de syndicats et à la dissolution des syndicats qui vont à «l’encontre des droits et libertés syndicaux et à l’encontre des orientations du président de la République». Dans l’attente d’une réponse du président de la République et l’ouverture de véritables discussion autour de l’élaboration de cette lois cadre sur le droit de l’exercice syndicale, les deux projets de loi sont actuellement à l’étude au niveau de la commission de la santé, des affaires sociales, du travail et de la formation professionnelle. Face à la grogne des syndicats, les membres de ladite commission ont rencontré tout au long de la semaine dernière des organisations syndicales, dont des membres du CSA qui ont expliqué leur position de rejet de ces deux lois et ont insisté sur la nécessité de leur retrait afin d’ouvrir avec les partenaires sociaux un véritable travail basé sur le dialogue et la concertation.
En attendant, les syndicats poursuivent la mobilisation et multiplient les rencontres pour unifier les rangs et se concerter pour voir les actions à amener dans le cas où le gouvernement maintient sa position et fait passer au forceps ces deux projets de loi. <