Les prix du pétrole, du gaz et de l’ensemble des matières premières poursuivaient leur envol, hier, alors que les places boursières mondiales étaient plongées dans la déprime et comptaient leurs pertes.
Par Feriel Nourine
Le conflit armé entre la Russie et l’Ukraine, mais aussi les sanctions occidentales contre Moscou multiplient les conséquences négatives sur une économie mondiale qui risque l’asphyxie si une solution diplomatique ne vient pas à la rescousse.
Dans le cas de l’or noir, les cours entamaient une nouvelle semaine dans la même tendance de clôture de vendredi dernier, c’est-à-dire en poursuivant leur hausse, sous l’effet de discussions que les Etats-Unis et l’Union européenne seraient en train de mener sur une éventuelle interdiction des importations de pétrole russe. Manifestée dès la matinée sur les marchés de Londres et New-York, la montée des prix du brut se poursuivait en début d’après-midi avec un baril de Brent de la mer du Nord atteignant 125,27 dollars, en progression de 6,06%, tandis que le West Texas Intermediate (WTI) gagnait 6,60 % à 123.31 dollars.
Les deux références européenne et américaine de brut inscrivaient ainsi des sommets inédits depuis 2008. Très tôt le matin, le Brent et le WTI s’étaient même rapprochés de leurs records absolus. Vers 2H30 (heure japonaise), le marché asiatique assistait à une percée incontrôlable du Brent qui s’est soldée par un prix frôlant les 140 dollars, proche des 147,50 dollars atteints en juillet 2008, alors que le WTI dépassait même les 130 dollars.
Dimanche, le chef de la diplomatie américaine Antony Blinken a déclaré que les Etats-Unis et l’Union européenne « discutent très activement » de la possibilité d’interdire les importations de pétrole russe en réponse à l’opération militaire russe levée en Ukraine. Or, cesser les importations de pétrole russe « va renforcer la pression haussière sur les prix du pétrole et faire flamber le prix du baril à plus de 150 dollars dans un proche avenir », estiment des analystes. Le Fonds monétaire international (FMI) a, de son côté, prévenu que les sanctions contre la Russie auraient un « impact substantiel » sur l’économie mondiale et des effets « collatéraux pour d’autres pays ». La présidente de la Commission européenne Ursula von der Leyen s’est, cependant, montrée plus prudente, évitant de mentionner des interdictions d’importation alors que la Russie fournit 40% du gaz consommé dans l’UE.
En tous les cas, les Américains et leurs alliés européens vont continuer à discuter de cette option sans compter sur l’Allemagne, laquelle refuse l’embargo sur le pétrole, le gaz et le charbon russes dont sa consommation dépend grandement, faut-il le rappeler. En effet, l’Allemagne importe de Russie 55% de son gaz, 42% de son pétrole ainsi que du charbon. D’où la crainte d’une pénurie d’énergie qui « menacerait la paix sociale », avait prévenu, vendredi, le ministre écologiste de l’Economie Robert Habeck.
Le gaz atteint des sommets
Flambée également sur le marché gazier et bond à valeur d’un nouveau record pour le cours de la référence européenne, à savoir le TTF néerlandais qui a atteint hier 345 euros le mégawattheure.
Dans la même logique d’évolution du pétrole et du gaz, les prix des métaux dépendant de la production russe s’envolaient eux aussi. L’aluminium a dépassé pour la première fois la barre des 4 000 dollars la tonne tandis que le cuivre et le palladium ont touché de nouveaux plus hauts historiques à 10 845 dollars la tonne et 3 442,47 dollars l’once respectivement. Peu avant 08H00 GMT, la tonne d’aluminium pour livraison dans trois mois a même culminé à 4 073,50 dollars sur le marché londonien des métaux de base (London Metal Exchange, LME). Le nickel, sans atteindre ses derniers sommets remontant à 2007, progressait de plus de 25%, jusqu’à 37 800 dollars.
Le conflit armé entre la Russie et l’Ukraine n’a pas épargné le marché de l’or où l’once a dépassé les 2 000 dollars hier matin, soit son plus haut niveau depuis septembre 2020. Une situation qui a poussé les investisseurs à se ruer sur cette valeur refuge par excellence.
Chute des Bourses, repli des devises
A l’inverse des marchés des matières premières, les places évoluaient dans une tendance pas du tout enviable.
A la Bourse de Tokyo, l’indice vedette Nikkei a clôturé en baisse de 2,94% à 25.221,41 points, son plus bas niveau depuis novembre 2020. Tous les secteurs d’activité sur le Nikkei ont été laminés, à l’exception, sans surprise, de l’énergie. Les pertes à la Bourse de Hong Kong étaient encore pires, son indice Hang Seng lâchant environ 3,5% vers 06H30 GMT. En Chine continentale, Shanghai et Shenzhen perdaient plus de 2%.
Sur le marché des devises, l’euro se repliait fortement face au dollar, tombant à 1,0880 dollar vers 06H30 GMT contre 1,0928 dollar vendredi. La monnaie européenne chutait aussi face au yen, à raison d’un euro pour 125,08 yens contre 125,48 yens vendredi à 21h00 GMT. Le dollar progressait par rapport au yen, à raison d’un dollar pour 114,96 yens contre 114,82 yens en fin de semaine dernière. De son côté, la monnaie russe fondait encore de 11% après avoir touché un nouveau plus bas historique. Depuis le 1er janvier, le rouble a dégringolé de 45%.