Par Sihem Bounabi
Suite à la journée de protestation, organisée le 7 décembre dernier, et largement suivie sur tout le territoire national par les adhérents de la Coalition nationale des syndicats de la santé (CNSS), le ministre de la Santé a accordé une audience aux présidents des syndicats, à la fin de la journée de protestation. Il a pris l’engagement solennel de répondre aux doléances de la coalition par des actes concrets et une nouvelle rencontre qui sera organisée d’ici trois semaines, soit à la fin du mois de décembre, pour faire le point sur la situation.
Ainsi la Coalition regroupant les médecins généralistes, spécialistes, professeurs de l’enseignement paramédical, biologistes, infirmiers, auxiliaires médicaux en anesthésie, sage-femmes et psychologues a présenté la plateforme de revendications au ministre de la Santé dans laquelle chaque point a été détaillé.
Suite à la réunion avec le ministre de la Santé, le coordinateur de la CNSS, Salah Laouar Abdelhamid, confie : «Nous avons exposé toutes nos revendications et avons discuté sans détour, en allant droit au but et en abordant notre plateforme point par point.»
Parmi les premiers acquis arrachés, lors de cette rencontre, le ministre de la Santé s’est engagé à la mise en place dans de brefs délais des mesures annoncées par le Président de la République pour les professionnels de la santé concernant le dossier Covid. En l’occurrence, l’application de la bonification de l’âge de départ à la retraite en fonction des années travaillées dans la Covid-19 ainsi que du capital décès au profit des familles des travailleurs de la santé décédés dans l’exercice de leur fonction, et la couverture de l’assurance globale à 100% et le versement des primes Covid en retard. Concernant le versement de la prime Covid, le coordinateur de la CNSS a tenu à souligner que deux demandes ont été communiquées au ministre de la Santé. Le premier point concerne le versement de la prime Covid à «tous les professionnels de la santé ainsi que le versement de la 4e tranche et des autres primes en retard aux enseignants paramédicaux».
Le second point, et afin de trouver une solution pérenne aux versements de la prime Covid, la Coalition nationale des syndicats de la santé a proposé au ministre, qu’ à partir du moment où une prime contagion existe déjà, mais qui n’est pas valorisée et n’a pas vraiment d’impact sur les salaires, de calculer le risque des professionnels de la santé face aux contaminations par les maladies contagieuses et bactériennes, et de fait, une augmentation substantielle de cette prime en incluant celle de la Covid», souligne Dr Abdelhamid Salah Laouar.

Consultation du gouvernement pour l’augmentation des salaires
Par ailleurs, concernant la revendication de l’augmentation des salaires pour faire face à l’importante érosion du pouvoir d’achat, notamment à travers l’accélération de la révision des statuts particuliers des différents corps de la santé des régimes indemnitaires y afférents, le Dr Abdelhamid Salah Laouar déclare : «Nous avons informé le ministre de la Santé que depuis son instruction, au mois de juin dernier, concernant la révision des statuts, rien n’a été fait sur le terrain et aucun statut n’a avancé.» Enchaînant que «l’on a également expliqué au ministre que la commission qui a été nommée n’avait aucune prérogative ni aucun pouvoir de décision et de ce fait, a été une vraie perte de temps». Fort de ces arguments, la Coalition des syndicats de la santé a demandé de relancer rapidement la révision des statuts sur une bonne base avec, d’emblée, une augmentation substantielle de salaire.
Notre interlocuteur confie que «face à cette demande, le ministre a argumenté que cela risque d’entraîner la même demande des autres secteurs. Nous avons répondu que ce n’est pas notre préoccupation car, le secteur de la santé est un secteur stratégique qui a un rôle central». Enchaînant que «le secteur de la santé n’a pas été augmenté depuis onze ans, non seulement il n’y a pas eu d’évolution mais, aujourd’hui, c’est l’érosion du pouvoir d’achat qui est inquiétante où des cadres de la santé n’arrivent pas à boucler leur fin de mois. Ce n’est pas normal». Sur ce point précis, le ministre de la Santé a demandé un délai afin qu’il puisse consulter le gouvernement et trouver des solutions.
Le rendez-vous a ainsi été pris pour la fin de ce mois de décembre pour faire le point sur l’évolution de la situation et communiquer aux représentants de la Coalition les résultats et l’état d’avancement des points sur lesquels le ministre s’est engagé.

Maintien du boycott des Assises nationales
Concernant les Assises nationales, les représentants des huit syndicats de la Coalition ont confirmé le boycott, «bien que le ministre nous a expliqué la démarche de l’organisation de telles rencontres avec notamment l’animation des ateliers avec des experts étrangers du secteur», affirme le coordinateur de la CNASS. Il ajoute à ce sujet : «Nous avons exposé notre point de vue sur cette question, en espérant qu’il nous a écoutés. Nous avons mis en exergue que ces rencontres devraient aborder un ou deux aspects afin que les outils qui existent déjà puissent être mis en place.» Assurant que «si on doit tout revoir de fond en comble, ce sera un bond de vingt ans en arrière alors que cela a été déjà fait en 2014. La carte sanitaire a été établie en 2015, ensuite en 2018, suivie par les réformes de la santé engagées par le ministre délégué à la Réforme hospitalière. Des recommandations claires ont été émises et prises en considération et avalisées au Conseil des ministres au mois de mai 2021, pour revenir finalement à la case départ ? Cela n’a pas de sens.»
Il ajoute que face au ministre de la Santé ils ont expliqué qu’«il faut mettre en application les mesures des textes de loi sur le terrain». Enchaînant que «si on veut vraiment réussir la réforme, les outils existent, il suffit d’appliquer et corriger, sachant qu’à ce jour, on n’a appliqué aucun article de la nouvelle loi sanitaire . C’est ce que l’on a dénoncé auprès du ministre en lui expliquant qu’on ne peut pas cautionner des dérives».
Le coordinateur de la CNSS nous assure que les représentants des huit syndicats de la santé se sont attelés à démontrer au ministre qu’il faut mettre en place les outils pour faire fonctionner efficacement le système de santé. Il ajoute qu’il s’agit aussi «pour les praticiens de pouvoir exercer dans un système de santé où les rôles sont bien établis avec une responsabilité clairement identifiée afin que l’on puisse évaluer le travail et voir où sont les défaillance et de pouvoir rapidement les corriger». Tout en assurant qu’il reste ouvert au dialogue et à la concertation, le coordinateur de la coalition de la santé conclut : «Nous avons rendez-vous avec le ministre d’ici la fin du mois et suivant l’avancée de nos demandes, nous allons décider de la suite à donner au mouvement de protestation.» <