Vingt-deux missiles balistiques ont été tirés par l’Iran dans la nuit du mardi à mercredi sur des bases abritant des soldats américains en Irak. Le tir de ces missiles qui a duré une demi-heure a ciblé deux installations Aïn al-Assad dans l’ouest irakien et Erbil dans le nord où sont cantonnés des militaires étrangers, en majorité des Américains. Il a été effectué à l’heure exacte où un tir de drone américain tuait le général iranien Qassem Soleimani à Bagdad cinq jours plus tôt.
Synthèse de Anis Remane
Sans faire de victimes, ce tir constitue la première réponse de Téhéran à l’assassinat de son chef militaire, considéré comme l’architecte de sa stratégie au Moyen-Orient selon des observateurs occidentaux. D’autres opérations contre des cibles américaines sont cependant à prévoir dans les prochaines semaines, tant le scénario d’une escalade entre l’Iran et les Etats-Unis est considéré comme pratiquement acté.
«Nous ne cherchons pas l’escalade ou la guerre», a assuré Mohammad Javad Zarif, le chef de la diplomatie iranienne, expliquant que les représailles « proportionnées » de la nuit étaient « terminées ». Un expert présenté par l’AFP comme un spécialiste des groupes chiites armés, Phillip Smyth, affirme toutefois que des « missiles balistiques ouvertement lancés depuis l’Iran sur des cibles américaines marquent une nouvelle phase ». L’Iran « a envoyé une réponse publique et d’ampleur pour envoyer un signal », la suite, affirme-t-il à l’agence de presse, pourrait être confiée « aux agents de l’Iran », les nombreuses factions armées pro-Téhéran en Irak, au Liban, en Syrie ou ailleurs. Après le tir de missiles, l’Iran a publié un communiqué en quatre points et qui avertit « le Grand Satan, le régime américain vicieux et arrogant, qu’à tout nouvel acte malveillant ou nouveau mouvement d’agression seront opposées des réponses encore plus douloureuses et dévastatrices ». Il y est ajouté que sont avertis « les gouvernements alliés des Etats-Unis qui ont fourni leurs bases à l’armée terroriste de ce pays que tout territoire utilisé d’une façon ou d’une autre pour servir de point de départ à des actes hostiles et agressifs contre la République islamique d’Iran sera visé ».
Il y est considéré qu’« en aucun cas que le régime sioniste soit dissocié des Etats-Unis dans (la responsabilité) de ces crimes ». Enfin, il y est conseillé « au peuple
américain de rappeler les troupes américaines déployées dans la région afin d’éviter de nouvelles pertes et de ne pas permettre que la vie de ses soldats soit davantage menacée par la haine toujours croissante que le régime américain, avec sa détestation de tout peuple, suscite à son encontre (dans le monde) ».
Trump écarte tout retrait américain
Le Parlement iranien a adopté en urgence une loi classant toutes les forces armées américaines comme « terroristes » après la mort du général Soleimani, considéré comme un héros dans son pays pour le combat contre l’organisation de l’Etat islamique, Daech. Au même moment, les factions pro-Iran en Irak annonçaient avoir formé un front commun pour coordonner avec l’Iran et le Hezbollah libanais allié de Téhéran pour « adresser une réponse sévère et étudiée aux forces américaines terroristes ». « Les Marines américains doivent rentrer dans leurs repaires immédiatement pour préparer leurs cercueils parce que les bataillons de la résistance internationale ont été formées », menacent ces puissants groupes armés. Avant même les frappes de la nuit, plusieurs Etats membres de la coalition antidjihadistes emmenée par les Etats-Unis ont annoncé sortir leurs soldats d’Irak, après des dizaines de tirs de roquettes depuis des semaines sur des bases les abritant. Si la France et l’Italie ont fait savoir leur intention de rester en Irak, les Canadiens et les Allemands ont annoncé mardi le redéploiement d’une partie de leurs soldats vers la Jordanie et le Koweït. L’Otan a décidé de retirer temporairement une partie de son personnel d’Irak. Le président américain Donald Trump, lui, écarte tout départ, même si un cafouillage américain à Bagdad a pu laisser croire le contraire. Par erreur, selon le Pentagone, les Américains ont annoncé à Bagdad le début de leur retrait puisque le Parlement irakien venait de voter pour réclamer leur expulsion. Un retrait des troupes américaines « serait la pire chose qui puisse arriver à l’Irak », a déclaré le locataire de la Maison Blanche. Signe que de nouvelles violences sont toujours redoutées, l’agence fédérale de l’aviation américaine (FAA) a interdit aux avions civils américains le survol de l’Irak, de l’Iran et du Golfe.<