Le nouveau coronavirus apparu en Chine a fait à ce jour 17 morts et contaminé des centaines de personnes, selon un dernier bilan, dont l’annonce relance les craintes de propagation alors que l’OMS pourrait décréter une «urgence internationale».
Aéroport Mohamed-Boudiaf, Constantine. Il est 16h passé. Le flot de voyageurs débarquant d’Istanbul par Turkish Airlines est habituel. Peu de touristes, beaucoup de trabendistes, et très peu d’étrangers. Il y en a quand même deux. Les contrôles se font à la va-vite, sans rien relever de particulier. Nous avons voulu vérifier si des dispositions spéciales avaient été prises pour contrôler des passagers susceptibles de «transporter» dans leurs bagages le nouveau virus apparu en Chine. Non, ce n’était pas possible.
Il faut savoir que ce néovirus est un coronavirus, c’est-à-dire un concentré de virus divers, qui peut provoquer chez l’homme un simple rhume, comme il peut se révéler fatal. Et il l’a été à 17 reprises depuis son apparition, il y a tout juste un mois, en Chine, plus précisément dans la petite ville de Wuhan, 11 millions d’habitants quand même. L’OMS n’a jusqu’ici utilisé le terme d’urgence internationale que pour de rares cas d’épidémies réclamant une réaction mondiale forte, dont la grippe, affublée à tort de porcine, le H1N1 en 2009, le virus Zika en 2016, au Brésil, et la fièvre Ebola au Congo, qui a ravagé une partie de l’Afrique de l’Ouest de 2014 à 2016 et la RDC depuis 2018. Pour le moment, son origine exacte et la période d’incubation restent inconnues.
A l’aéroport Boudiaf, nous contactons le Dr Karima Cherifi, médecin sur place. Elle vient de terminer justement le vol d’Istanbul, «où il n’y a rien de spécial». A notre question si des instructions ont été données pour contenir des cas suspects du nouveau virus, la réponse a été «non». «Nous n’avons rien reçu, du moins jusqu’à aujourd’hui, j’ai entendu parler du virus comme tout le monde à la télévision, mais à l’aéroport, les contrôles sont toujours routiniers».
Pourtant, et à notre connaissance, l’aéroport de Constantine, comme tous ceux d’Algérie qui reçoivent des vols internationaux, ont été pourvus d’appareils détecteurs de température corporelle depuis l’épidémie de SRAS, syndrome respiratoire aigu sévère, apparu lui aussi en Chine et qui avait fait 774 morts à travers le monde, mais surtout au pays de l’Empire du milieu.
En attente d’instructions…
Nous nous déplaçons à la direction de la santé de Constantine où, bizarrement, personne n’a entendu parler du virus, c’est tout juste si un responsable nous a expliqué qu’ils attendent… des instructions du ministère. Un ministère de la Santé que nous essayons de joindre au téléphone, le Dr Fourar, spécialement, qui avait l’habitude d’être plus réceptif à nos appels téléphoniques. Il ne décroche pas malgré notre insistance, appuyée par un SMS explicatif.
Nous essayons un autre canal au même ministère, qui nous assurera, tout en demandant de rester dans l’anonymat, que «pour le moment nous n’avons pas évoqué ce cas spécialement, le ministre vient juste de défaire ses bagages après son installation, mais je crois que la semaine prochaine, on va s’y atteler».
En attendant, la nouvelle souche de la famille du coronavirus voyage. Elle ne connaît pas de frontières et s’est déjà manifestée dans plusieurs pays, Japon, Corée du Sud, Thaïlande, Taïwan, Etats-Unis, et a infecté 440 personnes, uniquement celles recensés, bien sûr.
C’est dire que le virus a déjà traversé l’océan pour atterrir sur un autre continent.
Le virus, qui se communique par les voies respiratoires, pourrait facilement muter et se répandre plus aisément, au moment où des centaines de millions de Chinois voyagent à travers le pays pour se retrouver en famille à l’occasion des congés du Nouvel an lunaire, qui débutent vendredi prochain.
De son côté, l’OMS intervient au moment où un comité ad hoc de l’Organisation se réunit à Genève pour déterminer s’il convient de décréter une «urgence de santé publique de portée internationale». Chose que reconnaît, cette fois, la Chine qui se déclare prête à une collaboration très poussée avec tous les organismes de santé, pour essayer de contrer ce virus que l’on suspecte issu de gibiers vendus librement sur les marchés de Wuhan, mais rien n’est moins sûr.
L’Algérie, qui enregistre un mouvement important de la communauté chinoise, des voyages à répétition de plusieurs hommes d’affaires et commerçants algériens, sachant que la moitié des provinces chinoises sont touchées, des touristes, toujours algériens, qui se rendent régulièrement à Dubai, la Malaisie, pour ne citer que ces pays voisins de la Chine, devrait quand même s’inquiéter et pourrait recevoir de plein fouet un virus non encore idéalement confondu. Un virus, et comme tous les virus, qui ne connaît pas de frontières… L’Algérie est-elle à l’abri ?