Le Conseil constitutionnel appelle les candidats à l’élection présidentielle du 12 décembre à établir leurs comptes de campagne. Dans un communiqué rendu public par l’institution, il est indiqué que « les candidats sont tenus d’établir un compte de campagne électorale, retraçant selon leur origine et leur nature toutes les recettes perçues et les dépenses effectuées, à déposer auprès du Conseil constitutionnel ». S’appuyant sur les dispositions de l’article 196 de la loi organique portant régime électoral, le Conseil constitutionnel précise que « le rapport du compte de campagne électorale doit porter le sceau et la signature d’un expert-comptable ou d’un commissaire aux comptes agréé et retracer, selon leur origine et leur nature, les recettes dûment justifiées ainsi que les dépenses appuyées de pièces justificatives ». Aussi, et selon les dispositions de l’article 56 du règlement fixant les règles de fonctionnement du Conseil constitutionnel, le compte en question « peut être déposé par toute personne en possession d’une délégation légale du candidat concerné auprès du greffe du Conseil constitutionnel dans un délai n’excédant pas le 18 mars 2020 ». Il faut dire que l’identification du détail des comptes de campagne sert non seulement à vérifier la conformité à la loi des dépenses des candidats, mais également à rembourser les frais pour ceux qui ont obtenu plus de 10% des suffrages exprimées. C’est le cas de trois candidats. Abdelmadjid Tebboune, qui a obtenu 4 947 523 voix soit 58,13%, Bengrina avec 1 477 836 soit 17,37% et Ali Benflis avec un score de 897 831 soit 10,55%. S’agissant des deux derniers, en l’occurrence Mihoubi crédité de 619.225 soit 7,28% et de Belaïd ayant obtenu 568 000 soit 6,67%, ils n’auront pas droit au remboursement des frais de campagne. Le Conseil constitutionnel qui exige l’origine des fonds aura-t-il des réponses satisfaisantes ? Rien n’est moins sûr tant la question du financement des campagnes électorales en Algérie a, de tout temps, été une question tabou. Aucun candidat pour une quelconque élection qu’elle soit locale, législative ou présidentielle n’a eu à fournir des explications probantes à ce propos. Tous les financements des campagnes électorales se faisaient dans l’opacité. Et ce n’est que lors du procès, début décembre dernier des hommes d’affaires et de hauts dirigeants du pays que le grand public a pris connaissance des sommes colossales ayant servi dans le «financement occulte de la campagne électorale» du 5e mandat avorté de Bouteflika. Les sommes récupérées par les services de sécurité donnent le tournis. Pas moins de 7 milliards de dinars et plus d’une vingtaine de bons de caisse anonymes aux montants hallucinants ont été saisis, alors qu’un montant de 600 millions de dinars, dont la moitié a été dépensée, était versé sur un compte domicilié à l’agence CPA de Hydra, dédié à la campagne électorale du 5e mandat et géré par un trésorier, actuellement en détention. Cette manne financière a été mobilisée par des hommes d’affaires proches du Président déchu, notamment son frère, qui ont érigé des fortunes colossales, aussi bien en Algérie qu’à l’étranger, grâce aux marchés publics juteux dont ils ont bénéficié depuis près d’une décennie, particulièrement durant le 4e mandat. Une première en Algérie, le délit de «financement occulte de campagne électorale ou de parti politique» est retenu contre plusieurs hommes d’affaires.