Qu’elle est belle Ghardaïa lorsqu’elle se drape de ses plus beaux atours pour recevoir ses hôtes. Et ils étaient nombreux, très nombreux à venir s’abandonner, en cette fin d’année, dans ses volutes de joie, de gaieté et de convivialité.

de Ghardaïa, O. Yazid
Reste que les structures hôtelières de la vallée du Mzab, classée patrimoine national par l’Algérie en 1971 et reconnue patrimoine universel par l’Unesco depuis 1982, se sont avérées bien insuffisantes pour accueillir l’important flux de touristes venus pour passer les fêtes de fin d’année. Complet ! C’est le même refrain repris en chœur par toutes les infrastructures d’accueil de la vallée du M’zab en cette fin d’année 2019. Les capacités d’hébergement se sont avérées bien insuffisantes pour contenir l’incroyable flux de touristes nationaux et étrangers, venus cette année en force dans la vallée du M’zab, alors que le magnifique hôtel Rostemides, ayant pourtant englouti pas moins de 54 milliards de centimes pour sa rénovation, tombe chaque jour un peu plus en décrépitude et demeurant désespérément clos, bien que l’on ait annoncé sur tous les toits qu’il a été repris par la chaîne El Djazaïr, et ce même s’il vient encore une fois d’être attribué à une illustre inconnue entreprise, dans le domaine des infrastructures touristiques, pour sa rénovation. Située à 600 km au Sud de la capitale, la perle de la vallée du Mzab, Ghardaïa, a accueilli ces derniers jours, particulièrement dans des maisons d’hôtes et des résidences privées plus de 1 000 touristes en grande majorité des nationaux venus célébrer le nouvel an 2019 dans le berceau des Rostemides. Depuis déjà une dizaine de jours, tous les hôtels et autres structures d’accueil affichaient complet devant l’incessant flux d’arrivants en quête d’un gîte pour passer les fêtes de fin d’année dans cette mythique ville aux multiples facettes historico-culturelles. Même les communes limitrophes ont été prises d’assaut par les visiteurs de fin d’année. Zelfana, la ville des thermes, à 75 km au sud, et Seb Seb, à 61 km au sud-est, célèbre pour ses dunes et ses succulentes cacahuètes, ont affiché et affichent encore complet, puisque ces vacances d’hiver sont, pour les parents d’élèves, encore d’actualité jusqu’à la rentrée programmée pour le 5 janvier prochain. L’important flux de touristes nationaux venus de différentes régions d’Algérie et quelques-uns venus d’Europe passer les fêtes au pays a quelque peu rendu la circulation pratiquement inextricable au centre-ville et aux grands carrefours créant ainsi d’importants bouchons et une immense cacophonie. Le déficit énorme constaté entre la demande et l’offre en matière de lits a, fort heureusement , été bien comblé par la dizaine de superbes résidences touristiques constituées de maisons traditionnelles, très prisées par les touristes, installés par des promoteurs privés dans la magnifique palmeraie de Béni Izguène, ce qui leur confère indubitablement un cachet éco touristique avéré. L’engouement constaté pour ces maisons traditionnelles dans un environnement écologique dans le périmètre éco-agricole de N’tissa augmente d’année en année et ne laisse indifférent ni touristes ni diplomates qui les occupent une bonne partie de l’année. Bravo aux propriétaires de ces résidences et carton rouge pour la direction du tourisme de Ghardaïa qui continue à « hiberner ». La « fidélité » des touristes pour cette région du sud du pays est restée intacte malgré le repli constaté ces dernières années en matière d’affluence.

