Par Hakim Ould Mohamed
Malgré la rechute des cours du brut de la semaine dernière, les banquiers américains restent confiants dans la trajectoire haussière des prix du pétrole. Dans une note prospective, publiée hier, la prestigieuse banque d’affaires américaine Goldman Sachs prévoit, en effet, que les cours du pétrole brut pourraient atteindre 100 dollars en 2023, la croissance de la demande dépassant celle de l’offre. «L’offre est insuffisante face à une forte demande», a déclaré Damien Courvalin, responsable de la recherche énergétique à la banque d’investissement, cité par Bloomberg. «Les prix du pétrole doivent être plus élevés pour surmonter le coût plus élevé du capital pour financer les projets», estime l’expert de Goldman Sachs.
Malgré cela, les prévisions de prix actuelles de Goldman Sachs pour le brut Brent pour 2022 et 2023 sont de 85 dollars le baril. Les risques à la hausse pour les prix à trois chiffres comprennent l’inflation des coûts pour les sociétés de forage et un éventuel déficit d’approvisionnement. La réduction de l’accès au financement pour les nouveaux projets pétroliers et gaziers est, également, un risque de taille, étant donné que les banquiers se concentrent désormais sur les industries et les projets moins pollueurs. Selon les analystes de la banque américaine, la récente baisse des prix du pétrole, alimentée par les craintes concernant l’évolution de la situation sanitaire au lendemain de la découverte du variant Omicron, était une réaction excessive. Damien Courvalin a noté que cette réaction pourrait entraîner une perte de demande équivalente de 5 millions de bpj au cours des trois prochains mois. Pendant ce temps, la demande pour les produits pétroliers, des carburants aux plastiques, est en forte reprise, a également noté Damien Courvalin. La consommation devrait battre des records en 2022 et 2023 alors que les dépenses gouvernementales pour la reprise économique et la transition énergétique continuent de soutenir la demande. Goldman Sachs est devenue la deuxième banque à maintenir ce mois-ci sa position haussière sur le pétrole malgré la récente baisse des cours, alimentée, essentiellement, par des facteurs conjoncturels liés aux craintes autour de l’Omicron.
Plus tôt ce mois de décembre, JP Morgan a balayé d’un revers de la main les craintes suscitées par l’Omicron, soulignant, dans une analyse, que 2022 verra la fin de la pandémie et que les prix du pétrole pourraient atteindre 125 dollars le baril l’année prochaine et 150 dollars le baril en 2023. Pour étayer ses pronostics, la banque américaine d’investissement a cité la capacité de réserve limitée de l’Opep qui, à son tour, limiterait sa capacité à réagir à une demande plus forte en stimulant la production et «un cycle économique plus dynamique». Ce sont là les trois facteurs structurels plaidant en faveur d’une hausse des cours l’an prochain et en 2023, selon JP Morgan. «Bien que nous voyions un potentiel clair pour un cycle économique plus dynamique, l’environnement est également chargé de courants contraires. Nous sommes convaincus que l’expansion économique se poursuivra jusqu’en 2022, mais sa force sera probablement déterminée par la réponse monétaire à l’inflation, la suite à donner au rééquilibrage de l’économie chinoise par les décideurs politiques de ce pays et le rythme de la transition d’une pandémie à une maladie endémique», ont noté les analystes de JP Morgan.
C’est dire que face aux facteurs conjoncturels qui font chuter les cours du brut, le Brent baissant à moins de 73 dollars le baril et le WTI à un peu plus de 70 dollars, d’autres facteurs structurels plaident, en revanche, en faveur d’une hausse des prix sur les deux prochaines années. Bien évidemment, ces prévisions restent tributaires d’une géopolitique stable et une cohésion des rangs au sein de l’Opep et de l’Opep+, lesquelles tentent de rééquilibrer le marché à coups de mesures relatives au niveau de leur production cumulée.