Si l’importance de la digitalisation de l’économie nationale n’est plus à démontrer, cet outil hautement stratégique tarde à être généralisé chez nous. «On est encore au stade du balbutiement au moment où l’accélération de sa mise en œuvre est de plus en plus impérative», a défendu Souhil Guessoum, président du Syndicat national du partenariat citoyen du numérique.
Par Bouzid Chalabi
L’intervention de cet opérateur et associatif a eu lieu, hier, à l’occasion de la tenue au Centre international des conférences d’Alger (CIC) de la Première édition de «Algeria Digital Conférence» sous le thème «Le numérique, levier de croissance et de compétitivité». Un événement organisé conjointement par la Confédération algérienne du patronat citoyen (CAPC) et le Syndicat national du partenariat citoyen du numérique (SNPCN) pour faire le point sur une activité considérée comme indispensable pour la modernisation de l’entreprise et l’outil économique algériens. Et qui est surtout éligible, comme partout dans le monde où elle est devenue une réalité, pour construire un système technologique et entrepreneurial propre et générer de la ressource et une richesse considérable.
Sauf qu’en Algérie, le constat des opérateurs concernés est plutôt mitigé malgré l’engagement du gouvernement à promouvoir le secteur et à l’encadrer, comme aujourd’hui, à travers deux départements ministériels, celui de la numérisation et des statiques et celui chargé des start-ups. Dès sa prise de parole, Souhil Guessoum s’est interrogé «sommes-nous pour cette technologie ?» «Des barrières persistent encore pour aller de l’avant», a-t-il déploré, mettant en cause plusieurs «entraves» dont la «bureaucratie» et «la loi sur la monnaie et le crédit» qui empêchent, selon lui, les professionnels du secteur à se déployer à l’international et à tisser des relations d’entreprise permettant des avantages technologiques et économiques pour l’écosystème algérien en cours de construction. «En termes de préparation à cette technologie, nous ne sommes pas encore prêts et beaucoup de travail reste à faire», a-t-il résumé, avant de lancer que «si nous voulons aller plus vite, il nous faudra impérativement libérer le secteur des contraintes auxquelles il fait face». Il s’agira de mettre fin en priorité à «l’exigence d’obtenir une kyrielle d’autorisations et d’agréments pour pouvoir mettre en œuvre des applications technologiques dont l’efficience sur le plan macroéconomique ne souffre d’aucun doute», a dit l’intervenant qui s’est ensuite consacré à expliquer les avantages de la généralisation du digital pour le pays. Un de ceux-là, a-t-il expliqué, est d’avoir à disposition un système d’informations fiable dans un champ économique où la statistique fiable fait défaut. Il faut s’attaquer avec efficacité au «fléau» de l’informel ainsi qu’à celui de la fraude, un problème qui va se poser lorsque le gouvernement passera à la subvention ciblée. «La digitalisation est le moyen tout indiqué pour parvenir à drainer une grosse partie des colossales sommes qui circulent en dehors du circuit officiel», a-t-il encore plaidé en ce qui concerne la nécessaire bancarisation de la ressource hors circuits formels. «Le challenge reste qualitatif, il est aussi d’arriver à satisfaire les citoyens dans leurs besoins de commodités dont seuls les IT peuvent les assurer pour peu que l’ensemble des organismes soient interconnectés», a-t-il encore affirmé. «L’interconnexion n’est pas une affaire d’infrastructures mais, avant tout, une affaire de bon vouloir politique pour accélérer la digitalisation», a-t-il de nouveau lancé devant un parterre d’institutionnels présents au débat.
De son côté, le ministre de la Numérisation et des Statistiques, Hocine Cherhabil, s’est montré lui aussi critique : «On ne compte plus le nombre de séminaires et de débats télévisés sur le thème de la digitalisation et la numérisation organisé jusqu’ici, sans parler de ces centaines d’écrits sur le sujet, mais sur le terrain, l’essor n’est pas encore au rendez-vous. Pourquoi ? Une question qui mérite réponse, le temps presse car les IT sont en constante évolution et, du coup, prendre le train en marche relève de l’indispensable.»
Notons que le patron de la CAPC, Sami Agli, a aussi pris la parole à l’ouverture de la conférence : «C’est grâce à la numérisation que les performances dans toutes les activités humaines se sont multipliées. De ce fait, son intégration dans les diverses stratégies sectorielles est désormais critique pour un développement rapide de notre système socio-économique.» Comme il a souligné que «le développement de l’économie numérique véhicule des enjeux importants pour notre pays. Tous autant que nous sommes, organisations patronales et entreprises, nous devons nous engager à relever le défi». Sami Agli a enfin rappelé à l’assistance : «Nous accordons une attention particulière aux recommandations qui seront formulées à l’issue de cette rencontre, que nous soumettons, à titre de contribution, aux instances et parties concernées pour la mise en œuvre de la stratégie du développement du numérique en Algérie.»
A propos de recommandations, les ateliers thématiques constitués lors de cette conférence se sont penchés sur les voies et moyens à mettre en œuvre pour permettre au secteur de la numérisation de connaître un dynamisme certain et pérenne, car c’est là tout l’enjeu à venir.