Face à des entrées en devises fort modestes tirées des exportations de gaz et de pétrole, l’Algérie n’a pas d’autre choix que de diversifier son économie, de valoriser sa production, notamment gazière, et de régler en urgence le sérieux problème de volume que connaît Sonatrach depuis plusieurs années.
Le ministre de l’Energie Abdelmadjid Attar table sur des recettes hydrocarbures en 2020 entre 23 et 25 milliards de dollars. Le projet de loi de finances 2021 prévoit des recettes hydrocarbures de l’ordre de 23,21 milliards de dollars en 2021, 28,68 milliards de dollars en 2022 et 26,45 milliards de dollars en 2023 sur la base d’un prix du baril de 45 dollars au cours de la période déterminée par la trajectoire budgétaire moyen terme, à savoir 2021-2023. Elles se situent à moins de la barre des 30 milliards de dollars. Ces recettes de 2020 et celles projetées s’avèrent les plus mauvaises depuis plus d’une décennie. Il faut remonter à 2004 pour relever des recettes hydrocarbures aussi modestes avec cette différence notable que la population algérienne est beaucoup plus nombreuse aujourd’hui et les dépenses publiques ont été démultipliées depuis. Comme en est-on arrivé à cette situation ? A l’évidence, il est clair que la conjugaison de la crise sanitaire et de la chute brutale des prix du pétrole en 2020 explique fondamentalement cette baisse importante des entrées tirées des exportations d’hydrocarbures. Mais ce n’est pas l’unique raison. Les commerciaux pétroliers rappellent en ce sens que les recettes sont le volume des exportations multiplié par le prix du pétrole. Dans notre cas, ni le volume ni les prix du pétrole, termes de cette équation, n’étaient au rendez-vous pour maintenir les recettes du moins atténuer la chute des entrées hydrocarbures. Abdelmadjid Attar, lors de son audition par la commission des finances de l’APN, a indiqué que le volume des exportations a chuté de 14% à fin septembre dernier par rapport à la même période de l’an dernier. Et le volume de production d’hydrocarbures de 10%.
L’autre raison de cette chute est que Sonatrach a raté le virage du développement de la pétrochimie en 2007-2008. Une plus grande valorisation de nos ressources hydrocarbures à travers la pétrochimie si on n’avait pas raté cette fenêtre d’opportunité nous aurait permis d’atténuer l’impact de cette chute des prix du pétrole sur les recettes en dépit d’une conjoncture défavorable à la filière pétrochimique actuellement. «De 2013 à 2019, on n’a pas cessé de refaire les études de faisabilité et les études technico-économiques de projets pétrochimiques prévues par Sonatrach dans le programme de développement de cette filière pour se rendre compte finalement que ce n’est pas rentable à moins de céder le gaz à très bas pris aux partenariats Sonatrach-compagnies étrangères», a confié un spécialiste de la pétrochimie. Aujourd’hui, Sonatrach tente de relancer la pétrochimie. Mais actuellement, la conjoncture n’est pas favorable. Elle reste cependant une option encouragée par le gouvernement. Mais elle suppose un partenariat avec des compagnies étrangères spécialisées dans le domaine dont l’avantage est le transfert de risque et l’accès aux marchés extérieurs. Pour l’économie nationale, elle demeure une option stratégique. C’est avec le développement de la pétrochimie que l’Algérie réussira l’intégration de son industrie : matières premières notamment pour l’industrie plastique, la peinture, les détergents, l’automobile (polypropylène), le textile.
Ces recettes hydrocarbures très modestes constituent, au chapitre rose, une opportunité pour diversifier notre économie, d’avancer dans la politique de substitution aux importations, la voie royale pour mettre fin à cette dépendance extrême aux fluctuations des prix du pétrole. Il convient également de régler en urgence le problème de volume que connaît Sonatrach depuis plusieurs années. A commencer par surmonter les difficultés de mise en service des gisements prévus pour produire, entre 2016-2017 et 2018, les premières quantités d’hydrocarbures et qui ne sont pas encore entrés en production, notamment les champs de pétrole du pourtour de Hassi Messaoud, le gisement de brut d’El Mzaid et les gisements de gaz importants de Tinhert et de l’Ahnet. <