Ancienne ministre de l’Environnement et des Energies renouvelables (mai 2017-janvier 2020), Fatma-Zohra Zerouati, bouleversée par l’ampleur des incendies enregistrés dans la nuit de vendredi à samedi et qui ont ravagé des hectares de végétation dans plus d’une wilaya du pays, pointe des responsabilités occultes. Jointe par nos soins et en dépit de sa contamination à la Covid-19, Mme Zerouati a exprimé son «indignation», écartant la piste de l’incident naturel compte tenu, dira-t-elle, de la simultanéité des faits.


Reporters : Sur les réseaux sociaux, vous avez réagi à chaud sur les incendies qui ont encerclé plusieurs régions du pays, à l’Est comme à l’Ouest, ces dernières heures, en qualifiant ces incendies simultanés de «non spontanés», autrement dit provoqués. Pourriez-vous nous en dire plus à ce propos ? Est-ce que vous mettez en cause une partie ?
Fatma-Zohra Zerouati : La simultanéité des incendies nous apprend à mon sens qu’il ne s’agit pas d’un accident naturel. Ce qui s’est passé n’est pas une catastrophe naturelle, mais certainement un acte provoqué. Je peux vous dire que les circonstances naturelles ne sont pas réunies pour provoquer ce genre de dégâts, d’habitude naturels. De plus, ce n’est pas du tout le moment pour ce genre de catastrophes. Je n’écarte pas la possibilité d’un accident naturel en ce moment de l’année s’il y avait un seul endroit touché, mais là, plusieurs espaces verts dans plusieurs wilayas ravagés par les flammes, nous ne pouvons que nous poser des questions.
Maintenant si vous insistez à en savoir plus quant aux parties qui seraient derrière, je vous assure que je n’ai pas la moindre d’idée. Je vous fais savoir que je suis atteinte de la Covid-19, donc, je suis confinée. Mon état de santé ne me permet pas d’aller chercher des informations et des explications sur ce qui s’est passé. Je ne mets en cause aucune partie dans le sens où nous ne connaissons pas le responsable. Par contre, j’appelle à ouvrir une enquête pour connaître les vraies causes.

De tels incendies auront sûrement des conséquences sur l’environnement, un secteur que vous avez eu à diriger ?
Plusieurs dizaines d’hectares ont été ravagés par le feu, ce qui veut dire que plusieurs tonnes d’oxygène sont parties. L’impact de ce sinistre concerne tant la faune et la flore que la qualité de l’air qui s’appauvrit en oxygène. Outre que nous n’aurons jamais la qualité des plantes que nous avions avant l’incendie. La qualité et la valeur de la flore et de la faune diminuent énormément. Cela, sans évoquer le danger mortel auquel les habitants de ces régions doivent faire face. Laissez-moi dire qu’aujourd’hui plus que jamais, nous sommes dans l’obligation de protéger nos ressources naturelles. Elles ne nous appartiennent pas, mais elles sont la richesse des générations futures. Nous n’avons pas le droit de toucher ce qui ne nous appartient pas. Il s’agit d’un capital, en vérité c’est le vrai capital des pays. Nous devons le protéger quoi qu’il en soit, quelles que soient les circonstances et les pressions. Ce capital naturel est le garant de la sécurité alimentaire, la sécurité économique et la sécurité nationale. L’existence de l’Homme est liée à la protection de son environnement. Tout déséquilibre de l’écosystème impactera la vie de l’Homme sur terre.

Quel est le message que vous voulez transmettre suite à cette catastrophe environnementale ?
Je voudrais notamment attirer l’attention sur le danger de ces actes irréfléchis ainsi que sur les conséquences désastreuses que nous risquons de subir à long terme. C’est la raison pour laquelle j’appelle toutes les consciences afin de faire face à ces actions irresponsables. Mettons la main dans la main pour que ce genre d’accident ne se reproduise plus. Aimer l’Algérie, c’est aussi agir contre tout danger. J’appelle les associations exerçant dans le domaine à se mobiliser et à tirer la sonnette d’alarme afin de mettre fin à ces pratiques. Ce genre d’incidents contre la nature me rend triste. <