Le Premier ministre Abdelaziz Djerad a pointé, hier, l’ancien système, l’accusant, une nouvelle fois, d’être à l’origine de la rupture de confiance entre le citoyen et les institutions de l’Etat.

Par Feriel Nourine
Dans son allocution d’ouverture des travaux d’une journée d’étude sur «L’éthique dans l’administration et l’entreprise publique», organisée hier à Alger, M. Djerad est revenu sur les pratiques érigées en référence sacrée par ce système, citant «les dépassements dans la gestion des affaires publiques, la corruption, le népotisme, la dilapidation du denier public, la bureaucratie» qui ont, a-t-il soutenu, «impacté négativement la nature de la gouvernance dans le pays et entamé la confiance du citoyen dans les institutions de l’Etat».
Le mal étant profond, et le retour de la confiance étant un processus qui demande du temps et de l’assiduité, l’intervenant a noté que toute approche de réforme visant à moraliser la vie publique et le service public, en particulier, «ne sera efficiente et efficace que si elle passe par un diagnostic minutieux et objectif du phénomène de la corruption, de ses ramifications et de ses véritables causes et l’identification des dysfonctionnements et des comportements déviants, qui ont toujours été la principale source de préoccupation dans notre société».
Considérant, à juste titre, que le développement du pays ne peut se réaliser à travers la relation héritée de l’ancien système, il a fait remarquer que «la restauration de cette confiance perdue est une condition sine qua non». Laquelle entreprise «passe par l’amélioration de la relation administration-citoyen à travers un service public de qualité, à l’écoute de ses préoccupations et des solutions adaptées à ses problèmes», a-t-il souligné, avant d’expliquer que pour atteindre pareil objectif, il est impératif de mettre en place les mécanismes et les règles nécessaires au bon fonctionnement du service public, ainsi que des principes et des valeurs éthiques à même d’orienter et d’encadrer le comportement de l’agent public.
En ce sens, le Premier ministre n’a pas manqué de rappeler que l’éthique figure parmi «les priorités du président de la République», ce dernier ayant souligné «la nécessité de renforcer la transparence, de lutter contre la corruption et de proposer des mécanismes permettant d’éviter les conflits d’intérêts entre l’exercice des responsabilités publiques et la gestion des affaires, afin de soustraire la gestion des affaires publiques au pouvoir de l’argent», a-t-il cité.
A ce propos, M. Djerad rappellera encore le récent amendement constitutionnel qui prévoyait la création d’une haute autorité de transparence, de prévention et de lutte contre la corruption, en plus de la nomination du «Médiateur de la République, pour l’amélioration du service public et une meilleure prise en charge des préoccupations des citoyens». Sur le même registre, M. Djerad a annoncé la création d’un «groupe de travail», composé d’universitaires et d’experts, pour «l’élaboration du projet de charte d’éthique dans l’administration et les entreprises publiques». Pour ce faire, le groupe s’inspirera des propositions et des recommandations issues de la rencontre d’hier, a-t-il ajouté.
Cette charte servira de «guide auquel tout agent public doit se conformer quelle que soit sa position dans la hiérarchie administrative», a-t-il précisé. De même, elle constituera dans le futur «une matière d’enseignement à inclure dans les différents programmes de formation», a-t-il poursuivi, appelant à ce propos les établissements de formation à la nécessité de «focaliser sur l’éthique professionnelle dans leurs programmes», afin de former «des hommes et des femmes imprégnés des principes et des valeurs et protégés contre les dérives comportementales», a-t-il dit. Dans la même logique, l’intervenant a insisté sur «le devoir des citoyens de faire montre d’un sens élevé de responsabilité», en partant de «l’équilibre entre éthique sociétale et administrative». Ce qui donnera lieu, estime-t-il, à «la restauration de la confiance entre les citoyens et leur Etat» et contribuera à «la mise en œuvre des réformes profondes de l’Etat qui constitueront un défi fondamental dans la prochaine étape à laquelle appelle le président de la République».

Associer les agents publics à la gestion de leur parcours professionnel
Evoquant l’un des sujets qui fait l’actualité ces derniers jour, à savoir les conflits sociaux, le Premier ministre s’est adressé aux agents publics pour tenter de les rassurer sur la «détermination du gouvernement à poursuivre sa démarche visant à asseoir les bases de la concertation, en les «associant dans la gestion de leur parcours professionnel, à trouver les meilleurs cadres de dialogue social avec les différents partenaires pour régler les conflits professionnels, et à aplanir les difficultés qui entravent le bon fonctionnement et le développement du service public en vue de renforcer la paix sociale et de réaliser la croissance économique».
Invitant les agents publics à s’acquitter de leurs missions «avec éthique, dignité, probité et impartialité», M. Djerad n’a pas manqué de souligner que ces derniers doivent agir «loin de toute instrumentalisation politique ou idéologique». L’agent public est tenu, en toute circonstance, «de faire montre d’un comportement exemplaire et de s’abstenir de toute pratique contraire aux valeurs éthiques», a-t-il insisté.
Relevant que de «nombreux dépassements» participant de la corruption sont l’œuvre de personnes «dépourvues de sens de la responsabilité, de conscience et d’éthique», il dira qu’«il ne faut généraliser ni exagérer les choses», car, considère-t-il «les administrations publiques comptent en leur sein des compétences qui donnent une bonne image en accomplissant leurs missions avec responsabilité et intégrité».
Evoquant le cadre juridique mis en place par certaines institutions et administrations publiques comme les services des Douanes, la Police et les secteurs de l’Enseignement supérieur, de la Justice et de la Santé, à travers l’élaboration de leur propre charte d’éthique de l’agent public, le Premier ministre a estimé que ces chartes «n’auront aucun effet si elles ne sont pas accompagnées par des mécanismes de contrôle et de suivi de leur mise en œuvre, dans le cadre d’une approche globale et intégrée au titre de la stratégie nationale de transparence et de prévention et de lutte contre la corruption».