Si la situation épidémique de l’Algérie liée au Covid-19 continue de s’améliorer, il n’en demeure pas moins que la vaccination reste le point faible qui peine à être solutionné. En trois semaines, le pays a enregistré une nette baisse des infections au coronavirus, ces dernières étant passées de plus de 2500 cas confirmés le 25 janvier à 405 cas avant-hier. Parallèlement, la vaccination, censée renforcer l’amélioration de la situation épidémique dans le pays, est restée statique, ne trouvant pas la voie pour aller de l’avant.
PAR INES DALI
«Nous regrettons que la vaccination n’avance pas. Même si la situation s’est améliorée, nous ne savons pas ce qui peut advenir demain», a avoué le ministre de la Santé, Abderrahmane Benbouzid, qui a tenu à noter que c’est la seule garantie pour une personne de s’en sortir indemne si elle contracte le virus.
L’évolution de la pandémie étant incertaine de par le monde entier, continuer à miser sur la vaccination ne semble pas être un vain mot pour le ministre qui l’a clairement affirmé. «Nous n’allons pas arrêter la vaccination jusqu’à ce que l’épidémie disparaisse», a-t-il indiqué. C’est que l’Algérie dispose d’«un stock important» de plusieurs vaccins anti-Covid-19 qu’elle n’arrive pas à inoculer à la population en raison de la forte réticence de cette dernière. Les stocks au niveau de l’Institut Pasteur d’Algérie, dans les hôpitaux et autres centres vaccinaux dépassent 11 millions de doses. Et «si le rythme de la vaccination ne décolle pas et reste semblable au rythme actuel faible, nous en aurons pour deux années de vaccination !», selon le Pr Benbouzid.
Aux stocks disponibles viendront s’ajouter de nouvelles doses que l’Algérie devra recevoir du système onusien Covax. Ce qui pourrait poser un véritable problème, celui de la péremption des vaccins. En effet, des lots importés sont déjà arrivés à la date de péremption en novembre dernier, rappelle-t-on, de même que d’autres seront périmés en mars prochain, comme l’ont souligné des membres du Comité scientifiques de suivi de la pandémie de Covid-19 ainsi que le directeur général de l’Institut Pasteur d’Algérie.
«Nous allons voir les dates de péremption des vaccins que nous devons recevoir de Covax. Si l’échéance de la péremption est proche, nous ne pourrons pas l’accepter car nous avons déjà suffisamment de doses» pour le court terme, a fait savoir le ministre. Une occasion pour lui de réitérer son appel à la vaccination, réfutant «les dires qui font croire que le vaccin cause des décès et des effets secondaires graves», relevant que ces derniers sont légers et que les anti-Covid-19 évitent au malade de développer une forme grave de la maladie et se retrouver en réanimation. Le taux de vaccination national peine à se redresser en dépit des nombreuses campagnes menées à travers le territoire national. Un peu plus de 13 millions de personnes sont vaccinées, dont 6,27 millions ayant reçu les deux doses représentant 30,14% des 20 millions de personnes à vacciner pour atteindre l’immunité collective de 70%. Un taux que l’Algérie s’était fixé comme objectif à atteindre à la fin de 2021.
«Nous avons peut-être atteint la limite», selon Dr Bekkat Berkani
Avec une situation épidémique qui se stabilise, il devient encore plus difficile de convaincre les citoyens d’aller se faire injecter les anticoronavirus. «Pour convaincre les gens, il faut investir dans la communication. Aujourd’hui, il y a une résistance totale de la part de la population, car les citoyens se disent pourquoi ils iront se faire vacciner alors que la situation est meilleure. On en est là», a commenté le Dr Mohamed Bekkat Berkani, président du Conseil national de l’Ordre des médecins, contacté par «Reporters».
Il estime que «nous avons peut-être atteint la limite, car ceux qui ont voulu se faire vacciner l’ont fait». C’est ainsi qu’il est revenu sur le fait que «le pays n’a pas voulu contraindre les citoyens» à se faire injecter les anticoronavirus et leur a laissé le libre choix. Il a rappelé, dans ce sens, «le pass vaccinal institué en décembre dernier et dont on n’en a plus entendu parler», d’où, pour lui, c’est une sorte de «laxisme en fonction des événements, comme par exemple, lorsqu’il y a une accalmie, tout le monde lâche la bride».
Pour lui, «nous avons raté la marche au début de la vaccination, notamment en matière de communication. Il fallait faire pression. Il fallait aussi trouver des solutions obligataires, comme pour les fonctionnaires». A ce propos, il y a lieu de relever que les différentes campagnes au profit des secteurs de l’éducation nationale, de l’enseignement supérieur, sans oublier les travailleurs du secteur de la santé, n’ont pas donné le résultat escompté. La réticence est restée maîtresse. Selon le Dr Bekkat Berkani, «Il fallait que ces travailleurs et autres comprennent qu’ils devaient se faire vacciner, car s’ils ne le faisaient pas ils auraient eu des ennuis». Mais, a-t-il fait remarquer, «cela n’a pas été fait».
Aujourd’hui, «la situation par rapport au Covid s’améliore en Algérie mais aussi dans le monde», toutefois, «on ne peut pas faire des projections dans l’avenir, car on est sorti probablement de la quatrième vague, mais il se peut qu’il y ait d’autres vagues, c’est clair», a-t-il estimé à propos de la situation pandémique. Il reste que «le plus important pour nous, c’est qu’on tire les leçons de cette épidémie». Dr Bekkat Berkani cite, par ailleurs, des déclarations «d’épidémiologistes et autres experts» qui font «la projection d’une nette amélioration de la situation pandémique au printemps». Selon eux, «probablement que le virus Covid-19 va devenir hivernal, c’est-à-dire qu’il se présentera comme la grippe saisonnière», a-t-il dit. Alors «la vaccination anti-Covid se fera peut-être comme pour la grippe, en hiver». <