Tout le monde l’aurait oublié sauf les services de presse et de communication des Etats concernés : l’UMA a fêté hier son 28e anniversaire dans un anonymat et une indifférence que seuls les officiels et quelques chercheurs égarés à trouver les raisons de la grande panne maghrébine ont tenté de troubler.
Hier, et comme chaque année, des communiqués de félicitations ont fusé des capitales maghrébines, rappelant chacun « les espérances des peuples maghrébins à un édifice commun ».
La phrase est du président de la République Abdelaziz Bouteflika qui s’est adressé au souverain du Maroc Mohamed VI ainsi qu’au président tunisien, Beji Caid Essebsi, le président mauritanien, Mohamed Ould Abdelaziz, et le chef du gouvernement d’entente nationale de Libye, Fayez Al-Sarraj. Elle est à verser dans le rituel qui consiste pour le chef de l’Etat, selon un fin observateur, à ne pas rompre le cheveu de Mouawiyia, ce fil ténu qui relie l’Algérie aux autres Etats maghrébins, en particulier le Maroc qui considère que c’est l’Algérie, en raison de son soutien à la cause sahraouie, est le grand responsable de l’agonie. Le cheveu de Mouawiya consiste en une relation épistolaire du plus haut niveau pour défendre le Maghreb comme «enjeu stratégique », selon la déclaration du roi Mohamed VI dans sa lettre au président de la République et réitérer, cette année encore, l’attachement au traité fondateur de Marrakech. Mais, dans le fond, qu’en reste-il ? Des objectifs difficilement réalisables à court et moyen termes, mais pas uniquement en raison du dossier sahraoui et des entraves à une intégration maghrébine dont il est la source principale, selon les observateurs. Entre l’Algérie, la Tunisie et la Mauritanie, les échanges restent insignifiants par rapport aux potentialités même si l’on assiste depuis, crise oblige, à un regain d’intérêt pour l’espace maghrébin à Tunis et Nouakchott dont des opérateurs ont participé avec force, récemment, au forum africain d’investissement organisé par le Forum des chefs d’entreprise, FCE. Au réel, cependant, le bilan reste largement négatif. Mardi dernier, le secrétaire général du Conseil consultatif de l’UMA, Said Mokadem, a rappelé à Alger que «l’échange économique entre les pays du Maghreb représente à peine 1% de son commerce extérieur». Au même moment, a-t-il comparé, «l’échange économique dans la zone euro représente près de 70% de son commerce extérieur, et qu’en Asie, les échanges entre les pays de la même région représentent 64%», ce qui fait perdre 10 milliards dollars annuellement aux pays de l’UMA, a-t-il estimé. Optimiste, cependant, Said Mokaddem considère qu’une solution juridique et statutaire pourrait débloquer l’UMA : «L’Acte constitutif de l’UMA doit être revu intégralement sinon nous ne pourrons pas réaliser ses nobles objectifs. Nous avons besoin aujourd’hui de mettre en place de nouveaux mécanismes d’action permettant aux structures et institutions de l’Union d’accomplir leurs missions au profit des peuples de la région» a-t-il indiqué. Il a fait état de l’installation récemment de groupes de travail au niveau du secrétariat général de l’UMA pour présenter des nouvelles approches de réorganisation qui seront soumises aux Directions des pays de l’Union. Il a également appelé à l’activation de la proposition algérienne relative à la mise en place d’une zone de libre-échange commerciale entre les pays de l’Union pour accroître le taux des échanges commerciaux, en régression continue (-2% durant les dernières années). Selon M. Mokadem, ce faible taux d’échanges commerciaux engendre une perte annuelle de l’ordre de 100 milliards d’euros pour les pays de l’UMA, sans compter la perte de postes d’emploi et le ralentissement du rythme de croissance ; un constat juste et vérifié mais déjà très ancien pour qu’il serve d’aiguillon et sonne l’éveil maghrébin.