Satisfecit et des lacunes
« Nous sommes très contents d’avoir choisi Ghardaïa pour ces fêtes de fin d’année. Tout s’est merveilleusement passé, tant en matière d’hébergement, restauration que sécuritaire», nous a confié un père de famille rencontré à la pompe à essence de Sidi Abbaz en train de faire le plein de carburant pour revenir chez lui, à Médéa. A la question de savoir pourquoi il a choisi Ghardaïa, il répond sans hésiter : «Ne croyez surtout pas que j’aurais pris le moindre risque pour ma femme et mes enfants si je n’avais pas été convaincu par un membre de ma famille, qui enseigne ici à l’université, et qui m’a convaincu qu’il n’y avait pas le moindre problème, et c’est effectivement ce que j’ai constaté. D’ailleurs, en sillonnant la ville avec ma voiture, je n’ai pas vu le moindre de signe d’un quelconque déploiement des forces de sécurité, tel que c’était il y a trois années. C’est juste un dispositif normal en pareille circonstance et d’une façon très discrète et je sais de quoi je parle, je suis militaire de carrière.»

Chèche et chéchia
Sur la vieille place du mythique marché de Ghardaïa, nous avons approché une famille de Guelma qui faisait ses dernières emplettes dans une boutique de souvenirs, sous des arcades «habillées» de toutes sortes de tapis. «Honnêtement, au départ, nous avions quelques appréhensions, mais dès qu’on est arrivé à Ghardaïa et que notre guide a commencé à nous faire visiter la ville, nous avons senti qu’on était en totale sécurité et qu’il n’y avait pas le moindre problème. D’ailleurs, je voudrais souligner ici l’immense respect que j’ai pour la population de cette région qui, malgré tout ce qui s’est passé, a su dépasser et laisser derrière elle cette sombre période», nous avoue une mère de famille, avocate, ajoutant : «Regardez, n’est-ce pas beau tout ça, le chèche et la chéchia ensemble, le voile en coton de la femme mozabite côtoyant la djellaba de la femme arabe dans un marché populaire. C’est ça l’Algérie avec toute sa mosaïque identitaire. C’est beau un peuple uni.»
De la Casbah d’Alger
au Ksar de Beni Izguène
A Beni Izguène, détour et passage incontournable pour tout visiteur de la région, nous avons rencontré Azziouez, un vieil enfant de La Casbah d’Alger, une vieille connaissance de jeunesse en compagnie de sa petite famille qui nous dira : «Vous avez vu, eux au moins il faut leur reconnaître ce mérite d’avoir pu préserver cet inestimable patrimoine immatériel qui est cette architecture et cette beauté du ksar qui me rappelle notre jeunesse dans l’antique Casbah d’Alger que nous avons malheureusement abandonnée et qui aujourd’hui tombe en ruine.» Après avoir longuement respiré et inspiré, celui que l’on appelait dans notre prime jeunesse Socrate et qui vit actuellement une grande partie de l’année chez ses enfants et petits-enfants en France, ajoute : «Ces murs et ces arcades sont témoins d’une grande civilisation architecturale de cette communauté travailleuse, jalouse de ses racines et de son histoire. Personne ici ne vous permettra, ne serait-ce que d’égratigner une écorce de soutien à ces meurtrières, faisant double fonction de fenêtre et d’apport en lumière naturelle pour les demeures. Rien que pour ça je reviendrai.» Socrate voudrait lancer un appel aux autorités locales pour reprendre l’organisation de la fête du tapis dont la dernière en date à laquelle il a assisté s’est déroulée en 1984. «C’était l’époque faste de l’hôtel Transatlantique où j’ai rencontré feu El Hachemi Guerrouabi et Nouria qui devaient se produire pendant cette semaine culturelle. Je garde à ce jour un petit plateau en cuivre représentant la place et le ksar de Ghardaïa et qui m’avait été offert par notre immense maître du chaâbi, el marhoum Cheikh El Hadj El Hachemi Guerrouabi, qu’il avait rapporté avec lui lors d’une édition de la fête du tapis dans les années 70.» Avant de nous quitter, il me lance : «Ghardaïa a tous les atouts pour revivre ses années de gloire. Une population hospitalière et une activité commerciale très dynamique. Mais l’atout majeur reste son architecture unique au monde et que nous jalouseraient beaucoup de pays. Il nous faut toute une synergie pour remettre sur rails la machine. Nous en avons les moyens et Ghardaïa le mérite amplement. » n