Par Feriel Nourine
Si l’envolée des cours du pétrole et du gaz, partiellement provoquée par la situation en Ukraine, est en train de se convertir en ressources financières supplémentaires, injectées aux recettes algériennes d’hydrocarbures, la flambée des prix d’autres matières et produits se transforme, par contre, en charges supplémentaires que le gouvernement doit assumer en recourant à une grande partie de ces suppléments en devises.
C’est le cas notamment du blé, dont l’Algérie, gros importateur, se retrouve systématiquement confrontée à une hausse des prix de cette matière – que le marché n’avait plus vécue depuis 14 années – suite au blocage des exportations de la Russie et de l’Ukraine qui en assurent, à elles deux, plus du quart des ventes mondiales. Mais bien plus que le coût de la tonne de blé qui est en train d’exploser, ou encore d’autres produits céréaliers que notre pays importe, également, ce sont surtout les approvisionnements en la matière qui commencent à poser problème sous l’impact des sanctions occidentales contre la Russie, ayant provoqué des perturbations dans les livraisons russes mais aussi ukrainiennes. Dans le cas des exportations ukrainiennes, le blocage est dû principalement à la fermeture des ports ayant provoqué des perturbations de logistique et de transport au niveau international. Rien que pour le maïs, des chiffres font état de 6 millions de tonnes bloqués actuellement dans les ports ukrainiens. Des spécialistes n’écartent pas, désormais, une pénurie d’approvisionnements de céréales dès le prochain trimestre.
Dans cette configuration née du conflit armé entre la Russie et l’Ukraine, l’Algérie se voit dans l’obligation d’adapter son carnet de commande de céréales. Après avoir sensiblement réduit ses importations de France, longtemps premier fournisseur du pays en blé, et augmenté celles en provenance de Russie, l’Algérie va notamment autoriser le remplacement des blés d’origines de la Mer noire par du blé en provenance de l’Hexagone, estime-t-on dans les milieux proches. Cette probabilité pourrait être versée au compte de la normalisation des relations algéro-françaises ces dernières semaines après le froid qui les avait frappées il y a quelques mois.
Dans cette optique, la France revient à la charge pour mettre en exergue « la fiabilité de l’approvisionnement et la régularité de la production française ». Se basant sur le principe d’un « partenariat gagnant-gagnant », la partie française considère qu’« elle est la seule à conduire des actions de coopération technique en faveur de la production intérieure algérienne ». « Il existe un esprit de partenariat, complémentaire au commerce ». En attendant de voir plus clair, les autorités algériennes rassurent sur le dossier des céréales, en annonçant des mesures prises pour éviter une rupture d’approvisionnement du marché interne. Une série d’opérations d’importations ont été annoncées, ces derniers mois, dont la toute fraîche qui concerne 250 000 tonnes de blé dur supplémentaires, selon Reuters. L’achat a été fait par l’Office algérien interprofessionnel des céréales (OAIC) dans le cadre d’un appel d’offres, clôturé mercredi 2 mars, indique l’agence britannique, citant des négociants européens. Ces derniers ont annoncé un prix d’achat de 625/630 dollars la tonne.
A noter que la hausse des prix des céréales et d’autres matières premières a poussé à des hauts records des prix alimentaires, en février dernier. Les céréales, quasiment stables en janvier (+0,1%), sont reparties à la hausse le mois dernier, gagnant globalement 3%, notamment du fait de la hausse des prix du maïs (+5,1%) « sous l’effet conjugué des craintes persistantes au sujet des conditions de culture en Amérique du Sud, des incertitudes quant aux exportations de maïs en partance de l’Ukraine et de la hausse des prix du blé (+2,1%) à l’exportation », explique-t-on.