L’objectif des pouvoirs publics de généraliser l’utilisation du Terminal de paiement électronique (TPE), à travers l’ensemble du réseau national de commerçants, devra sans doute attendre encore longtemps pour se concrétiser sur le terrain.

Par Feriel Nourine
Prévue initialement par la loi de finances 2018, puis reportée à plusieurs reprises, l’obligation faite aux intervenants dans la sphère commerciale classique de se doter d’un TPE continue de faire face à la résistance de ces derniers. Et la dernière extension de délai jusqu’à décembre prochain, accordée par la loi de finances 2021, ne semble pas avoir l’effet escompté de provoquer le déclic chez les commerçants. Lesquels ne se bousculent pas au portillon des fabricants et installateurs du matériel nécessaire, comme en témoigne le communiqué rendu public par le Groupement d’intérêt économique (GIE) Monétique.
Celui-ci indique que jusqu’au mois de juin dernier, le nombre de commerçants s’étant doté de ce type d’appareil n’avait atteint que 38 422 cas contre 29 931 une année auparavant. Ce qui représente une hausse de 28,37% pouvant sembler encourageante à première lecture, mais qui s’avère vite insignifiante lorsqu’elle est appliquée au nombre total des commerçants à travers le pays, à savoir 2 145 067.
Pis encore, si l’on compare le dernier bilan du GIE Monétique à celui livré en mars dernier, on constate que l’opération généralisation TPE a carrément marqué un coup de frein durant le second trimestre 2021. Le groupement avait comptabilisé 38 144 terminaux installés à la fin mars dernier contre 38 422 à fin juin, soit tout juste 278 nouveaux appareils sur trois mois.
Bien plus qu’un coup d’arrêt, c’est carrément un échec sur toute la ligne dont témoignent pareils chiffres. Ceci d’autant que les terminaux installés par les commerçants ne sont pas opérationnels dans leur totalité. Une situation qui s’explique en gros par la culture du cash qui caractérise l’Algérien, qu’il soit commerçant ou client, alors que l’Etat ne montre aucune volonté réelle de faire changer la donne, se contentant d’une série d’ajournement d’une mesure qui a déjà été décidée bien en retard par rapport à d’autres pays auxquels nous pouvons nous comparer.
Si l’obligation pour les commerçants de s’équiper d’un TPE continue à être justifiée chez le gouvernement, par un souci de modernisation du pays et de réduction de la masse monétaire qui circule dans l’informel, cette mesure ne manque pas pour autant d’inquiéter les commerçants tout autant que les consommateurs. Les premiers craignent le contrôle des services des impôts que pourrait permettre un TPE, alors que les seconds, qui détiennent pourtant des cartes de paiement électronique, évoquent une question de confiance.
Mais quand bien même le très peu d’engouement pour le TPE chez les commerçants n’aurait pas existé, le projet d’un appareil du genre pour chaque commerçant à travers le pays n’aurait quasiment aucune chance de réussir selon les délais fixés par ses initiateurs. Et pour cause, il bute en premier lieu sur une offre locale limitée en matière d’équipements, avait déjà souligné le GIE Monétique, précisant que la capacité de production de l’Entreprise nationale des industries électroniques (Enie), principal fabricant de TPE en Algérie, ne dépasse pas les 600 unités/jour (300 TPE classiques et 300 smart), selon sa direction.
Pour le premier trimestre 2021, cette entreprise publique avait produit 6 000 TPE, destinés exclusivement à satisfaire les commandes passées par le ministère des Postes et des Télécommunications, a ajouté la même source, relevant que la politique de rationalisation de l’utilisation des devises prônée par le gouvernement fait de l’option d’importation de ces appareils une solution de dernier recours.
Même constat de situation à l’arrêt pour le parc des distributeurs automatiques de billets (DAB) qui n’a enregistré aucune nouvelle installation depuis le premier semestre de l’année 2020, se contentant d’un nombre de distributeurs automatiques figé à 3 030 appareils installés, poursuit la même source. Cela s’est produit alors que la crise des liquidités n’a pas été totalement résolue et que, de surcroît, une bonne partie de ce parc se trouve régulièrement en panne.
Une progression en conséquence du nombre de TPE aurait peut-être permis de faire face au parc réduit en distributeurs automatiques de billets en permettant aux clients de réduire leurs transactions par voie électronique, sans devoir aller chercher leur argent à la poste. Mais comme une défaillance en appelle une autre… <