La pépinière d’El Hartoun, jouxtant le cimetière de Sidi Senouci, le stade de Birouana, l’hôtel les Zianides et le cimetière chrétien, fut créée sous l’Administration française. C’est un capitaine du Génie, Gustave Carpen, qui l’aménagea.

Des odeurs incomparables se dégageaient de ces lieux, où pour accéder au jardin, il fallait franchir l’oued de la Metchkana, enjambé par un joli petit pont aux garde-corps en béton, simili bois. On pouvait aussi y accéder par l’allée des Marronniers face à la MTO. Dans son livre « Tlemcen, Jardin d’Eden », Claude-Maurice Robert s’extasie devant « l’odeur amère et chaude des buis dans le soleil, la profusion des lauriers roses et blancs, la luxuriance des glaïeuls et des cannas, si turgescents, si hauts qu’ils m’arrivent aux épaules…». « Jardin d’Eden » pourrait s’appliquer à cette pépinière, selon Louis Abadie ; c’est un véritable paradis terrestre qui invitait à la découverte des senteurs, comme il émerveillait les yeux, comme le remarqua Charles Sallefranque : « Il y a un délicieux jardin qui jouxte le cyprès du grand cimetière mais nous le laissons aux lycéens qui viennent, l’été, y errer, un livre scolaire à la main, ou y bavarder ».

Pour notre part, nous ne pouvons omettre d’évoquer notre fréquentation de ce havre de paix à l’occasion des révisions pour passer le BEG (1968). Des lycéens y élisaient domicile pour réviser leurs cours en vue de l’examen du baccalauréat.

D’autres optaient pour la pinède ombragée de Birouana, toute proche, ou le jardin public jouxtant le grand Bassin (Sahridj Bedda) de Sidi Boudjemaâ, à côté du stade communal des 3 Frères Zerga. Avec comme « viatique » pédagogique, les guides Bordas (exercices avec corrigés) de maths notamment ; exit les cours particuliers qui étaient réservés à l’époque à une certaine classe privilégiée représentée par des élèves triés sur le volet, qui se prévalaient néanmoins d’un bon niveau en mathématiques, en l’occurrence. Il faut savoir que dans les années 1970, les précurseurs dans ce créneau prestataire en matière de cours en mathématiques à domicile, avaient pour nom les regrettés Mustapha Bouabdellah pour le lycée (Dr Benzerdjeb) et son alter égo Mounir Borsali (collège Jules Ferry)… En quête de beauté, de verdure, de fraîcheur, les familles tlemcéniennes, après s’être désaltérées à la buvette de M. Blin ouverte en 1926 dans son chalet, visitaient les différents coins et recoins de la pépinière. C’est Hadj Dib qui était chargé de l’entretien (jardinage) et du gardiennage de ce jardin.
Aujourd’hui, des commerces (restaurant Ambiance, rôtisserie, alimentation…) nés du phénomène de l’urbanisation, dont les enseignes sont dédiées à « La Pépinière », gravitent tout autour, à la faveur du microclimat des lieux. Alors que ce jardin public mythique garde depuis un bail ses portes closes, au grand dam des promeneurs et des amateurs de la nature et autres adeptes de l’horticulture.E. H. T.