Le retour à la «normale» des relations diplomatiques entre Paris et Alger a été confirmé une nouvelle fois à l’issue des travaux de la «session des consultations politiques algéro-françaises» qui se sont tenus mercredi dernier.
Par Nadir Kadi
La rencontre, organisée à Alger, et qui s’inscrit dans la dynamique engagée durant l’été 2022 lors de la visite en Algérie du président français Emmanuel Macron, a en effet donné lieu à un communiqué du ministère des Affaires étrangères et de la Communauté nationale à l’étranger, mettant en avant la «concordance de vues» et la volonté de «rehausser le niveau de la coopération» entre les deux pays.
Et au-delà du langage diplomatique, le texte, repris par l’APS, laisse également apparaître que le traitement de la question de la mémoire est de nouveau sur les rails : «Il a été convenu de traiter la question mémorielle dans le cadre d’une lecture objective et de vérité». La partie française s’étant «engagée» à «accélérer le processus de restitution des archives et du traitement de la question des sites d’essais nucléaires qu’il convient de réhabiliter, concourant ainsi à appréhender l’avenir dans un climat d’apaisement et de respect mutuel».
En ce sens, dès le lendemain de la rencontre, le quotidien le Monde a fait savoir que la partie française avait à son tour dévoilé les noms des cinq historiens devant intégrer la très attendue «commission mixte algéro-française sur la mémoire et l’histoire». La structure, imaginée par les deux pays, avec l’objectif d’arriver à une vision commune sur la période coloniale et la guerre d’indépendance, devra ainsi être co-présidée par les historiens Benjamin Stora et Mohamed Lahcen Zeghidi. Les historiens choisis par la partie française sont par ailleurs, selon la même source, «Tramor Quemeneur, auteur de nombreux ouvrages sur la guerre d’Algérie, qui officiera comme secrétaire général de la partie française de la commission, Jacques Frémeaux, spécialiste de l’invasion française de l’Algérie, Florence Hudowicz, conservatrice en chef du patrimoine et co-commissaire de l’exposition sur l’émir Abdelkader, au Musée des civilisations de l’Europe et de la Méditerranée (MuCEM), à Marseille, en 2022, et Jean-Jacques Jordi, historien d’origine pied-noir et auteur d’ouvrages sur les Européens d’Algérie».
Quant aux historiens algériens devant intégrer la commission, il s’agit pour rappel de Mohamed Lahcen Zeghidi, Mohammed El Korso, Djamel Yahyaoui, Idir Hachi et Abdelaziz Fillali. Ces derniers avaient été désignés, puis reçus, fin novembre 2022, par le président, Abdelmadjid Tebboune. Quant à la date officielle d’installation de la commission, ou celle du lancement de ses travaux, aucune information n’a pour le moment été communiquée. Le journal le Monde avance toutefois qu’elle sera définie d’un commun accord entre les deux pays.
Par ailleurs, il est à rappeler que les deux capitales avaient en ce sens exprimé la volonté d’arriver à un regard nouveau et sans «tabou» sur l’Histoire commune. Le président Emmanuel Macron précisant en août dernier, lors d’un point de presse animé conjointement avec le président A. Tebboune, «Ouvrons nos archives et permettons de regarder l’ensemble de cette période historique qui est déterminante pour nous : du début de la colonisation à la guerre de libération, sans tabou, avec une volonté de travail libre, historique et un accès complet à nos archives, de part et d’autre».
Et dans cette même logique de «renouveau» des relations entre les deux pays, la «9e session des consultations politiques algéro-françaises», tenue sous la coprésidence du secrétaire général du ministère des Affaires étrangères et de la Communauté nationale à l’étranger, Amar Belani, et de son homologue du ministère de l’Europe et des Affaires étrangères, Anne Marie Descôtes, a également donné lieu à plusieurs annonces. Ainsi le communiqué final évoque «… la redynamisation des différents mécanismes de coopération bilatérale, conformément à la Déclaration d’Alger pour un partenariat renouvelé (…)», une dynamique qui s’inscrit dans un «contexte particulier marqué par la préparation de la prochaine visite, en France, qu’effectuera, en mai prochain le président de la République, M. Abdelmadjid Tebboune (…)» ou encore la tenue dans les semaines à venir, du Comité mixte économique algéro-français (Comefa). Quant aux pistes de coopération, le même document, cité par l’APS, note que «l’ensemble des dimensions de la relation bilatérale, en particulier la dimension humaine» ont été abordées «avec un accent particulier sur les questions relatives à la mémoire et à la circulation des personnes, qui constituent de véritables marqueurs de cette relation».
Les deux parties ayant par ailleurs abordé «les questions d’actualité d’ordre régional et international d’intérêt commun dans leur voisinage immédiat (Sahara occidental, Sahel, Libye, conflit russo-ukrainien, etc.)» et «sont convenues enfin de poursuivre le dialogue et les échanges, ainsi que l’activation de l’ensemble des mécanismes de coopération institués par les autorités des deux pays». n