Par Hakim Ould Mohamed
L’Etat mobilise annuellement 5.000 milliards de dinars en transferts sociaux, représentant à la fois les subventions directes et indirectes de l’Etat au profit des ménages et des différents organismes et entreprises dépendant de l’aide financière de l’Etat. Le chiffre a été communiqué, hier, par le Premier ministre, Aïmene Benabderrahmane qui présentait, à l’Assemblée, la Déclaration de politique générale de son gouvernement. Le chiffre lève le voile sur l’ampleur de l’action sociale de l’Etat et était, maintes fois, sujet à controverses, étant donné le poids de la dépense sociale dans le budget de l’Etat, d’autant plus que les positions financières internes et externes du pays étaient fragilisées ces dernières années par le contrechoc pétrolier de 2014 et de 2020 ainsi que par les deux années de pandémie lié au Covid-19. Le Premier ministre a précisé, hier,
que la dépense fiscale a atteint, elle seule, ces deux dernières années une moyenne
annuelle de 440 milliards de dinars, ce qui dénote, selon lui, de la détermination de l’Etat à préserver son caractère social». Les dernières mesures en faveur du pouvoir d’achat n’ont pas été sans conséquence sur les dépenses globales de l’Etat, puisqu’elles avaient nécessité une dépense fiscale supplémentaire de 84 milliards de dinars, rien que pour l’exonération des salaires inférieurs à 30.000 DA de l’Impôt sur le revenu global (IRG). La réduction des taux de l’impôt sur le revenu global (IRG) a coûté à l’Etat 195 milliards de dinars. Ces mesures justifient, en partie, la hausse des dépenses sociales de l’Etat sur l’actuel exercice, sans prendre en compte les autres subventions mobilisées à l’effet de soutenir les prix des céréales, de la poudre de lait et autres produits subventionnés. L’appui financier important à l’Office algérien interprofessionnel des céréales (OIAC) a été estimé à plus de 900 milliards de dinars en 2021 et 2022. Les mesures liées à la préservation du pouvoir d’achat des ménages et des entreprises, combinées à une hausse des subventions financières aux organismes publics en charge de l’importation des produits alimentaires de base, ont contribué ainsi à une hausse exponentielle de la dépense sociale de l’Etat, en période de tension et de forte hausse des prix sur les marchés mondiaux.
Amélioration des positions financières
Cette conjoncture difficile, «n’a pas eu raison de la détermination de l’Etat à préserver son caractère social», a indiqué Aïmene Benabderrahmane, relevant que les efforts de l’Etat en matière de renforcement des acquis sociaux «ont été traduits par l’amélioration de la place de l’Algérie dans les classements internationaux». L’institution d’une allocation chômage au profit des demandeurs d’emploi a profité, selon le Premier ministre, à 1.897.228 bénéficiaires au 31 août 2022. Ce chiffre témoigne, néanmoins, de l’ampleur du chômage en Algérie après les deux années de crise sanitaire qui ont mis à genoux de nombreuses entreprises et secteurs d’activité. L’inconvénient de cette hausse de la dépense sociale globale de l’Etat est qu’il serait désormais difficile de la raboter dans le cadre de la révision maintes fois annoncée du dispositif des subventions généralisées. Cette révision devait se faire courant 2022, mais force est de constater que la conjoncture internationale et ses répercussion sur les prix en interne ainsi que sur le pouvoir d’achat des ménages et des entreprises a fait qu’il faille remettre à plus tard cette réforme, pourtant nécessaire pour l’assainissement des finances publiques. Au chapitre des comptes extérieurs, l’exposé du Premier ministre fait état d’une amélioration nette des positions financières extérieurs avec, au tableau, une hausse à 14 milliards de dollars de l’excédent commerciale, à 9,1 milliards de dollars de l’excédent de la balance des paiements et à 4,7% de la croissance économique. L’amélioration constatée sur la courbe de la balance commerciale et celle des paiements est due, en partie, selon le Premier ministre, à l’augmentation de la valeur des exportations hors hydrocarbures, lesquelles avaient atteint 4 milliards de dollars à fin août de l’année en cours. Les prévisions tablent sur une exportation hors hydrocarbures de 7 milliards de dollars à fin 2022. Le gouvernement a œuvré également, soutient le Premier ministre, à réguler les importations et à assainir le nombre des importateurs de marchandises destinées à la revente en l’état, lequel est passé de 43.000 à 13.000 importateurs. Cette politique de réduction et de régulation des importations, explique Aïmene Benabderrahmane, s’était traduite essentiellement par «la mise en place des cartographies de la production nationale et la réorganisation de l’activité d’importation pour la revente en l’état, ce qui a permis d’assainir le nombre des importateurs, passé de 43.000 à 13.000 importateurs». Le grand oral du Premier ministre a permis ainsi de faire le bilan d’une année à la tête du gouvernement. Les Algériens sont, néanmoins, restés sur leur faim quant aux nouveaux engagements annoncés en faveur du pouvoir d’achat. Les débats permettraient probablement à lever les équivoques sur ces questions, ainsi que sur certaines réformes maintes fois annoncées par le gouvernement. <