Alors que les feux poursuivaient hier leur œuvre destructrice dans plusieurs régions du pays, avec quelque 80 incendies toujours non maîtrisés, les pompiers, soutenus par les éléments de l’Armée populaire nationale et les citoyens, étaient toujours à pied d’œuvre, redoublant d’effort pour venir à bout de cette catastrophe, notamment en Kabylie où on comptait encore 69 incendies encore actifs.

Par Feriel Nourine
Cependant, le déploiement humain et le matériel mis en place face aux feux tous azimuts restaient insuffisants face à l’ampleur des feux et leur capacité de propagation, aidés en cela par des vents favorables. D’où les appels qui fusaient des populations encerclées par les feux, mais aussi par les internautes pour le recours à la voie aérienne et aux bombardiers d’eau et canadairs afin de maîtriser la situation. Un recours qui passerait obligatoirement par une aide étrangère, sachant que l’Algérie ne possède pas ce type de matériel lourd utilisé contre les feux de forêt.
Dans la soirée de mardi, alors que le pays brûlait de partout, et que plusieurs morts se comptaient parmi les citoyens mais aussi parmi les effectifs des jeunes militaires venus leur prêter main forte, le Premier ministre a révélé que l’Etat avait décidé d’affréter auprès de certains pays européens des avions bombardiers d’eau, affirmant que les contacts étaient très avancés pour le parachèvement rapide de l’opération.
Aïmene Benabderrahmane n’a toutefois pas précisé le nom des pays qui allaient mettre leurs bombardiers d’eau à la disposition de l’Algérie, ni quand ces contacts allaient être parachevés. La France semble cependant figurer sur la liste, puisque son président a annoncé hier l’envoi par son pays de deux canadairs, aujourd’hui jeudi vers la Kabylie. Un choix dicté par la situation que vit la région, a-t-il justifié.
«Face aux drames auxquels sont confrontés les amis de la France, notre solidarité est sans réserve. Au peuple algérien, je veux apporter tout notre soutien. Dès demain (jeudi, NDLR), deux Canadairs et un avion de commandement seront déployés en Kabylie en proie à de violents incendies», a annoncé Emmanuel Macron dans un message publié sur Twitter.
Avant la déclaration de Aïmene Benabderrahmane, certains pays avaient proposé leur aide et assistance à l’Algérie, dont l’envoi de bombardiers d’eau qui font défaut aux équipes de secours sur lieux des incendies. Le premier à l’avoir fait est le président tunisien. Après avoir présenté ses condoléances à Abdelmadjid Tebboune, Kaïs Saïed a fait part de «la disposition de la Tunisie à apporter son appui à l’Algérie, en envoyant un hélicoptère bombardier d’eau», a indiqué un communiqué de la présidence de la République. Les autorités algériennes ne devraient sans doute pas refuser cette proposition émanant du pays voisin, avec lequel les relations ne font que se renforcer, sur fond de solidarité accrue.
Cela étant, cette catastrophe nationale qui frappe l’Algérie depuis lundi est venue remettre au jour un dossier vieux de plusieurs années. Celui des bombardiers d’eau que des responsables au niveau de la Direction générale des forêts avaient déjà émis le vœu d’acquérir en 2014 pour pouvoir lutter efficacement contre les feux de forêt qui reviennent chaque été faire des ravages dans le patrimoine forestier national, causant aussi des dégâts humains et matériels chez les populations touchées.
Mais depuis, le vœu des forestiers est resté tel qu’il était, sans jamais passer au stade de projet inscrit dans les objectifs des pouvoirs publics. Entre-temps, les périodes estivales se suivaient et se ressemblaient, avec des incendies de forêt déclarés dans plusieurs régions du pays, avant que cet été 2021 ne vienne embraser le pays, rappelant combien les bombardiers étaient indispensables dans la lutte contre ce type de catastrophe.
Le dossier du matériel aérien n’était pas pour autant clos, et fin juin dernier, le directeur général des forêts, Ali Mahmoudi, a dévoilé qu’il était réactivé et que la DGF allait se doter de drones spéciaux ainsi que de plusieurs bombardiers afin de lutter contre les feux de forêt qu’elle est contrainte d’affronter régulièrement. «Nous étions dernièrement en visioconférence avec un constructeur américain établi en Espagne (…) Selon sa simulation, les modèles qu’il propose sont adaptés aux types de plans d’eau dont dispose l’Algérie», a indiqué M. Mahmoudi, sans toutefois citer le nom du constructeur, mais en écartant l’hypothèse de se tourner vers le canadien Bombardier et son célèbre avion Canadair : «Souvent on parle d’avions de type Canadair, or, à part le barrage de Beni Haroun, nous n’avons pas de plan d’eau suffisamment grand», a-t-il alors expliqué, soulignant que «le projet est en sommeil depuis les années 2000» après que les gestionnaires aient fait le choix de se tourner vers des moyens terrestres.
Une option qui ne satisfait pas le responsable actuel de la DGF, sachant que «les véhicules ou les avions ont chacun leurs spécialités» et que «les bombardiers d’eau sont plus rapides à intervenir», a fait remarquer le même responsable, ajoutant qu’«il y a des zones inaccessibles aux véhicules même si nous travaillons à l’entretien des pistes». n