Lorsqu’en 2011, l’Otan, avec un rôle particulier de la France, a décidé d’intervenir en Libye et faire chuter le pouvoir du colonel Mouaamar Kadhafi, l’intention péremptoirement proclamée était de « sauver » le peuple libyen et d’apporter « la démocratie » dans ce pays. Aujourd’hui, le résultat est très loin de cette image idyllique, ce pays est un Etat failli qui a perdu sa souveraineté et reste ouvert à toutes les turpitudes. Même sa richesse en pétrole, qui fait saliver tant les puissances, ne l’a pas préservé des convoitises et des tentations de contrôle. La Libye post-Kadhafi est un territoire livré à lui-même où le seul langage qui a droit de cité est celui des armes. Les tribus, unies il y a peu sous la bannière gardienne de la Jamahiryia, se font aujourd’hui une guerre de tranchées. Les Kadhafa, les Warfala, -tribu la plus importante avec près d’un million de membres dans la région de Benghazi, les Megarha et les
Al Zouaya, autant de peuplades sans qui une paix, voire une union, est impossible en Libye. La complexe crise libyenne semble bien partie pour une dégradation sur le terrain. Une dégradation dont les conséquences pourraient vite déborder sur les voisins. La Libye, l’un des pays les plus vastes d’Afrique, partage des frontières avec plusieurs pays. La déstabilisation de ce grand et riche pays, en parallèle au désordre du Sahel, pourrait faire de la région une véritable poudrière, à l’image de beaucoup de régions instables dans le monde. Les interventions diverses, directes ou indirectes, ne feront que compliquer une solution négociée entre Libyens. Ces derniers seront évidemment les plus grands perdants de cette complication de la question sécuritaire de leur pays, dont l’avenir risque de leur échapper. On risque ainsi de passer d’un conflit entre fractions fratricides de faible intensité à une guerre ouverte entre puissances par milices interposées. Une escalade dans le chaos qui rendra particulièrement compliquée toute tentative de solution.