Des bureaux de change privés seront ouverts courant 2023. L’annonce a été faite par le gouverneur de la Banque d’Algérie Salah Eddine Taleb. Dans une déclaration à la presse, à sa sortie du bureau de la Commission des finances et du budget de l’Assemblée populaire nationale (APN), où il a été reçu, dimanche, pour débattre du projet de loi relatif à la monnaie et au crédit, Salah Eddine Taleb a indiqué que l’activité de change prendra une autre dimension à travers son ouverture à d’autres opérateurs autres que bancaires.
Par Hakim Ould Mohamed
C’est d’ailleurs l’une des réformes majeures apportées à la loi sur la monnaie et le crédit, version octobre 2017. Le projet de nouvelle loi, actuellement en discussion au niveau de la Commission des finances et du budget de l’Assemblée, a été élaboré, rappelons-le, afin de projeter le système financier et bancaire sur de nouvelles perspectives, en introduisant de nouveaux acteurs spécialisés dans les activités et services numériques, islamiques et de change. En effet, dans ses articles 63 et 89, le projet de nouvelle loi sur la monnaie et le crédit propose une réorganisation de la composante du Conseil d’administration de la Banque d’Algérie et du Conseil de la monnaie et du crédit, à travers l’élargissement de sa composante et des prérogatives du Conseil de la monnaie et du crédit, pour lui permettre d’accompagner les mutations de l’écosystème bancaire. Ses prérogatives sont élargies à l’agrément des banques d’investissement, des banques numériques, des prestataires des services de paiement et des intermédiaires indépendants. Il sera autorisé également à ouvrir des bureaux de change. Le gouverneur de la banque centrale a souligné à l’issue de sa rencontre avec les membres de la Commission des finances et du budget de l’APN que l’ouverture des bureaux de change ne souffre d’aucun écueil pour peu que la nouvelle loi sur la monnaie et le crédit soit validée. L’ouverture de bureaux de change privés n’est pas une proposition sortie de nulle part, mais maintes fois suggérée dans le cadre d’une lutte contre le marché parallèle des monnaies plusieurs fois remises aux calendes grecques. Les plus hautes autorités du pays semblent se rendre à l’évidence qu’une réforme du paysage bancaire et financier ne pouvait se faire sans s’attaquer de front au marché de change parallèle. Cette situation, reflétée depuis toujours par l’existence de deux cotations du dinar, une cotation officielle et une cotation informelle en l’occurrence, avec, au tableau, un écart significatif entre les deux taux, ne pouvait pas exister durablement.
Ce n’est pas bon pour l’image du pays. Ce pourquoi, la lutte contre les transactions de change parallèle était une nécessité à la fois d’ordre économique et sécuritaire. Le Fonds monétaire international (FMI) avait maintes fois appelé à mettre fin à ce marché de change parallèle, estimant que «le taux de change effectif réel du dinar doit être progressivement rapproché de sa valeur d’équilibre, et des mesures doivent être prises pour réduire le marché des changes parallèle». Pour le FMI, «l’existence du marché parallèle complique la gestion macroéconomique car elle alimente les anticipations inflationnistes, fausse la formation des prix et affaiblit les canaux de transmission de la politique monétaire». L’institution de Bretton Woods avait relevé dans l’une de ses dernières analyses que le marché des changes parallèle «semble gagner en ampleur et en sophistication», dont la prime appliquée s’élèverait à environ 50 % du taux de change officiel.
Du point de vue du FMI, l’ajustement progressif du taux de change officiel, le relèvement des plafonds indicatifs des montants de devises que les voyageurs peuvent emporter et l’assouplissement des restrictions aux importations pourraient réduire l’ampleur du marché parallèle, mais ne suffiraient pas à l’éliminer. L’unification des deux marchés ne sera possible qu’en libéralisant progressivement les transactions en capital, une mesure qui ne pourra être envisagée qu’une fois les conditions macroéconomiques devenues plus favorables. <