Alors que les professionnels de la Santé s’attendaient au versement imminent de leur prime Covid, une note ministérielle envoyé le 7 août dernier aux directeurs de la santé et des établissements hospitaliers risque d’empoisonner le climat déjà tendu entre le ministère
de la Santé et ses partenaires sociaux. Le document relatif au budget supplémentaire pour la prise en charge du versement de la 7e tranche de la prime Covid-19 spécifie que cette indemnité n’est désormais attribuée qu’au « personnel réellement exposé au danger ».
Une formulation qui met en courroux les syndicats des personnels soignants.
Par Sihem Bounabi
En effet, la colère des professionnels de la santé n’a pas tardé à se manifester suite à cette correspondance officielle qui exige des responsables chargés de sélectionner la liste des bénéficiaires de «veiller à l’attribution de cette prime exceptionnelle dédiée à la Covid-19 au profit du personnel réellement exposé au danger». Le président du Syndicat national des praticiens de la santé publique (SNPSP) Lyes Merabet a dénoncé cette note estimant que cette exigence du ministre de la Santé est une «entrave» au décret présidentiel qui octroie la prime Covid à «tous les professionnels de la santé» qui étaient tous au premier rang de la lutte contre la pandémie de la Covid-19. Il est à noter que le conditionnement du versement de la prime Covid selon les critères d’une exposition réelle au danger avait déjà été annoncé d’une manière indirecte par le ministre de la Santé à la fin du mois de juillet dernier, lorsqu’il avait justifié le retard du versement de la prime du fait qu’il y avait beaucoup d’indus bénéficiaires. Interpellés sur le cumul du retard du versement de la prime Covid qui comptabilise plus de dix mois, puisque la 10e tranche aurait dû être déjà versée, le ministre avait répliqué, comme pour justifier ce retard, que «les listes obtenues par le ministère de la Santé comprennent des noms de personnes qui n’ont pas jamais approché les unités Covid». Il avait également indiqué qu’«il y avait également des listes d’hôpitaux qui n’ont pas d’unités Covid et dont le personnel a bénéficié de cette prime», estimant qu’il «est inacceptable de verser la prime à des indus bénéficiaires». Le ministre avait enfoncé le clou en mettant en exergue le lourd poids de l’enveloppe financière consacrée au versement de cette prime Covid soulignant que «le budget consacré à la prime Covid pourrait contribuer à construire deux hôpitaux». Une déclaration jugée méprisante envers les professionnels de la santé qui avait fait réagir le SNPSP dès le lendemain. Il a dénoncé dans une conférence de presse le mépris du ministre de la Santé qui avait rompu tout dialogue avec la majorité des syndicats de la santé publique. Le président du SNPSP, Dr Lyes Merabet, avait ainsi déclaré que « même s’il y a des indus bénéficiaires de la prime Covid cela concerne la responsabilité de son administration et non pas celle des professionnels de la santé qui étaient en première ligne de la lutte contre la pandémie et qui n’ont toujours pas touché la prime depuis près de dix mois». Il avait tenu à rappeler que plus de 453 professionnels de la santé sont décédés des suites de complications de la contamination au Covid sur leur lieu de travail et des dizaines de milliers avaient été contaminés dont certains gardent des séquelles de la maladie à ce jour. Le président du SNPSP avait insisté sur le fait que «tous ceux qui ont travaillé dans les structures de santé, que ce soit au niveau des urgences, des consultations, du circuit hospitalier, sont concernés par la prime Covid telle que décrété par le président de la République». Afin de trouver une solution pérenne au cumul des retards dans le versement de la prime Covid, dès les premiers retards enregistrés, les syndicats avaient à maintes reprises appelé à inclure la prime Covid dans la prime de contagion comme cela s’est fait dans la majorité des pays afin de contourner les lourdeurs administratives. Par ailleurs, les autres mesures du dossier Covid décidées par le président de la République Abdelmadjid Tebboune au profit des professionnels de la santé, à l’instar de l’assurance globale à 100%, de la bonification de la retraite et du versement du capital décès aux familles des professionnels de la santé endeuillées, n’ont toujours pas été appliquées sur le terrain, deux années après les instructions données par le président de la République. n