Karim Younès est médiateur de la République. Il a été installé hier dans ses nouvelles fonctions par le Président de la République, qui lui a confié une charge qui le fait revenir indirectement à son rôle de parlementaire et d’ancien chef de l’Assemblée populaire nationale (APN) entre 2002 et 2004.
Si l’on tient compte des expériences des pays où il existe des médiateurs de la République, il est celui qui, à la tête d’une haute instance indépendante, est chargé de défendre les droits des citoyens et faciliter leur relation avec l’administration. C’est, en quelque sorte, et pour expliquer la correspondance indirecte avec le parlementarisme, un défenseur des droits et le trait d’union entre le citoyen et les institutions ainsi que les organisations auxquelles il a affaire dans sa vie de tous les jours. Une charge d’ombudsman, comme on dit dans les pays anglo-saxons, et qui semble correspondre au profil de M. Younès, homme du sérail, mais aussi homme de conciliation, qui a essayé durant la période du 22 février au 12 décembre 2019 de jouer les «gobetween» entre les autorités et le Hirak, avant que les premières ne décident d’appliquer leur agenda post-Bouteflika et d’aller à la présidentielle qui a vu l’élection du président de la République Abdelmadjid Tebboune. De cette période, on gardera de Karim Younès le souvenir d’un homme qui a tenté de défendre les détenus d’opinion, parlant des porteurs du drapeau amazigh comme les porteurs de «nos couleurs nationales». A l’époque, notamment quand il faisait partie des 13 personnalités choisies par le Forum de la société civile pour le changement, il appelait à «la libération des détenus pour délit d’opinion et la fin de la répression violente des manifestants et des médias». A la tête de l’Instance nationale de dialogue et de concertation, qu’on a désigné du vocable de«panel» également, il a cherché à jouer à fond la carte de l’homme du rapprochement jusqu’à tenter la démission début août 2019, avant qu’il ne change d’avis sous la pression des membres du panel, disait-on à la fin de l’été dernier. L’adoption en septembre par le Parlement d’une loi organique portant création d’une haute autorité électorale que préside l’ancien garde des Sceaux Mohamed Charfi finira par entraîner le retrait de M. Younès qui ne fera plus parler de lui officiellement jusqu’à hier. Jour de son intronisation par le chef de l’Etat pour une mission qui rappelle aux Algériens celle qu’avait, durant le milieu des années 1990, l’ancienne figure du combat anticolonial Abdeslam Habbachi, qui a été le premier médiateur de la République sous le règne de l’ancien président Lamine Zeroual, entre 1996 et 1999, année à laquelle le président déchu Abdelaziz Bouteflika a décidé de supprimer cette fonction. D’après les premières déclarations du nouveau médiateur, M. Younès aura la charge classique de l’ombudsman, rattaché directement aux services de la présidence de la République.
Dans sa déclaration aux médias, hier, il a indiqué que l’instance qu’il préside veillera au respect des droits des citoyens par les institutions de l’Etat et les collectivités locales et à l’amélioration du service public. «Le Président de la République m’a chargé d’une mission sensible en me nommant médiateur de la République. Je suis conscient du poids et de la dimension de cette mission», a-t-il dit au terme de l’audience que lui a accordée le Président de la République. Pour M. Karim Younes, la création de l’instance «médiateur de la République, en tant que nouveau mécanisme de régulation et d’organisation de l’Etat, s’impose de par son rôle et sa fonction de médiation et de recours pour les citoyens en matière de respect des droits et libertés par les administrations, les institutions de l’Etat, les Collectivités locales, les Etablissements publics et toute instance assurant le Service public». «Tout citoyen peut recourir au médiateur de la République s’il considère que l’un de ses droits a été bafoué ou même pour alerter sur une urgence, dans le cadre de la loi», a-t-il ajouté. Karim Younes a précisé que hormis les questions liées à la sécurité de l’Etat, à la Défense nationale et à la politique extérieure, le médiateur de la République peut recueillir toutes les informations qu’il juge nécessaires dans toute affaire portée devant lui.