Délivrance et soulagement. Le journaliste Mohamed Mouloudj et ses co-accusés ont été libérés dans la soirée de mardi au grand bonheur de leurs familles suite au verdict prononcé par le Parquet du tribunal de Dar El Beïda.
PAR NAZIM BRAHIMI
Le Parquet a prononcé une peine de 2 ans de prison dont une année ferme contre le journaliste qui a passé sa peine en détention préventive. L’acquittement a été également prononcé par la même juridiction pour El Hadi Lassouli, Fatiha Briki, Sara Ladoul, Mehenna Abdesselam, Mohamed Yagouni, Zahir Bouguermouh, Nawel Laib et tous ceux qui ont comparu libres, dans une autre affaire dont le nombre d’accusés est estimé à près de 60, selon le Comité national pour la libération des détenus ( CNLD)
En ce qui concerne l’affaire où figurait le journaliste Mohamed Mouloudj, ce dernier et ses co-accusés ont été poursuivis, entre autres chefs d’inculpation retenus contre eux, pour «appartenance à une organisation terroriste». La charge d’appartenance à organisation terroriste a été abandonnée, alors que l’atteinte à la sûreté de l’Etat pour des publications sur les réseaux sociaux a été maintenue.
Il s’agit de Taleb Jugurtha, Ali Mimoun, Zahir Djemai, Boudjemaâ Malek, Abdennour Saïdi, Rezki Oulhadj et Hanafi Ould-Mohand, qui ont retrouvé leur liberté après des mois de détention provisoire.
Pourtant, le Parquet algérois avait jeté un froid sur les accusés, leurs familles et les avocats, estomaqués par les lourdes peines du réquisitoire allant de 10 à 15 ans de prison ferme. Le requis a donné du pain sur la planche au collectif d’avocats qui ont pu déconstruire les griefs retenus contre les accusés, critiquant notamment l’article 87-bis, introduit dans le Code pénal.
L’avocat Noureddine Ahmine a relevé, dans ce sens, que «des irrégularités et violations graves des libertés «sont à déplorer, estimant que l’article 87 bis a été amendé le 08 juin 2022 et dans son alinéa 13, il stipule qu’il y aura une commission de classement des personnes et des organisations terroristes qui va être créée.
L’avocat s’est demandé comment peut-on arrêter des gens et les accuser d’appartenance à des organisations terroristes avant leur création. Comment accuser des gens de terrorisme sur des faits qui se sont déroulés avant la publication des décrets ? s’est interrogé l’avocat, qui a noté que la Constitution de 2020 stipule en son article 34 que «les dispositions constitutionnelles ayant trait aux droits fondamentaux, aux libertés publiques et aux garanties s’imposent à l’ensemble des pouvoirs et institutions publics».
Maître Ahmine a relevé qu’aucune «restriction aux droits, aux libertés et aux garanties ne peut intervenir que par une loi et pour des motifs liés au maintien de l’ordre public, de la sécurité, et de la protection des constantes nationales ainsi que ceux nécessaires à la sauvegarde d’autres droits et libertés protégés par la Constitution ».
En tout état de cause, «ces restrictions ne peuvent porter atteinte à l’essence de ces droits et libertés «. Le texte précise aussi qu’»afin de garantir la sécurité juridique, l’Etat veille, dans la mise en œuvre de la législation relative aux droits et libertés, à assurer son accessibilité, sa lisibilité et sa stabilité», a-t-il dit.
Pour sa part, maître Hakim Saheb a défendu la thèse que le procès «est politique», considérant qu’il y a «un point de droit auquel il faudrait impérativement répondre.
«Quels sont les faits de terrorisme ? Comment arrêter et poursuivre ces personnes avec un texte publié le 18 mai 2021 alors que les faits présumés remontent à des années auparavant», s’est encore interrogé l’avocat, soulignant que «la loi ne peut pas avoir d’effet rétroactif».
Dans l’autre affaire où sont poursuivies une cinquantaine de personnes, dont les universitaires Fatiha Briki, Mehenna Abdeslam et l’activiste El Hadi Lassouli, les peines retenues ont permis de déclarer l’acquittement des accusés. La période de certains verdicts ont été d’ailleurs couverts par la durée de la détention provisoire, ce qui a permis aux concernés de retrouver leur liberté.
Le CNLD a souligné, à ce propos, que huit prévenus étaient en détention depuis avril 2021 et les autres en liberté provisoire.
Le juge a prononcé des condamnations à une année de prison ferme à l’encontre de Mohamed Belkadi, Farid Hamel, Mohamed Smala et Ali Chachou. Les quatre sont néanmoins libres pour avoir purgé leur peine. Tous les autres prévenus, dont les deux enseignants universitaires, ont été relaxés, a-t-on précisé. <