Certes le taux de participation au référendum était l’un des plus faibles de tous les temps, mais le projet passe quand même et la commission Laraba vient de réussir à confectionner l’une des pièces maîtresses importantes du 1er mandat d’Abdelmadjid Tebboune.

L’affiche qui opposait le oui et le non à la nouvelle Constitution proposée par la commission Laraba pourrait n’être qu’une simple réédition de l’élection du 12 décembre dernier où le oui au changement a été plébiscité dans des circonstances peu habituelles. Ce fut le cas aussi avec ce scrutin référendaire où le oui l’a emporté également dans des conditions peu ordinaires. La campagne référendaire et le scrutin se sont déroulés, certes sans gros incidents, mais dans un contexte de crise sanitaire sans précédent. N’empêche, malgré les risques d’une diffusion à grande échelle du Covid-19 que faisait peser la campagne, pas moins de 1290 rassemblements et meetings ont été organisés durant la période réglementaire précédant le scrutin. Au bout de plusieurs jours de campagne, animée essentiellement par des représentants de la société civile et des ministres du gouvernement Djerad, le projet cher au président Tebboune, dont l’élaboration était attribuée à la commission Laraba, se voit enfin accorder l’essentiel des voix exprimées dimanche, jour de vote. Le projet a été plébiscité avec un score de 66,80% des voix. Certes le taux de participation au référendum était l’un des plus faibles de tous les temps, mais le projet passe quand même et la commission Laraba vient de réussir à confectionner l’une des pièces maitresses importantes du 1er mandat d’Abdelmadjid Tebboune. Ainsi, la commission Laraba, évacuée désormais des débats autour des résultats du référendum, vient de mettre sur pied l’un des piliers de la future gouvernance du chef de l’Etat. La même commission est appelée à confectionner d’ailleurs la nouvelle loi sur les partis politiques. Autrement dit, la commission Laraba s’est vue collée la mission de, officiellement, relooker la réglementation régissant les organisations politiques et, officieusement, pousser vers la reconfiguration d’un paysage politique algérien qui s’est singulièrement figé autour des partis traditionnels, ce qui ne simplifie pas le travail politique du chef de l’Etat qui, lui-même, disait qu’il a été plutôt élu par la société civile. Une façon à lui de disqualifier et de se démarquer des soutiens traditionnels du régime, à savoir le FLN, le RND, RAJ… dont les secrétaires généraux ont été mêlés à des affaires de corruption. C’est dire que la commission Laraba, la grande oubliée de cette course référendaire, qui s’est soldée par un oui à la Constitution, restera au centre des enjeux autour des clés de gouvernance politique. D’ailleurs, les résultats du scrutin de dimanche suggèrent d’ailleurs la nécessité d’aller vers une reconfiguration du paysage politique, tant il est vrai que les animateurs de la campagne référendaire parmi les soutiens traditionnels du régime semblent avoir échoué dans ce premier examen qui consiste à fédérer les Algériens autour du projet de nouvelle Constitution. Ces partis incarnent sans ambiguïté une ligne pro-régime, mais dont le rejet par la société explique, en partie, la faiblesse du taux de participation au dernier scrutin de dimanche. D’où l’impératif de trouver l’équilibre politique dont le chef de l’Etat a besoin dans un pays et une société politique fragilisés et atomisés à l’extrême. D’autant plus que le dernier scrutin vient de confirmer la versatilité du courant islamique qui n’a pas hésité à afficher son opposition au projet de nouvelle Constitution. Sans l’ombre d’un doute, les partis de la mouvance islamistes pèsent pour l’essentiel dans les 33,20% de rejet de la nouvelle constitution, ce qui témoigne bon gré, mal gré, du poids réel des islamistes dans l’échiquier politique algérien. De toute façon, ce chiffre, reflétant le poids des islamistes dans le paysage politique, comptera beaucoup dans les futurs joutes électorales, d’autant plus que peu d’études et/ou de sondages ont été effectués ces dernières années pour connaitre le poids réel des islamistes depuis le grand bouleversement du début des années 1990 lorsque, contre toute attente, le FIS a marqué les esprits après avoir raflé la mise lors des élections législatives de 1991.
Pour les 66,80% de oui, puisés essentiellement dans le réservoir de la société civile, qui semble-t-il est acquise aux projets du chef de l’Etat, il va falloir désormais les faire fondre dans les nouvelles formations politiques qui seront issues de la nouvelle loi sur les partis version Laraba pour qu’ils puissent servir d’une assise politique au chef de l’Etat. En tout cas, le président de l’ANIE, Mohamed Charfi, a attribué, hier, le « succès » du référendum à la mobilisation de la société civile qu’Abdelmadjid Tebboune n’a cessé de vanter depuis son arrivée au pouvoir et à laquelle il est promis un avenir politique au-delà de sa vocation et une ambition de basculer pour une partie dans la société politique. n