Le dispositif juridique et réglementaire pour le financement des projets de promotion des énergies renouvelables et de la maitrise énergétique s’étoffe davantage avec la publication au Journal Officiel d’un nouveau texte sur le fonctionnement du Fonds national pour la maîtrise de l’énergie et pour les énergies renouvelables et de la cogénération.
Par Kahina Sidhoum
Il s’agit d’un arrêté interministériel signé le 23 février 2022 et publié dans le Journal Officiel numéro 21 du 27 mars de la même année. Il détermine la nomenclature des recettes et des dépenses à prélever des comptes du Fonds pour le financement des «actions» et des «projets» de «promotion des énergies renouvelables et de la cogénération raccordées au réseau électrique national, de production d’électricité à partir des sources d’énergies renouvelables et/ou des systèmes de cogénération».
Le texte n’est pas très différent de l’arrêté interministériel publié en avril 2020 dans le Journal Officiel numéro 19 sauf qu’il porte cette fois, à côté de celle du ministère des Finances, la signature du ministère de la Transition énergétique et des Energies renouvelables (MTEER) à la place de la griffe du département de l’énergie et des mines. Avant juin 2020, le MTEER n’existait pas encore et c’était le secteur de Mohamed Arkab, ministre de l’Energie, qui avait la charge de la promotion du renouvelable dans le pays.
Que dit ce nouvel arrêté interministériel ? Il rappelle que le Fonds «prend en charge, l’achat d’équipements destinés pour la production d’électricité à partir des sources d’énergies renouvelables». Il finance «les actions de renforcement de capacités liées aux énergies renouvelables et/ou aux systèmes de cogénération». Il débourse pour «les études liées au développement et à la mise en œuvre des stratégies nationales de production de l’électricité à partir des sources d’énergies renouvelables et/ou des systèmes de cogénération».
Le Fonds garantit également «des financements aux industriels en vue de l’amélioration de l’efficacité énergétique des équipements et appareils de fabrication nationale». Il apporte son soutien «aux projets visant l’introduction et la diffusion des lampes performantes et des équipements et appareils électroménagers performants, la diffusion du chauffe-eau solaire individuel et collectif, ainsi que la conversion des véhicules légers, industriels et bus au GPL/c, au GN/c et au dual-fuel». Il encourage aussi «l’acquisition de véhicules électriques et des bornes de rechargement des véhicules électriques pour les particuliers».
Les recettes du Fonds proviennent de la redevance pétrolière (1%), du solde du compte d’affectation spéciale du Fonds et du solde du compte d’affectation spéciale du Fonds national de l’environnement et du littoral. Elles dépendent aussi des «subventions de l’Etat à travers les recettes de la taxe sur la consommation nationale d’énergie, des taxes sur les appareils énergivores, des amendes prévues dans le cadre de la loi relative à la maîtrise de l’énergie». La taxe de torchage, 55%, prévue auparavant, disparait du nouvel arrêté interministériel.
Couverture des surcoûts
Le suivi et l’évaluation du Fonds sont fixés par l’arrêté interministériel du 24 février 2022 du Journal Officiel numéro 22. Le texte précise que l’Etat via le MTEER, c’est-à-dire l’ordonnateur du Fonds, compense les surcoûts des opérateurs acheteurs d’électricité produite à partir de sources d’énergies renouvelables et/ou des systèmes de cogénération. La demande de compensation se fait auprès du MTEER, accompagnée d’une copie du contrat d’achat avec le producteur d’électricité. La liste des opérateurs-acheteurs bénéficiaires est fixée par le ministre de la Transition énergétique.
En ce qui concerne les actions et projets, autres que ceux concernés par la compensation des surcoûts, l’arrêté interministériel indique que c’est le ministre de la Transition énergétique et des énergies renouvelables qui fixe par décision les priorités, les conditions et les critères pour bénéficier des dotations du Fonds aussi bien pour la production des énergies que pour les actions de maitrise.
La création du Fonds national des énergies renouvelables remonte à la loi de finances 2010. Son compte d’affectation spécial est ouvert par application de l’article 108 de loi de finances 2015. En janvier 2017, deux arrêtés interministériels importants ont été promulgués pour mieux expliquer son fonctionnement. Le dernier en date, celui de mars 2022, intervient comme les précédents dans un contexte de relance du programme de génération d’électricité à partir du photovoltaïque d’une capacité de 22 000 MW. Un programme qui a connu beaucoup de retard et pour lequel l’Etat fait le pari de le relancer sur des bases plus solides avec le lancement récent de l’appel d’offres pour le projet de 1000 MW, «Solar 1000».
Les entreprises intéressées par l’appel d’offres ont jusqu’au 15 juin prochain pour déposer leurs soumissions. Fixé initialement au 30 avril, le délai de dépôt des offres a été prolongé de 45 jours, a indiqué dans un entretien à la revue spécialisée At Taqa, le directeur général de Shaems, la société algérienne des énergies renouvelables, Smaïl Mougari. 110 entreprises ont déjà retiré le cahier des charges relatif au projet.
Rattraper le retard
Sur le retard considérable pris pour la mise en place d’une infrastructure de génération, de production et de vente de l’électricité d’origine renouvelable, l’expert Tewfik Hasni s’est à nouveau exprimé hier sur le sujet, lors de son passage à la radio chaine 3. «Invité de la rédaction», il a déclaré que «l’Algérie doit aller vite vers les énergies renouvelables pour assurer sa sécurité énergétique». «Le potentiel de l’Algérie est l’un des plus importants du monde en ce qui concerne l’énergie en général et le solaire en particulier». «Nous avons démontré que le solaire représentait 37 000 milliards de mètres cubes de gaz naturel par an» un chiffre qui représente à peu près dix fois la consommation mondiale. «Il est largement suffisant pour assurer la sécurité énergétique de l’Europe et quelques pays de l’Afrique», a-t-il affirmé, expliquant que l’enjeu n’est pas seulement économique, mais sécuritaire et stratégique. «Le solaire oui, mais pas seulement le photovoltaïque, dit-il, qui ne fonctionne que 2000 heures par an (…) cela va nous permettre d’intégrer 75 % des équipements, alors que le photovoltaïque ne pourra pas dépasser les 40 %, a-t-il souligné. «Si on ne se positionne pas aujourd’hui sur le marché, c’est quelqu’un d’autre qui va le faire à notre place», a-t-il averti.