Son nom composé et ses prénoms sont aussi longs que son CV et l’intitulé du ministère dont il a pris la charge hier. Acheuk-Youcef Ahmed-Chawki a pris ses fonctions de ministre du Travail, de l’Emploi et de la Sécurité sociale. Médecin de formation, il aura quand même usé tous ses fonds de pantalon au sein du même ministère. Après la DDS de Constantine, il sera directeur de wilaya de la Cnas à Skikda, Annaba et Mila, avant de rejoindre Alger, pour occuper une direction au ministère de tutelle, puis Directeur général de la Casnos au temps de Mohamed Ghazi comme ministre. Acheuk-Youcef se fera connaître et subira les feux de la rampe en prenant en charge la mise en route de la carte Chifa et la généralisation du médicament générique où il fera plusieurs fois le tour de toutes les wilayas pour convaincre les pharmaciens, les médecins et les affiliés aux caisses de santé d’adopter les nouveaux outils proposés. Il le fera avec succès mais butera quand même sur le refus catégorique des médecins de se positionner positivement par rapport à la carte Chifa. Une « bataille » qui n’est pas encore achevée.
Homme de défis donc, le nouveau ministre du Travail, conscient de ces derniers qui l’attendent ne lésinera sûrement pas sur ses efforts pour faire aboutir plusieurs projets et en achever d’autres.
Le premier à relever est sans doute celui de réinstaurer un équilibre à la Caisse nationale des retraites (CNR). La bravade consistera à doter la caisse d’un équilibre structurel et financier qu’elle a perdu, non pas à cause d’un manque de cotisants mais plutôt à la mauvaise gestion et de fonctions sociales et sanitaires supplémentaire pour la CNR, la Cnas, et la Casnos, alors que leurs activités ne concernent pas ce domaine. L’ancien administrateur à la Cnas, Noureddine Bouderba, ne croit pas à la fatalité qui frappe la CNR, comme il l’a déclaré récemment à la Chaîne III sur les ondes de la Radio nationale.

Pas de délai de grâce
« Il y a quelque 50% de cotisations à la Cnas qui ne sont pas récoltées. Il y a aussi les retraites versées aux militaires, aux hauts cadres de l’Etat et les pensions à vie des ministres, des députés et des sénateurs. Il y a eu aussi la prise en charge des gardes communaux dans les années 90. Les pensions de retraites, malgré ça, ne dépassent pas 6% du PIB, alors qu’elles dépassent les 20% en France, où une personne sur deux dépasse 60 ans alors que chez nous il est de 1 pour 9 », dira en substance ce cadre de la Cnas devenu militant syndicaliste.
Il précisera aussi, dans une intervention intéressante, que les 600 milliards de DA qui sont dans la nature manquent à recouvrer des caisses, « est le montant du déficit de la CNR, qui peut encore, par une intervention des spécialistes, être alimenté par d’autres sources et elles sont nombreuses ».
L’enjeu pour Acheuk-Youcef est donc de taille et il ne pourra pas dire qu’il ne connaît pas le sujet, lui, qui s’est échiné à créer des directions de recouvrement au sein de la Casnos qu’il a géré depuis 2014.
Avec plus ou moins de bonheur, il a réussi à convaincre les affiliés à la caisse des non-salariés « à faire le jeu » à travers les colonnes des journaux et les ondes des radios et de télévisions, s’avérant être un homme de communication, pour ceux qui ne le savaient pas. Le terrain ne lui étant pas étranger, le nouveau ministre devrait sans doute évoluer dans un système qu’il connaît, mais cette fois sans le concours des syndicats qui ne vont pas faire de cadeaux sur les acquis des retraités et des travailleurs, l’ère de Sidi Saïd et des tripartites fantoches étant révolu.
Nous rebondissons pour dire un autre défi, et non des moindres, qui attend le ministre du Travail, « le projet de la loi sur le travail ». Un projet dont on ne connaît pas grand-chose mais qui risque, si tous les acteurs ne sont pas réunis autour de la même table, de provoquer des remous dont le secteur du travail et de l’emploi se passerait volontiers. On sait les dégâts occasionnés, qui durent encore, aux Français et à leur économie dès la présentation d’un projet éponyme.
Alors, Acheuk-Youcef est-il « conscient de l’ampleur de la responsabilité et des défis qui l’attendent », comme il l’a déclaré lors de son installation hier. Connaissant l’homme et le commis de l’Etat qu’il est, nous serions tentés de répondre par l’affirmative. Nous ne le ferons pas à sa place, car les jours prochains nous renseigneront mieux sur la qualité de l’entame des réformes et des « corrections » qui doivent être apportées au travail, à l’emploi et à la sécurité sociale.<