Alors que les questions de la diversification de l’économie, du développement de l’entreprenariat ou encore de l’exploitation des nouvelles compétences universitaires sont au cœur des préoccupations du secteur de l’économie, la Présidente de l’Association des femmes cheffes d’entreprises, Mme Chahrazed Saâdi, a appelé hier les autorités, et plus largement la société algérienne, à ne plus se passer de « plus de la moitié de la société ».
Par : Nadir Kadi
La responsable, invitée par le Forum du journal El Moudjahid pour faire le point sur la place des femmes dans le milieu de l’entreprenariat, a en ce sens déclaré : « L’entreprenariat féminin doit être vu comme un axe important du développement économique et social (…) Nous ne pouvons pas faire abstraction de plus de la moitié de la société ou accepter que les femmes restent inactives. »
En effet, mettant en avant les obstacles, mais également les opportunités, qui caractérisent la conjointure économique pour la femme, désireuse de se lancer dans l’entreprenariat, Mme Chahrazed Saâdi estime que l’encouragement à la création d’entreprises, dont des startups, peut être un moteur important pour l’intégration des femmes dans l’économie, d’autant qu’elles seraient aujourd’hui davantage victimes de l’inactivité : « Le chômage chez les femmes est important, à près de 20% (…) Les hommes sont avantagés lors du recrutement », a-t-elle indiqué. En ce sens, la responsable fait savoir que la marge de progression est aujourd’hui très importante pour les femmes, l’indicateur des registres de commerce prouve, en effet, que seulement « 168 000 femmes détiennent des registres de commerce ». « Aujourd’hui, les femmes travaillent, mais peut-être pas au niveau que l’on voudrait (…) Dans le monde, entre 20 et 25% des entreprises sont créées par des femmes, or en Algérie, nous sommes encore loin de ce chiffre, les statistiques officielles parlent de 17% ». Par ailleurs, ce chiffre pourrait même être inférieur : « Il faut aussi dire que parmi ces 17% il y a aussi des prête-noms, des femmes qui dans les faits ne sont pas réellement cheffes d’entreprise (…) C’est là une question de culture, ou parfois un manque de confiance en soi. »
La responsable de l’Association des femmes cheffes d’entreprise a également insisté hier sur l’importance de mettre à profit les compétences et potentiels des femmes, d’autant que « plus de 60% des universitaires sont des filles, et dans tous les niveaux, graduation post-graduation et recherche ». En ce sens, Mme Chahrazed Saâdi fait savoir que la structure qu’elle dirige a fait appel aux responsables gouvernementaux chargés des statistiques et du numérique : « Nous les avons contactés et ils pourraient nous apporter leurs expertises en la matière. Notamment pour identifier les potentiels, ce que deviennent toutes les femmes formées par les universités (…) Je crois que c’est là l’une de nos faiblesses. De l’argent public est dépensé pour la formation, puis le savoir se perd. » L’objectif, explique-elle, serait en ce sens de collecter un maximum de statistiques sur l’emploi réel des femmes.
Par ailleurs, et dans un but similaire, Mme Chahrazed Saâdi a également appelé à mettre à profit le savoir-faire des femmes, actuellement contraintes à travailler dans le secteur informel ; des femmes qui exercent dans différents domaines d’activité et qui « conservent une certaine mémoire du patrimoine algérien ». La promotion de l’entreprenariat féminin « doit travailler sur leur intégration économique ».
Quant à la place que peut offrir la société algérienne aux femmes entrepreneurs, Mme Chahrazed Saâdi, très loin des discours convenus sur la question, explique que l’entreprenariat féminin pourrait bénéficier du « changement des mentalités de ces dernières années », d’autant, ajoute la responsable, que la société algérienne, dans ses valeurs profondes, « n’est pas hostile aux femmes (…) Certes, durant longtemps nous avons importé des idéologies différentes de nos attitudes, mais les femmes restent présentes dans l’activité, et cela est valables dans toutes les régions du pays. Elles travaillent la terre, elles dirigent des villages, des administrations ou elles représentent 41% des fonctionnaires… ». Saluant en ce sens les « initiatives, les soutiens de la part de l’Etat » en matière de promotion de l’intégration des femmes dans l’économie, la présidente de l’Association des femmes cheffes d’entreprise ajoute toutefois : « Il y a aussi des efforts à faire et, notamment de notre part en tant qu’organisation civile qui travaille sur l’accompagnement et la pérennisation des entreprises lancées par des femmes. ».
En ce sens il est annoncé que la structure associative compte organiser des ateliers de travail au niveau des régions, en partenariat avec les pouvoirs publics : « Nous allons aller vers ces femmes, d’abord pour identifier le potentiel existant, puis le coordonner avec les opportunités d’investissement au niveau local, selon les spécificités et les atouts. » n