C’est demain, dimanche, que les Bissau-Guinéens vont aux urnes pour élire leur nouveau président. Ce scrutin intervient à la fin d’une année 2019 particulièrement agitée au plan politique. Il met aux prises le chef du principal parti et celui d’une formation dissidente, qui a réussi à rassembler les déçus du premier tour de novembre dernier.

Ce petit pays lusophone d’Afrique de l’Ouest de 1,8 million d’habitants, est coutumier des coups d’Etat comme le montre la présence très visible de l’Ecomib, la force régionale déployée à Bissau. Cette force rappelle que l’ancienne colonie portugaise a connu depuis son indépendance en 1974 quatre coups d’Etat et 16 tentatives de putsch.
Le pays était entré dans une nouvelle zone de turbulences lors du limogeage en août 2015, par le président José Mario Vaz, de son Premier ministre Domingos Simoes Pereira, chef du PAIGC (Parti africain pour l’indépendance de la Guinée et du Cap-Vert).
Depuis, la valse des Premiers ministres n’a pas cessé. Même après le bon déroulement de législatives en mars dernier, remportées par le PAIGC. C’est M. Pereira, 56 ans, qui était arrivé en tête du premier tour de la présidentielle le 24 novembre, avec 40,1% des suffrages.
Il avait devancé un autre ancien Premier ministre, Umaro Sissoco Embalo, 47 ans, qui a remporté 27,7% des voix au nom du Madem, une dissidence du PAIGC. M. Embalo compte combler son retard grâce au soutien des principaux candidats éliminés au premier tour, dont le président sortant, José Mario Vaz, arrivé seulement quatrième (12,4%), l’opposant Nuno Gomes Nabiam (troisième avec plus de 13%) et l’ancien Premier ministre Carlos Domingos Gomes (2%). «Umaro Sissoco Embalo a réussi à réunir derrière lui tous les poids lourds du pays», relève pour l’AFP l’analyste politique Agusto Nhaga.
Les deux hommes se sont affrontés jeudi soir lors d’un débat télévisé, tendu par moments, durant deux heures. «L’argent que vous amenez dans le pays ne passe pas par la voie légale», a lancé M. Pereira, accusant son rival d’être financé par l’étranger. Il s’est défendu quant à lui de toute pratique illégale. «Vous avez puisé dans les caisses de l’Etat pour financer votre campagne», a répliqué son adversaire Embalo, qui a assimilé à «une catastrophe» la gestion du PAIGC, au pouvoir.
M. Pereira est un ingénieur en génie civil qui a pris la tête du PAIGC en 2014. Après avoir été le Premier ministre de José Mario Vaz, cet homme souriant, invariablement coiffé d’un Trilby couleur paille, en est devenu l’adversaire principal. Umaro Sissoko Embalo, un général de brigade de réserve, ancien du PAIGC, se pose en rassembleur. Il a fait campagne avec un keffieh rouge et blanc noué autour de la tête, rappelant qu’il est un «musulman marié à une chrétienne».
Outre la lutte contre la pauvreté, le prochain président devra s’attaquer à la corruption et au problème de la drogue, dans un pays devenu une plate-forme du trafic de la cocaïne d’Amérique du Sud.