Par Sihem Bounabi
En dépit de l’interruption du réseau internet, en particulier sur le téléphone mobile et les réseaux sociaux, l’Education nationale, qui a pourtant multiplié les avertissements sur les risques de condamnation, déplore la découverte de plusieurs cas de fraude et l’arrestation des coupables et de leurs complices.
Les épreuves du Bac 2022, qui prennent fin aujourd’hui, enregistrent déjà plusieurs cas de fraude et des condamnations en série d’au moins une vingtaine de personnes prononcées par les juridictions compétentes suite aux procédures de comparution immédiate. La majorité des accusés ont été écroués pour «délit de diffusion de sujets d’examens et de corrigés types dû à la régularité et à la transparence des examens à travers la publication des sujets des épreuves du baccalauréat via les réseaux sociaux ».
Des faits punis conformément aux dispositions des articles 253 bis 6 et bis 7 du code pénal jusqu’à 3 ans de prison et des amendes pouvant aller jusqu’à 500 000 DA.
Le signalement des cas de fraude a débuté dès le premier jour des épreuves, le 12 juin dernier, avec six cas enregistrés dans la wilaya de Djelfa. Des cas se sont étendus au fils des jours et des épreuves dans les wilaya d’Adrar, d’Oum El Bouaghi, de Sétif, de Constantine, de Tébessa, de Chlef, de Khenchela, de Ghardaïa et la liste continue à s’allonger.
Ainsi malgré les importants moyens déployés par les autorités pour sécuriser le déroulement des épreuves, avec le blocage des réseaux sociaux et des applications de messagerie durant plusieurs heures de la journée, et plus intensément durant les horaires des épreuves, et les avertissements contre la fraude et ses lourdes conséquences, les fraudeurs continuent à sévir.
La persistance de la fraude malgré tous les moyens mis en place relance le débat sur la nécessité d’un véritable travail de fond pour sensibiliser les candidats, les enseignants et même les familles sur les peines encourues, mais également de s’interroger sur l’efficacité de couper le net et de paralyser des millions d’usagers et un pan de l’économie nationale.
Cascade de condamnations séance tenante
En attendant que de nouvelles dispositions soient mises en place pour lutter efficacement contre la fraude, la main de la justice a frappé. A Adrar, un individu inculpé pour diffusion de réponses du baccalauréat, notamment des matières d’anglais de la filière lettres et philosophie et des mathématiques de la filière sciences expérimentales a été condamné à 2 ans de prison ferme assortis d’une amande de 200 000 DA. Dans la même affaire, un deuxième individu a été poursuivi pour le même délit. Après sa comparution immédiate, l’audience a été reportée à la demande de l’accusé pour préparer sa défense. Il a été placé en détention provisoire.
A Oum El Bouaghi, c’est suite à la diffusion du sujet de l’épreuve des sciences islamiques de la filière gestion et économie sur l’application « Imo », qu’un autre individu a été condamné à un an de prison ferme avec emprisonnement séance tenante. L’application « Imo » a également été utilisée à Tébessa par une personne impliquée dans la diffusion du sujet de l’épreuve des sciences islamiques de toutes les filières. L’accusé a été condamné à 18 mois de prison ferme et une amende de 100 000 DA.
A Chlef, trois personnes ont été arrêtées pour fuite de sujets du baccalauréat sur les réseaux sociaux. Il s’agit du sujet des mathématiques, filière littérature et philosophie, avec certaines solutions aux problèmes posés et du sujet de l’examen d’anglais, filière sciences expérimentales. Un quatrième individu a été condamné à un an de prison ferme assortie d’une amende de 100 000 DA suite à la diffusion du sujet de langue arabe pendant le déroulement de l’examen via un groupe de réseau social.
A Constantine, trois individus ont été condamnés à des peines de prison de 18 mois à 3 ans et des amendes de 50 000 à 100 000 DA pour diffusion de sujets.
18 appareils Bluetooth « invisible » saisis à Khenchela
A Khenchela, quatre individus ont été condamnés à un an de prison ferme et une amende de 20 000 DA séance tenante et confiscations des saisies pour « début de diffusion de sujets de baccalauréat par l’usage de moyens de télécommunications et possession d’une marchandise étrangère de contrebande utilisée pour la fraude durant les examens ». Dans le cadre de cette même affaire, une personne a été interpellée par les services de la Sûreté de daïra d’Ouled Rechache après avoir été suspectée de faire la promotion sur les réseaux sociaux d’appareils sensibles interdits, utilisés en télécommunications via un « Bluetooth invisible ». La perquisition du domicile du suspect a permis la saisie de 18 appareils développés de télécommunications. Le Parquet a poursuivi le mis en cause pour possession d’une marchandise étrangère de contrebande à des fins commerciales, et conformément à l’article 324 alinéa 2 du Code des Douanes et de l’article 10 de la loi relative à la lutte contre la contrebande, il a été condamné à deux mois de prison avec sursis, confiscation des saisies et payement d’une amende 300 000 DA à l’administration des Douanes.
Par ailleurs, en plus des cas de fuites de sujets d’autres personnes ont été condamnées pour triche lors des épreuves du baccalauréat. Ainsi dans la wilaya de Sétif, deux personnes ont été placées en détention provisoire suite à un flagrant délit de triche où un candidat a été arrêté suite à la découverte d’un système Bluetooth inséré dans son oreille gauche. La personne concernée a été transférée au service d’oto-rhino-laryngologie (ORL) pour retirer l’appareil. L’ouverture d’une enquête a pu établir la complicité d’une deuxième personne qui a également été arrêtée et placée en détention provisoire.
Pour rappel, lors de la session du Bac 2021, 161 prévenus ont été poursuivis pour fraude dont 64 ont été condamnés à des peines de 6 mois à 3 ans de prison ferme, assorties d’amendes de 100 000 à 500 000 DA. n