PAR MERIEM KACI ET AZIZ LATRECHE
Les syndicats autonomes reviennent à la table des négociations qu’ils ont boudée depuis bientôt une année. La première rencontre s’est déroulée, hier, au siège du ministère de l’Education nationale entre le ministre de tutelle et les syndicats du corps enseignant, alors que les discussions étaient rompues entre l’Exécutif et son partenaire social au lendemain du déclenchement du mouvement populaire du 22 février 2019. Dès le 28 février déjà, avant même la démission du chef de l’Exécutif, Ahmed Ouyahia, et la mise en place du gouvernement Noureddine Bedoui, la Confédération des syndicats algériens (CSA), qui a décidé d’adhérer au Hirak, avait convenu sur la nécessité de remettre à plus tard la question des revendications socioprofessionnelles, en adhérant pleinement au mouvement de contestation. C’est dans ce sens que la CSA avait décidé de boycotter le gouvernement Bedoui, considéré «sans aucune légitimité ».
Ces syndicats avaient, dans ce sens, décliné en mars dernier une invitation au dialogue de l’ancien Premier ministre M. Bedoui, dans le cadre de la nouvelle stratégie du pouvoir pour une «sortie de la crise politique ». Treize organisations syndicales autonomes ont alors décliné l’invitation du Premier ministre pour prendre part aux séances de discussions qu’il a initiées dans le cadre de la feuille de route, décidée par le Président de la République, Abdelaziz Bouteflika, pour assurer une transition politique. La CSA, composée de syndicats dominant l’activité syndicale dans les trois secteurs clé de la fonction publique, notamment l’Education nationale, la Santé publique et enfin l’Enseignement supérieur et de la Recherche scientifique, a trois mois plus tard, soit au mois de juin, continué de rejeter le gouvernement conduit toujours par Bedoui. Cette organisation syndicale a, également, décliné l’invitation du ministère du Travail, de l’Emploi et de la Sécurité sociale à une rencontre de dialogue et de consultation jusqu’à ce qu’elle décide lundi dernier de renouer le dialogue avec l’Exécutif.
Cette fois, les organisations syndicales ont répondu favorablement à l’offre de concertation du nouveau ministre du secteur, qu’un syndicaliste préfère parler d’une rencontre de «prise de contact», dans le sens où il n’y avait pas d’ordre du jour précis. Signe d’une nouvelle ère, les syndicats du secteur ont pris part à cette réunion, à l’exception du Conseil des lycées d’Algérie (CLA) qui a décliné l’invitation. La première rencontre, qui s’est déroulée hier au siège du ministère de l’Education, serait-elle un prélude ou un premier pas en vue de déminer la contestation et la grogne sociale ? Les deux parties dans tous les cas «envisagent de se mettre ensemble pour trouver la solution concrète et pratique aux revendications du partenaire social », nous dit Abdelouahab Lamri Zegar, porte-parole de l’Unpef. Les différents changements sur la scène politique et au sommet des ministères ont conduit la CSA à « renouer » le contact avec le gouvernement Djerad. «Nous avons boudé le système en place depuis 10 mois. La donne politique a changé», ajoute notre interlocuteur. «Même s’il manque de «légitimité», Tebboune est reconnu par ses pairs et convié récemment par la chancelière allemande à un sommet sur la Libye», ajoute M. Zegar. Les revendications des syndicats autonomes ont été soulevées à maintes reprises avec les anciens gouvernements. Les mêmes seront remises sur la table du gouvernement et les différents départements ministériels. Pour sa part, le Conseil des lycées d’Algérie (CLA) a eu un avis différent par rapport au dialogue avec le gouvernement en place, en campant sur sa position de boycott de l’Exécutif. Une position qui n’affectera pas sa participation au fonctionnement de la CSA. «La Confédération croit à la démocratie et à l’autonomie d’un syndicat comme le nôtre», explique Zoubir Rouina le secrétaire général du CLA. Sur l’invitation du ministre de l’Education nationale, Zoubir Rouina dira : «On parle d’un dialogue, alors qu’en réalité, il s’agit d’une rencontre folklorique qui n’aboutira pas à régler les problèmes du secteur que le nouveau ministre ne pourra résoudre malgré ses compétences.» «C’est un premier contact, une rencontre protocolaire et il est quasiment impossible de parler des préoccupations de la base militante et de celles du secteur en un laps de temps et devant une quinzaine de syndicats du secteur», ajoute
M. Rouina. Ce dernier n’exclut pas toutefois de dialoguer avec la tutelle dans le cas où la discussion porterait sur «la scolarité, les stratégies adéquates pour aller vers une école de qualité et autres aspects pédagogiques portant sur la réforme et modernisation de l’école».