Les soixante ans d’indépendance ont été émaillés de grandes réalisations qui ont permis de sortir la population, à l’Indépendance, de la situation de grande pauvreté, d’analphabétisme et d’améliorer sensiblement les conditions de vie. En ce sens, les attentes des Algériens, en ce 5 Juillet, sont fortes, amélioration des revenus, de la qualité de vie et plein emploi pour les jeunes.
En six décennies d’Indépendance, l’Algérie enregistre un grand nombre de réalisations économiques qui font d’elle, actuellement, une puissance économique parmi les premières en Afrique. Les indicateurs qui montrent, en particulier, cette montée en puissance est son PIB, son PIB par habitant, ses progrès en matière d’accès de la population à l’électricité, à l’eau et au gaz, le taux d’occupation par logement, les progrès en termes d’alphabétisme, de scolarisation, de nombre d’étudiants et de diplômés universitaires. Avec un PIB par habitant entre 160 et 170 milliards de dollars, selon diverses sources, l’Algérie se classe à la quatrième place en Afrique après le Nigeria, l’Afrique du Sud et l’Egypte. Avec son revenu par habitant, qui se situe entre 3 000 et 4 000 dollars, elle se place parmi les dix premiers en Afrique. Elle est dépassée par des pays qui comptent peu d’habitants, comme les Seychelles, l’île Maurice, ou qui ont des richesses minières et peu d’habitants, comme le Botswana, la Namibie ; des richesses pétrolières et peu d’habitants, à l’exemple de la Libye.
Il faut noter pour mesurer les progrès que l’Algérie à l’Indépendance était un pays très pauvre avec un PIB de 2 milliards de dollars et un revenu par habitant de plus de 100 dollars. L’une des meilleures illustrations de ces énormes progrès est l’espérance de vie qui était de 23 ans à l’Indépendance, selon certaines sources, et qui est passée à 76 ans. La population était majoritairement analphabète, 80% sans instruction, actuellement, le nombre d’analphabètes est de 7,94%. Ces résultats ont été obtenus grâce aux gros efforts dans la scolarisation et dans la lutte contre l’analphabétisme menés depuis l’Indépendance. Le taux de scolarisation est de 98%. Même résultats en hausse pour le taux d’électrification et de raccordement à l’eau potable qui est de 98%, d’accès au gaz 57%. Ce qui est l’un des meilleurs taux dans le monde. Ces performances font que l’Algérie a atteint les objectifs du millénaire en termes d’accès à l’école, à l’électricité, à l’eau potable et que ces indices se rapprochent de ceux des pays émergents. L’université et la recherche reflètent ces énormes progrès, de 500 étudiants en 1962, l’Algérie compte 1,6 million d’étudiants. Depuis l’Indépendance, l’Algérie a formé 5,6 millions de diplômés universitaires. En 1962, elle comptait 298 enseignants chercheurs, elle en recense aujourd’hui 65 000 et 1 564 laboratoires de recherche. Le taux d’occupation par logement, actuellement, est de moins de 5.
Tous ces résultats ont été obtenus grâce aux importants budgets affectés à l’éducation, la santé, les infrastructures, particulièrement durant les années 1970, poursuivies pendant les années 1980 et 2000 par le biais de plans quadriennaux ou quinquennats de développement. Les dépenses ont porté notamment sur le développement des réseaux routiers et autoroutiers et de voies ferrées, l’infrastructure portuaire et aéroportuaire. L’Algérie développe également le métro à Alger et dispose de tramways à Alger, Oran, Constantine, Ouargla, Sidi Bel Abbès et bientôt à Mostaganem.
Dans le domaine de l’économie numérique, l’Algérie compte 26 millions d’internautes, 10 millions d’utilisateurs de cartes de paiement et 200 webs marchands sur une population de plus de 40 millions d’habitants. Ce qui suscite beaucoup d’espoir.
La diversification de l’économie, l’un des principaux échecs
Tout Algérien devrait se féliciter des progrès réalisés au bénéfice de la population. Mais pour atteindre ses ambitions de devenir une grande puissance régionale et de rejoindre le rang des grands pays émergents, l’Algérie devrait tirer des leçons de ses échecs durant les différentes phases de développement depuis l’Indépendance. De la phase socialiste qui a connu l’industrialisation du pays et la nationalisation des hydrocarbures, en 1971, sans laquelle l’Algérie n’aurait jamais eu les revenus nécessaires pour réaliser son développement mais aussi de gros problèmes de gestion des entreprises et une marginalisation du secteur agricole en termes d’investissement.
