Les systèmes de production agricole en place ne peuvent plus répondre aux besoins futurs en termes d’offres agricoles.

Par Bouzid Chalabi
La question fondamentale de la souveraineté alimentaire du pays était au cœur d’un débat, organisé hier à Alger par la Confédération algérienne du patronat citoyen (CAPC), où à la même occasion une étude a été présentée sous l’intitulée «De la sécurité à la souveraineté alimentaire». Laquelle a retenu l’attention du riche parterre de participants par l’extrême clairvoyance de cette analyse.
Cette étude, menée et présentée à l’occasion par le Professeur d’économie agricole à l’Institut agronomique méditerranéen de Montpellier (France) Omar Bessaoud, a entre autres mis à nu les incohérences de la politique agricole du pays, menée jusqu’ici. A ce propos, le professeur dira : «Des correctifs s’imposent d’urgence si nous voulons rééquilibrer une balance commerciale agricole structurellement déficitaire. Et pour ce faire, il s’agira d’améliorer les capacités internes de production dans la durée, notamment dans les filières stratégiques que sont les céréales, le lait, la pomme de terre et les légumineuses». Et sur lesquelles Omar Bessaoud s’est attardée une à une car, selon lui, c’est dans ces matières premières que la facture d’importation pèse très lourd sur le budget de l’Etat.

Tension sur les produits agricoles de base
Pour l’auteur de l’étude, au sujet des incertitudes pesant sur la géopolitique mondiale «il faudra s’attendre sur le court et moyen termes à des tensions sur les marchés mondiaux des denrées alimentaires de base avec une hausse des produits de base». Autre donnée énoncée par le conférencier, «la crise liée à la guerre en Ukraine est venue accentuer une tendance à la hausse des prix qui étaient en cours». En somme, d’après Bessaoud, «l’Algérie paiera à l’avenir plus cher ses importations alimentaires». Il s’agira donc pour lui, «si l’on veut que notre facture ne soit pas trop salée, au point de mettre à rude épreuve les capacités financières du pays pour assurer les besoins des importations, de réduire le déficit des productions stratégiques citées ci-dessus». Par quels moyens ? Pour le professeur, «il faudra renforcer les bases productives», pour cela, il appelle à conforter les fondements d’une politique agricole «visant à assurer une production suffisante au niveau national et par là même garantir la durabilité de la production agricole».

De la sécurité à la souveraineté alimentaire
Il a insisté, par ailleurs, «sur l’impératif de garantir aux populations la disponibilité de l’offre alimentaire, notamment du blé dur, du lait et de la pomme de terre, étant donné qu’ils constituent les véritables bases de la souveraineté alimentaire du pays». Dans ce même registre, il a expliqué que «pour garantir l’offre, il va falloir définir un nouveau paradigme technique agricole». Préconisant pour l’avenir également de recentrer le système agro-alimentaire national. C’est-à-dire de «l’articuler plus étroitement au système productif national afin de réduire sa vulnérabilité aux aléas des marchés extérieurs».
Pour clore ce chapitre, Bessaoud a énoncé 10 objectifs résolument orientés «vers la conquête de la sécurité alimentaire durable et d’une souveraineté alimentaire à moyen et long termes», avant d’énumérer une à une ces recommandations. Au registre des achats des produits de base alimentaires sur les marchés extérieurs, l’auteur de l’étude a évoqué «l’intérêt de mettre en place des stratégies commerciales plus performantes et perfectionner nos capacités de négociation». Citant en exemple le cas de l’Office algérien interprofessionnel des céréales (OAIC) «qui ne peut plus rester sous le même mode opératoire. Il est donc appelé à opérer des changements radicaux dans son activité».
En guise de conclusion de son étude, Bessaoud a souligné que «la question relative à la sécurité alimentaire ne peut être en définitive résolue dans le cadre strict de l’agriculture. Cela implique d’autres secteurs et surtout d’envisager un changement de paradigme économique et technique».