En application de la loi de finances 2020, l’administration des impôts restreint le champ d’application de l’impôt forfaitaire sur le revenu (IFU), auquel étaient assujettis les commerçants et les professions libérales, comme les médecins, les dentistes, les avocats, les notaires, en vue d’accroître les recettes fiscales. Par cette mesure, le fisc élargit l’assiette des impôts au détriment d’une population de contribuables qui devra désormais payer davantage d’impôts. Plus précisément, suivant les nouvelles dispositions de la loi de finances 2020, les personnes morales, c’est-à-dire les sociétés, sont exclues du champ de l’IFU, cet impôt au forfait, à compter du 1er janvier 2020, indique un communiqué de la direction générale des impôts (DGI). Ils devront être imposés suivant le régime fiscal d’après le bénéfice réel. Par contre, les personnes physiques, c’est-à-dire les personnes, notamment les commerçants, dont le chiffre d’affaires annuel atteint 15 millions de dinars et moins, peuvent continuer à opter pour l’IFU. Ceux dont le chiffre d’affaires dépasse les 15 millions de dinars annuellement sont exclus du régime fiscal IFU. En clair, la loi de finances 2020 a révisé les dispositions de l’article 282 du code des impôts directs, relatif au seuil d’éligibilité à l’IFU, en le fixant à 15 millions de dinars au lieu de 30 millions de dinars. En 2019, les commerçants dont le chiffre annuel se situe entre plus de 15 millions de dinars et 30 millions de dinars annuellement pouvaient bénéficier de ce régime fiscal, dit au forfait. Ainsi, suivant cette révision du code des impôts directs, l’IFU s’applique uniquement aux personnes et non aux sociétés (Eurl, Sarl, SPA). Le communiqué de la DGI ajoute qu’à compter du premier janvier 2020, les contribuables exerçant des professions non commerciales sont exclus de l’IFU. Ils relèveront obligatoirement du régime d’imposition d’après le bénéfice réel.
Le communiqué cite cette catégorie de contribuables exclus de l’IFU : les professions libérales (notamment médecins, dentistes, avocats, notaires qui ont un cabinet) , les écrivains ou compositeurs, qui réalisent des recettes au titre des droits d’auteur, les inventeurs au titre de leurs produits, les importateurs dans la revente en état pas constitués en personnes morales, les concessionnaires, les cliniques et établissements privés de santé ainsi que les laboratoires d’analyses médicales, les restaurants, les hôtels, les affineurs et les recycleurs de métaux précieux, les marchands d’ouvrage d’or et de platine, les activités de BTPH, quel que soit le chiffre d’affaires généré par ces activités ou par cette catégorie de contribuables.
Du coup, toute cette population de contribuables perd les avantages fiscaux de l’IFU. En clair, les contribuables assujettis à l’IFU ne sont pas soumis à des impôts comme la taxe sur la valeur ajoutée (TVA) et la taxe sur l’activité professionnelle (TAP). Le communiqué précise que le régime fiscal applicable aux professions non commerciales comprend l’IRG/bénéfices non commerciaux au taux proportionnel de 26% libératoire d’impôt, la TAP au taux de 2% sur les recettes professionnelles et la TVA au taux de 9% ou 19%, en fonction de la profession exercée. Par ailleurs, la DGI informe que les dossiers des contribuables, gérés par les centres de proximité des impôts (CPI) ne remplissant plus les conditions d’éligibilité à l’IFU, seront transférés aux centres des impôts (CDI) territorialement compétents ou à défaut à l’Inspection des impôts compétente auprès de laquelle ils devront déclarer leurs impôts et s’acquitter de leur devoir fiscal. Pour l’année 2019, au titre de l’IFU et de l’IRG salaire relatif au quatrième trimestre 2019, les professions libérales inclues dans cette catégorie dite de bénéfices non commerciaux sont tenues, précise le communiqué, de les accomplir auprès de l’ancienne structure de rattachement (centre de proximité des impôts) ou à défaut par l’Inspection des impôts territorialement compétente. Les contribuables dans la catégorie précitée ne sont pas astreints à une comptabilité régulière mais à tenir un livre journal coté et paraphé par les services gestionnaires, retraçant le détail de leurs recettes et de leurs dépenses professionnelles.
Ces mesures héritées du gouvernement Bedoui vont sans doute susciter le mécontentement de cette population de contribuables qui devra, en 2020, voire en 2021, payer davantage d’impôts. Encore une fois, ce sont les catégories de contribuables qui paient leurs impôts régulièrement qui seront touchés par ces mesures. Cela crée une nouvelle injustice fiscale, d’autant que l’informel et certaines niches, comme l’immobilier et l’import-import échappent totalement ou partiellement à l’impôt.
Avec le déficit de moyens de contrôle enregistré chez le fisc, ces mesures vont sans doute entraîner une grande évasion fiscale. Ne dit-on que trop d’impôts tuent l’impôt.