En dépit des multiples interventions de la Banque d’Algérie pour libérer la liquidité et soutenir les banques qui devaient, à leur tour, aider les entreprises et l’économie, la tendance à la baisse s’est poursuivie et aggravée durant l’exercice écoulé, ce qui ce qui met le gouvernement face à un vrai dilemme, alors que les besoins de financements sont de plus en plus importants dans ce contexte de choc pandémique et de baisse des cours du brut. S’achemine-t-on à nouveau vers le recours à la planche à billets malgré son engagement de ne plus y recourir ?
Les dernières situations mensuelles publiées par la Banque d’Algérie pour les mois de septembres octobre et novembre confirment une baisse drastique de la liquidité globale des banques en 2020. La tendance à la baisse constatée au second semestre de 2019 s’est poursuivie et aggravée durant l’exercice écoulé, et ce, malgré les multiples interventions de la Banque d’Algérie destinées à libérer la liquidité et soutenir les banques qui devaient, à leur tour, aider les entreprises et l’économie. Ces interventions se sont avérées vaines. En effet, la liquidité globale des banques est repassée au-dessous de 500 milliards de dinars en septembre et à moins de 700 milliards de dinars en novembre. Plus précisément, la liquidité bancaire a chuté à 476 milliards de dinars en septembre avant de remonter légèrement en novembre pour s’établir à 612 milliards de dinars, lit-on dans les situations de la Banque d’Algérie pour le troisième trimestre de 2020. Un niveau qui n’était plus vu depuis quatre ans, soit depuis le troisième trimestre de 2017, période durant laquelle le gouvernement avait adopté la planche à billets en Conseil des ministres, soit le 6 septembre 2017 ; laquelle avait été adoptée par le Parlement un mois plus tard, soit en octobre 2017. Avec un tel niveau de liquidité, Ahmed Ouyahia, alors Premier ministre, racontait aux députés que l’Etat n’avait pas de quoi payer les salaires des fonctionnaires et qu’il fallait aller vers la politique de la planche à billets. Celle-ci a permis au gouvernement de renflouer les caisses de plusieurs institutions financières et non-financières. Ahmed Ouyahia racontait début 2018 que «le financement non conventionnel» a permis, entre autres, de sauver la BNA de la faillite et de renflouer les caisses de la CNR pour permettre aux pensionnaires de percevoir leurs retraites. La planche à billets a permis également aux banques de retrouver une situation de surliquidité qui, faut-il le rappeler, avait contraint la Banque d’Algérie de reprendre certains excédents pour éviter que des tensions inflationnistes ne ressurgissent. Preuve en est que le niveau global des liquidités est passé à 1 380,6 milliards de dinars à fin 2017, soit une croissance de 68,2% par rapport à son niveau de fin 2016 qui était de 821 milliards de dinars. Le niveau global de liquidités a ensuite augmenté à 1 557 milliards de dinars à décembre 2018, soit une année après l’adoption de la planche à billets comme moyen de financement. Il a ensuite grimpé à 1 705,5 milliards de dinars à août 2019 avant d’amorcer une nouvelle tendance baissière dès le second semestre de 2019.
En effet, la Banque d’Algérie a fait part à l’issue du 1er trimestre 2020 d’une contraction de 180 milliards de dinars de la liquidité bancaire à fin mai 2020 par rapport à la fin 2019, pour passer sous le seuil de 1.000 milliards de dinars. Dans un communiqué sur la situation économique durant le premier trimestre 2020 et les perspectives d’évolution, la Banque Centrale a précisé que «la liquidité globale des banques a poursuivi sa baisse en 2020, passant de 1.557,6 milliards de dinars à fin 2018, à 1.100,8 milliards de dinars à fin 2019, pour atteindre 916,7 milliards de dinars à fin mai 2020, soit une contraction de la liquidité bancaire de 184,2 milliards de dinars par rapport à son niveau enregistré à fin 2019». Cette contraction s’est poursuivie tout au long de 2020. En témoignent les situations mensuelles de la banque centrale pour septembre, octobre et novembre. La liquidité bancaire était de 612 milliards de dinars seulement à novembre, ce qui complique davantage l’équation budgétaire du gouvernement, pris en tenaille entre son engagement à ne plus faire appel à la planche à billets et l’impératif de renflouer à nouveau les caisses des banques pour pouvoir financer l’économie.
La situation n’est plus tenable au sein de certaines banques malgré les interventions de la Banque d’Algérie qui a baissé son taux des réserves obligatoires à trois reprises depuis mars 2020. Les banques étaient même dispensées de l’obligation de constituer des réserves de sécurité. La banque centrale a également baissé son taux directeur à 3,25%. Ses interventions n’ont pas réussi à enrayer la baisse drastique des liquidités, ce qui met le gouvernement face à un vrai dilemme, alors que les besoins de financements sont de plus en plus importants dans ce contexte de choc pandémique et de baisse des cours du brut. S’achemine-t-on à nouveau vers le recours à la planche à billets ? Probablement oui, en l’absence d’autres moyens de mobilisation des ressources.