Dans les années 1980, l’orientation économique est vivement critiquée. Période sous le règne de Boumediène, où l’Algérie utilisait ses revenus pétroliers pour investir et consommer. Avec la crise économique en 1986, suite à la chute des prix du baril, l’Algérie entre à partir de cette période dans le tunnel de l’endettement extérieur avec une situation de cessation de paiement, en 1993, qui la contraint à rééchelonner sa dette extérieure et appliquer un plan d’ajustement douloureux, qui a entraîné le licenciement ou la mise en retraite de 400 000 travailleurs.
A partir de 1998 apparaît le bout de la sortie du tunnel de l’endettement. Aït Laoussine, ex-ministre de l’Energie, observait que la nationalisation a permis certes de récupérer la souveraineté sur nos richesses pétrolières et gazières, de dégager des revenus pour le développement du pays, mais n’a guère réalisé la diversification de notre économie nationale en cinquante ans d’efforts de développement.
C’est l’un des principaux échecs des politiques de développement menées depuis l’Indépendance. Durant les années 2000, période caractérisée par l’aisance financière, de grandes réalisations économiques sont enregistrées, reconnaissons-le, comme le remboursement anticipé de la dette qui a permis, aujourd’hui, à l’Algérie de compter une dette extérieure très faible. Il ne faut pas oublier que l’une des raisons de cette aisance financière est l’effort du secteur des hydrocarbures : la ruée des compagnies étrangères dans les années 1990 avec comme fruit de nombreuses découvertes de pétrole et de gaz et la mobilisation de financements américains et japonais destinés à la réhabilitation des gros complexes de liquéfaction d’Arzew. Tout cela a conduit, dans les années 2000, à une croissance de la production d’hydrocarbures et une augmentation des revenus pétroliers à la faveur de la hausse des prix du pétrole prolongée par la multiplication des contrats avec les compagnies étrangères à partir de 2005.
Le management des projets et la maîtrise des dépenses, «talons d’Achille»
Les années 2000 ont vu l’investissement de gros montants dans la modernisation des infrastructures, ce qui a permis de renforcer sensiblement la base logistique du pays. Mais l’un des signes des limites de cet effort, une autoroute est-ouest guère terminée avec une énorme réévaluation de son coût, une rocade nord en termes de voie ferrée dont les travaux ont été lancés depuis près de 20 ans et qui ne sont pas achevés dans plusieurs tronçons. Cette rocade devait relier Annaba à Tlemcen avec dédoublement des voies et électrification permettant à des trains de rouler à une vitesse de 160 à 200 km/heure. Tout cela n’a pas été entièrement réalisé en raison de l’insuffisance de management des projets : problèmes dans les études, des expropriations, de paiement des situations de travaux, manque de suivi au plus haut niveau de ces projets.
Le procès de l’autoroute est-ouest a montré que la corruption n’est pas étrangère à ces surcoûts. Les années 2000 ont également connu une augmentation exponentielle des dépenses publiques avec une proportion importante vers des projets peu rentables où à mauvaise qualité de réalisation. Les réformes, des subventions, fiscales, du système de paiement budgétaire, de la fiscalité locale, qui devaient équilibrer le budget et rationaliser les investissements n’ont pas été mises en œuvre.
Faible intégration de l’industrie nationale
Par ailleurs, n’oublions pas la faible intégration de l’industrie nationale. De grands projets qui devaient accroître l’intégration de l’industrie nationale ne sont pas encore lancés ou ne sont pas encore achevés, grands projets dans la pétrochimie, usine d’acier plat, usine d’aciers spéciaux, usines agro-alimentaires destinées à la transformation de produits agricoles, usines de sous-traitance dans l’automobile, la mécanique, l’électronique, l’électroménager. Là aussi, on peut observer un manque de suivi des autorités dans ce domaine.
Quant aux perspectives de l’économie algérienne, elles sont toujours favorables à atteindre les objectifs précités, pour peu qu’un bilan critique des politiques de développement soit mené en toute objectivité et que les leçons des échecs passés soient tirées en faisant appel aux richesses humaines dont dispose l’Algérie, ici ou à l’étranger, pour réaliser ce bond dans le développement.
Le meilleur message d’espoir à la jeunesse algérienne est celui lancé par le spécialiste Ali Kefaifi : l’Algérie dispose de richesses minières parmi les plus importantes au monde en minerai de fer, en cuivre, en or, en terres rares. Leur particularité est qu’elles se situent en surface. Elles suscitent de l’espoir, a-t-il ajouté, pour les générations futures. Encore faut-il que ce potentiel, parce qu’il s’agit là encore de potentiel, soit confirmé avec le recours à l’expertise locale et internationale.