Le consommateur, pour lequel une journée internationale lui a été dédiée, coïncidant avec le 15 mars de chaque année, s’est retrouvé confronté à des difficultés pour le moins difficiles ; la conjoncture relançant de plus belle le droit des Algériens à une couverture sociale descente, à l’heure où le contexte de crise remet au goût du jour des arbitrages à la fois complexes et douloureux.

Par Hakim Ould Mohamed
Après le violent choc provoqué par la crise pandémique liée à la diffusion du coronavirus, le risque d’une grogne sociale ne peut être écarté, en raison des conséquences de la pandémie sur les entreprises et l’économie. Des tensions sporadiques ont été déjà constatées çà et là, ce qui fait dire à certains économistes et lanceurs d’alertes leur inquiétude quant à un probable remous social. En effet, à l’issue d’une année 2020 qui aura été pénible pour les petites et moyennes bourses, l’accélération de l’érosion du pouvoir d’achat et la paupérisation des couches défavorisées ne sont pas à démontrer. Le consommateur, pour lequel une journée internationale lui a été dédiée, coïncidant avec le 15 mars de chaque année, s’est retrouvé confronté à des difficultés pour le moins difficiles ; la conjoncture relançant de plus belle le droit des Algériens à une couverture sociale descente, à l’heure où le contexte de crise remet au goût du jour des arbitrages à la fois complexes et douloureux. Perpétuer la dépense budgétaire à son niveau actuel entraine une aggravation des déficits, alors qu’une refonte des dispositifs d’aides généralisées provoquerait une hausse de l’inflation, du taux de chômage et accélérerait davantage l’érosion du pouvoir d’achat. C’est dire que le choix auquel est confronté le gouvernement est cornélien et exige un consensus politique le plus large possible. Cette situation de précarité sociale que subit le consommateur algérien est d’autant plus alarmante qu’elle s’inscrit dans une tendance lourde, nécessitant un traitement de choc ; lequel nécessite à son tour une bonne dose de volonté politique et une adhésion de l’ensemble des couches tectoniques de la société, dont certaines se sentent marginalisées, voire des laissés-pour-compte des politiques publiques. L’approche du mois du ramadhan et des fêtes religieuses rend la situation encore plus complexe, mettant sur la corde raide des pans entiers de la société et remettant en cause l’approche sociale de l’Etat, bâtie jusqu’ici sur le captage de la rente et sa redistribution à travers les canaux traditionnels, à savoir les subventions, le soutien à l’emploi et aux salaires ainsi qu’aux entreprises. Or, la baisse de la rente pétrolière lézarde la résilience sociale face aux conséquences des chocs externes à la fois sur l’économie et les ménages. Un nouveau contrat social s’impose désormais, étant donné que l’ancien, voire l’actuel, a montré ses limites, imposant l’urgence de s’adapter à la crise par l’amélioration de l’offre domestique en biens et services, par la diversification de l’économie et des sources de financement aux fins d’améliorer la couverture sociale en faveur des démunis. L’urgence d’une aide réfléchie et repensée, qui devrait substituer au dispositif des subventions généralisées, contribuera à réduire les tensions budgétaires et à mieux canaliser le soutien de l’Etat, pour peu que cette réforme ne se fasse pas au détriment des classes moyennes qui ont soutenu jusqu’ici l’essentiel des sacrifices consentis depuis 2016. De toute façon, la crise économique et sanitaire obligera les pouvoirs publics à se tourner vers une nouvelle approche en faveur des ménages, laminés à la fois par les multiples interventions d’ordre monétaire de la banque centrale ainsi que par la dérégulation du marché et l’insuffisance de l’offre domestique et de la couverture sociale actuelle. Sauf que la vérité des prix qu’entraînera la révision de la politique des subventions nécessitera forcément une vérité des salaires. Là aussi, il s’agit d’une réponse à double tranchant à une précarité sociale criante. Car la vérité des salaires suppose la mobilisation de nouvelles ressources financières, lesquelles font défaut, et même si elles étaient disponibles, une hausse de la masse salariale risque de favoriser davantage les tensions inflationnistes. C’est dire que les temps sont décidément difficiles pour les ménages et les mesures de ruptures sont tous aussi complexes que sensibles. Mais les périodes de crises sont souvent propices aux réformes de fond, pour peu qu’il y ait une volonté politique.