Depuis, quelques jours, avec l’ allègement des mesures barrières suite à une légère amélioration de la situation épidémique, il suffit d’un tour dans les commerces ou les plages et de lieux de loisirs pour constater un relâchement dans le respect des gestes de prévention contre la contamination de la Covid-19, notamment le port du masque et les rassemblements de personnes sans aucun respect de la distanciation physique, ainsi que la reprise des fêtes familiales et des cortèges de mariage avec zorna dans plusieurs quartiers pourtant fortement atteints par le coronavirus.
Par Sihem Bounabi
L’autre constat rapporté par de nombreux témoins est également un net recul du nombre de personnes qui se présentent aux centres de vaccination par rapport au rush constaté durant la 3e vague.
Face à cela, les spécialistes de la santé exhortent les citoyens à respecter les gestes barrières et à se faire vacciner car le virus circule toujours et plusieurs pays, à travers le monde, font déjà face à une 4e vague de contaminations virulentes.
Dr Mohamed Yousfi, président de la Société algérienne d’infectiologie et chef de service des maladies infectieuses de l’EPH de Boufarik, déplore à ce sujet que «malheureusement, c’est le même constat depuis le début de la pandémie, dès qu’il y a une légère accalmie et un début d’amélioration de la situation épidémiologique, on a toujours un relâchement total et l’absence de contrôle des pouvoirs publics pour faire respecter les mesures barrières».
Il rappelle que les spécialistes ont toujours alerté sur le fait que pour sortir de cette pandémie et affronter la prochaine vague, il faut que les citoyens respectent les mesures barrières et que l’Etat les fasse respecter et que la vaccination soit accélérée pour qu’on puisse atteindre rapidement l’immunité collective.
L’infectiologue déplore ainsi que malgré les différents appels et cris d’alarme des spécialistes de la santé, il y a l’amer constat que «les Algériens restent sourds à ces appels dès que les chiffres commencent à baisser». Le président de la Société algérienne d’infectiologie insiste que dans «l’intérêt de tout le monde et dans l’intérêt des professionnels, qui sont sur la brèche depuis plus d’un an et demi, tout ce que l’on demande aux citoyens est de respecter les gestes barrières qui sont faciles à appliquer pour peu que l’on prenne conscience de cette période cruciale que l’on est en train de traverser».
Il ajoute que «c’est aussi aux pouvoirs publics de contrôler et d’être strict pour l’application de ces mesures barrières comme cela se fait dans tous les pays qui se respectent».
Concernant le volet de la vaccination, Dr Mohamed Yousfi souligne, encore une fois, l’importance de l’accélération de cette campagne pendant qu’«il est encore temps, car la menace d’une vague virulente est toujours présente. Il estime toutefois qu’«il y a une nette amélioration par rapport aux quatre premiers mois du lancement de la campagne de vaccination. Depuis un mois, le nombre de vaccins disponibles est plus important, ce qui a permis d’accélérer la vaccination de la population». Soulignant que «plus on vaccinera, plus on avancera vers l’immunité collective»’. Ainsi, même s’il y a une nouvelle vague, on pourra la contrôler, la retenir et revenir progressivement vers une vie normale».
Le spécialiste, qui est également président du Syndicat national des praticiens spécialistes de la santé publique (SNPSSP), met en exergue le fait qu’il y a des catégories de métiers qui sont plus exposées au virus et qui peuvent être une source de contamination car ils sont en contact avec la population globale.
Imposer la vaccination pour les professionnels de la santé
Dr Mohamed Yousfi souligne que la première catégorie concernée est celle des professionnels de la santé et, en tant que spécialistes, on a demandé à plusieurs reprises «l’obligation de la vaccination pour les professionnels de la santé comme cela se fait dans beaucoup de pays». Il souligne à ce sujet que «la troisième vague a été édifiante, beaucoup de professionnels de la santé sont décédés. On a constaté que pour la majorité, ils n’étaient pas vaccinés comme la majorité des malades Covid de cette 3e vague, qui a été très meurtrière».
Le président du SNPSSP s’insurge contre cela en déclarant que «ce n’est pas normal que des professionnels de la santé s’exposent et exposent les malades aux risques des complications de la contamination. Avec en plus des conséquences graves sur la santé, des risques sur l’efficacité du fonctionnement des services de santé». Ajoutant «déjà que les équipes sont fatiguées à cause du surmenage car elles travaillent sans relâche depuis plus de 18 mois, alors quand le nombre des équipes est diminué cause de la contamination du personnel de la santé, c’est encore pire pour leur fonctionnement. Cela aurait pu être évité avec la vaccination obligatoire pour les professionnels de la santé».
Il estime qu’imposer la vaccination pour les métiers de contact est également valable pour les éléments de la Protection civile, de la Sûreté nationale et des autres services de sécurité et des collectivités locales, en résumant, tous les corps de métiers qui sont en contact avec un large public.
A l’approche de la rentrée scolaire, Dr Mohamed Yousfi salue la démarche du ministère de l’Education nationale d’accélérer la campagne de vaccination au profit des professionnels du secteur. Il précise à ce sujet que la contamination touche surtout les adultes, car les enfants lorsqu’ils sont contaminés ne font pas beaucoup de formes graves mais ils sont des vecteurs de transmission du virus, d’où la nécessité de faire vacciner le corps enseignant et les membres de l’administration scolaire.
Il ajoute toutefois que les adolescents au niveau des collèges et lycées, et même les jeunes étudiants au niveau des universités, devraient aussi se faire vacciner car «on remarque avec l’apparition des variants, il y a des formes de plus en plus graves chez les plus jeunes. Ce ne peut aller que dans le bon sens de les protéger et de protéger l’ensemble de la population».
L’infectiologue estime que «le risque est toujours présent tant que l’on n’est pas arrivé à l’immunité collective, non seulement sur le territoire algérien, mais également au niveau du monde entier, car le virus circule toujours et continue d’enregistrer des mutations dont certains très virulents à l’instar du variant Delta».
Il estime ainsi qu’il faut apprendre à cohabiter avec le virus et continuer à vacciner aux niveaux local et international pour arriver à l’immunité collective dans le monde entier.
En attendant, Dr Mohamed Yousfi résume que «tant qu’il n’y a pas d’immunité collective, d’abord au niveau local d’un pays, et ensuite, au niveau mondial, il faut que les Algériens soient conscients qu’il y a toujours des risques de menaces de nouvelles vagues. La seule manière d’anticiper ces effets désastreux est de se faire vacciner et surtout respecter les gestes barrières». Pour rappel, encore une fois, les gestes barrières sont le port du masque, surtout dans les endroits clos, le lavage fréquent des mains, la distanciation physique et éviter les rassemblements de personnes. Des gestes simples à appliquer si on veut sauver des vies et reprendre une vie normale.